Agrandissement : Illustration 1
Article fort sympathique dans le nouveau numéro du Journal des Allumés du Jazz. Il est toujours aussi agréable de recevoir ces 48 grandes pages qui parlent plus de musique que de jazz proprement dit, et pas seulement de musique, mais du monde de la musique dans le désert de la presse spécialisée et des colonnes sinistrées de la presse généraliste. Le Journal, qui paraît seulement deux ou trois fois par an, ne se renouvelle pas vraiment, mais il reste d'une très haute tenue, jadis salué par Le Monde Diplomatique comme le meilleur du genre. Et pour cause, il y a ici pratiquement autant à lire que dans ce mensuel inégalé, du documentaire et de la fiction, des interrogations fondamentales sur la vie des bêtes (IA, Spotify, marché du disque, héritage culturel, applaudissements, trumpisme, silence, etc.). Impossible à feuilleter, mais certainement nécessaire à feuilletonner pour en venir à bout !
Sa couve dessinée par Johan De Moor évoque le second Salon du Jazz qui se tiendra au Mans les 29 et 30 novembre prochains. Ce n'est pas si évident de déplacer du monde à une heure de TGV de Paris. Il faut espérer que l'implantation des Allumés au Mans profite d'aides substantielles. Il y avait évidemment plus de passage lorsque nous étions à Paris (mon label est toujours adhérent, même si je ne m'y investis plus comme autrefois, entre autres en assumant la co-rédaction en chef du Journal avec Jean Rochard pendant dix ans, ou en réalisant le catalogue de 1999, le défunt blog, la double compilation CD Les actualités de 2005, etc.). S'il faut bien décentraliser, ce choix est-il encore d'actualité ? Si GRRR fête son cinquantième anniversaire, les Allumés ont trente ans comme le rappelle l'édito de la rédaction, illustré cette fois par Efix, car comme toujours le Journal bénéficie essentiellement des petits mickeys des meilleurs dessinateurs : Killoffer, Emre Orhun, Julien Mariolle, Nathalie Ferlut, Thierry Alba, Jop, Pic, Isabelle Raquin, Rocco, Andy Singer, Fred Vervisch, Zou (sans oublier les photos de Guy Le Querrec). Une frise dessinée façon Bayeux par Gabriel Rebufello rappelle le chemin parcouru. Malgré les vicissitudes du disque, la soixantaine de labels adhérents ont su conserver leur indépendance. La dématérialisation des supports, dont profite essentiellement les majors, a fait chuter les ventes de manière catastrophique, mais les amateurs de beaux objets, attachés aux livrets instructifs ou esthétiques, résistent.
Agrandissement : Illustration 3
Comme au premier numéro est posée la question "Avez-vous une bonne raison de produire ?" et je m'y colle parmi d'autres camarades ainsi qu'aux autres questions "Pourriez-vous citer un évènement particulièrement marquant pour la musique ou son devenir depuis trente ans ?" et "Citez un album discographique que vous avez acquis chez un disquaire en 2024-2025 qui vous semble important ?". Sont ensuite interrogés des auteurs de pochettes. Suivent une évocation du Jazz Composers Allumés Orchestra illustré par une photo prise par mes soins au Salon de l'an passé, donc un article sur le mode fonctionnement de Spotify ou encore Les 13 morts de l'intelligence artificielle par autant d'écrivains plus un texte d'Étienne Brunet, un autre de Bonaventure Almeyreda (il y a des pseudos qui ne trompent pas son monde, ainsi Raymond Vurluz s'entretient avec le sympathique organiste Emmanuel Bex), etc. J'écris Etc., mais nous n'en sommes qu'à la moitié. Restent des entretiens avec la formidable pianiste Françoise Toullec ou le jeune saxophoniste nonagénaire François Jeanneau, des textes de Clément Gibert, Fabien Barontini, Pierre Tenne, Cordelia Winfield, Pablo Cueco, Jean-Louis Wiart, Anne-Marie Parein, Marie Nachury, l'évocation de deux enregistrements de musique pour Nosferatu, "De l'esclavage à la transe - La Tunisie noire" par Mohamed El Kebir, un nouveau rébus de Cueco et Denis Bourbaud, etc. donc, plus les nouveautés discographiques dont trois des miennes qui justifient l'encart !
Si vous n'êtes pas abonné (c'est gratuit), le Journal est téléchargeable. J'aurais préféré qu'il soit quotidien, bilingue et en ligne, mais c'est comme un disque, tenir l'objet entre ses mains est rudement sympa. Si les Allumés savent mettre le feu aux poudres, GRRR colle toujours aussi bien à l'envie de mordre !
L'article sur le 50e anniversaire du label GRRR :
Jean-Jacques Birgé avait glorieusement célébré son centenaire en 2018 avec un album discographique plein de surprises.
L'ami Arthur aurait pu commenter qu'on n'était pas sérieux quand on a cent ans. On a en effet mieux à faire et c'est bien ce qu'a fait et continue à faire au-delà de ses cent ans (quelle santé) Jean-Jacques Birgé, comme par exemple en fêtant les 50 ans de GRRR...., l'étiquette qu'il a inventée en 1975 pour la publication de l'album Défense de..., réalisé avec le guitariste Francis Gorgé avec qui il va faire un sacré bout de chemin et le percussionniste Shiroc (qui officiait alors dans certaines formations de jazz rock avec Jeff Seffer, Gérard Curbillon ou Jannick Top). Jean-Jacques Birgé y jouait des claviers de toutes sortes, du saxophone, des percussions (liste non exhaustive). GRRR... fut, en 1979, le label du premier album d'Un Drame Musical Instantané, extravagant trio créé par Birgé, Gorgé avec le trompettiste Bernard Vitet qui, après avoir été une des étoiles du jazz français et être passé par le free jazz, s'était singularisé dans la création d'une musique résolument différente avec La guêpe, par exemple. Il publiera d'ailleurs son second album solo, Mehr Licht, sur GRRR... en 1979. Un Drame Musical Instantané s'est illustré par ses relations cinématographiques, mises en musique des films de Jean Vigo, Robert Wiene, Dziga Vertov, Marcel L'Herbier, Jean Epstein, des créations en grand orchestre ou des spectacles multimédias. La liste de leurs invités donne des pistes : Richard Bohringer, Brigitte Fontaine, Daniel Laloux, Colette Magny, Christian Marin, Maurice Garrel, Guy Piérauld, Henri Texier, Benoît Delbecq, Steve Arguëlles, DJ Nem, Philippe Deschepper... Outre l'étonnant album d'Hélène Sage, les albums du trio Pied de Poule, un récent duo Dominique Fonfrède - Françoise Toullec et les très jolis albums de l'accordéoniste et chanteuse Michèle Buirette, GRRR... est aussi une foisonnante documentation du trajet de Jean-Jacques Birgé. Récemment parus: le faunique Animal Opera avec un big band cunicole, le volume 4 de la série Pique-nique au labo et sa foultitude de remarquables invités, et un étourdissant double album, Les déments, avec le comédien Denis Lavant et le saxophoniste Lionel Martin. Vivement le millénaire !