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Billet de blog 3 février 2025

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Faut-il passer à une 6° République ?

Le programme de législature du NFP propose page 17: Vers une 6° République: • Abolir la monarchie présidentielle dans la pratique des institutions : • Instaurer la proportionnelle • Revitaliser le parlement • Abroger le 49.3 • Défendre la décentralisation • Passer à une 6e République par la convocation d’une assemblée constituante citoyenne élue

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Abolir la monarchie présidentielle dans la pratique des institutions :

Il est clair qu'un élément important de cette " monarchie présidentielle" est l’instauration en 1962 de l'élection présidentielle au suffrage universel.

Je suis personnellement pour en finir avec cette clé de voûte des institutions de la V° République. Je suis à cet égard entièrement d'accord avec le livre de Thomas Legrand, journaliste à Libération et chroniqueur sur France-Inter : « Arrêtons d'élire des présidents » (Stock 2014).,

Alors, c'est vrai, tous les sondages montrent que les français sont attachés à cette façon d'élire le plus haut personnage de l’État. Mais n'est ce pas le rôle du politique d'ouvrir la voie à des réformes qui n'ont pas (encore ?) l'assentiment de nos concitoyens1.

Il est certain qu'il y a une forte résistance des citoyens et surtout des politiques à abandonner cette modalité d'élire nos présidents. On peut même dire en ce qui concerne ceux-ci que ça les rend fous, au sens qu'ils ne pensent qu'à ça !!! Voir l'obsession de Jean-Luc Mélenchon, de Mme Le Pen et bien d'autres qui y pensent …. même en ne se rasant pas !!!

Ajoutons qu'à garder cette modalité d'élection au suffrage universel, le risque de voir Mme Le Pen ou M. Bardella accéder au pouvoir n'est pas négligeable, ce qui serait catastrophique pour la République.

Comme le dit Thomas Legrand cette modalité d'élection induit chez les politiques la tentation à se poser comme homme (ou femme) providentiel pouvant résoudre tous les problèmes et les pousse à l'insincérité : faire campagne en vers pour ensuite gouverner en prose, c'est à dire en se reniant.

Voir Jacques Chirac avec la fracture sociale suivie du plan Juppé ou François Hollande qui passa de « mon ennemie est la finance » à la loi travail et au CICE, sous l'impulsion de Macron et de Jouyet. !!!

Alors que faire ?

Une solution pourrait être de revenir à la façon dont on élisait la président dans la V° République de 1958 à 1962, c'est à dire d'élire le président au suffrage indirect par environ 80 000 électeurs :

Sur le portail Vie publique :

Comment était élu le Président au début de la Ve République ?

Le texte initial de la Constitution de 1958 prévoyait une élection du président de la République au suffrage universel indirect.

« Une élection au suffrage indirect...

À l’origine, le président de la République était élu au suffrage universel indirect par un collège comprenant environ 80 000 grands électeurs. Ce collège était composé des parlementaires (députés et sénateurs), des conseillers généraux et d’élus municipaux. Afin d’éviter une trop grande inégalité dans la représentation des communes, les conseils municipaux des grandes villes désignaient des grands électeurs supplémentaires, tandis que la représentation des petites communes était limitée à leur seul maire.

En choisissant ce mode de désignation, la Constitution de 1958 instituait un régime parlementaire rénové dans lequel le chef de l’État voyait ses prérogatives renforcées, sans pour autant lui conférer une légitimité aussi forte que celle de l’Assemblée nationale, seule instance élue au suffrage universel direct.

La Constitution de 1958 met ainsi en œuvre les vues institutionnelles du général de Gaulle, définies dès le 16 juin 1946 dans son discours prononcé à Bayeux. L’ancien président du Gouvernement provisoire de la République française souhaitait accroître les prérogatives, mais aussi la légitimité du chef de l’État, en le rendant moins dépendant des assemblées parlementaires par son mode de désignation, sans pour autant instituer un régime présidentiel ou exiger son élection au suffrage universel direct : "C’est donc du chef de l’État, placé au-dessus des partis, élu par un collège qui englobe le Parlement, mais beaucoup plus large et composé de manière à faire de lui le président de l’Union française en même temps que celui de la République, que doit procéder le pouvoir exécutif."

Lorsqu'il est investi comme président du Conseil le 1er juin 1958, dans le contexte de la crise algérienne, le général de Gaulle demande à l’Assemblée nationale de lui déléguer le pouvoir constituant, ce qu’il obtient par la loi constitutionnelle du 3 juin 1958. Celle-ci ne traite pas explicitement du mode de désignation du chef de l’État, mais elle exclut clairement l’instauration d’un régime présidentiel, en posant le principe de la responsabilité du Gouvernement devant le Parlement, et en indiquant que le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif doivent émaner du suffrage universel ou "des instances élues par lui".

... conforme à la tradition républicaine d'avant 1958

En ne prévoyant pas l’élection du chef de l’État au suffrage universel direct, la Constitution du 4 octobre 1958 s’inscrit dans la tradition républicaine française. Les textes constitutionnels de la IIIe et de la IVe République avaient également exclu ce mode de désignation du chef de l’État, car il s’était soldé le 2 décembre 1851 par le coup d’état de Louis-Napoléon Bonaparte qui avait entraîné la chute de la IIe République.

En effet, ce dernier, élu président de la République en décembre 1848 pour un mandat de quatre ans non renouvelable, souhaitait réviser la Constitution afin de pouvoir se représenter à cette élection, alors que les textes interdisaient une réélection immédiate. Or Louis-Napoléon Bonaparte ne disposait pas de la majorité nécessaire à la réalisation de son projet à l’Assemblée. La Constitution de 1848 avait prévu une stricte séparation des pouvoirs entre un exécutif (le président de la République) et une assemblée législative, élus tous deux au suffrage universel direct. En conséquence, aucun de ces deux pouvoirs ne disposait de moyens d’action l’un sur l’autre. Il était dès lors prévisible qu’un conflit entre le président de la République et la Chambre se solderait au profit de l’exécutif, qui disposait de la force publique et des armées. L’élection du chef de l’État au suffrage universel direct devait ainsi rester associée dans les mémoires au pouvoir personnel et au rétablissement de l’Empire, intervenu un an plus tard, le 2 décembre 1852.

Aussi les lois constitutionnelles de 1875 et la Constitution de 1946 ont-elles prévu que le président de la République serait élu par les deux chambres du Parlement réunies en Assemblée nationale, sous la IIIe République, ou en Parlement, sous la IVe République, et non plus directement par le peuple. Les chambres devenaient ainsi les seuls organes de l’État désignés par les électeurs et, en tant que tels, les seuls dépositaires de la souveraineté nationale. »

Resterait à voir comment opérer cette réforme constitutionnelle d'ampleur.

Il ne manque pas de constitutionnalistes et de parlementaires à gauche pour répondre à cette question.

En ce qui concerne la proportionnelle, voir ma précédente contribution.

En résumé passer à une proportionnelle régionale à un seul tour avec un scrutin au plus fort reste (à débattre)

Revitaliser le parlement : Bien sûr la réforme de la façon d'élire le président déplacera le centre de gravité du pouvoir vers le parlement.

Pour découpler durablement les élections législatives et présidentielle, il faudrait réfléchir à un éventuel retour au septennat, renouvelable (ou pas).

• Instaurer le référendum d’initiative citoyenne (RIC) et renforcer

le référendum d’initiative partagée (RIP)en abaissant notamment le

seuil de signatures citoyennes pour son déclenchement,

Tout à fait d'accord.

Défendre la décentralisation effective en renforçant la

démocratie locale dans l’unité de la République

Entièrement d'accord.

Instituer le droit de vote des résidents étrangers aux élections

locales :

Cette proposition n'a jamais été instaurée par la gauche malgré les promesses.

Personnellement je n'y suis pas favorable car c'est un chiffon rouge que ne manqueront pas d'exploiter la droite et l'extrême droite. A mon avis il vaudrait mieux faciliter l'accès à la nationalité française pour permettre aux résidents d’accéder à la citoyenneté. (C'était la position de Manuel Valls).

• Abroger le 49.3 :

L'actualité met en évidence qu'un gouvernement sans majorité doit avoir recours à cet article pour faire voter les budgets de l’État (PLF) et de la Sécurité Sociale (PLFSS). C'est indispensable pour gouverner.

Cela serait aussi le cas pour un gouvernement de gauche sans majorité absolue, ce qui est parfaitement possible.

La solution dont beaucoup parlent (Thomas Legrand, Jean Garrigues, et d'autres) est la notion de 49-3 constructif, c'est à dire que le gouvernement en place ne serait renversé qu'en présence d'une majorité alternative et d'un chef de gouvernement potentiel. Un tel dispositif aurait permis à la Gauche actuelle (NFP) de gouverner sans être renversée.

Pour conclure :

Si toutes les réformes proposées ci-dessus étaient acceptées et mises en œuvre on aurait affaire à une cinquième République suffisamment rénovée pour se dispenser de passer à une 6° République hypothétique et incertaine.

D'ailleurs on ne voit pas bien ce que veut dire une « constituante citoyenne élue » !!! (par qui, comment etc...)

Reprendre les discussions autour du projet de loi relatif à

l’accompagnement des malades et de la fin de vie, pour instaurer

un droit à mourir dans la dignité dans notre pays.

Entièrement d'accord.

Fait le 3 02 2025

1C'est ce que fit François Mitterrand en abolissant la peine de mort

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