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Billet de blog 20 juin 2014

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Pour un service public de la médiation en Ile-de-France

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( intervention à la rencontre du 9 juin 2014 au conseil régional Ile-de-France sur la médiation)

Je voudrais commencer par remercier le Vice-Président Abdelhak Kachouri de m'avoir proposé d'ouvrir la rencontre d'aujourd'hui, consacrée à la médiation et à la prévention, et plus précisément au projet de création d'un réseau régional. C'est une question qui me tient particulièrement à coeur, en tant que Président de la commission politique de la ville et de la sécurité. Un intérêt largement partagé par mes collègues de la commission, si j'en juge d'après les échanges que nous avons pu avoir entre nous lors des nombreuses auditions sur le thème de la médiation.

Le rapport-cadre, voté par le conseil régional en février 2012, traduit cette volonté partagée avec le vice-président Kachouri. Ce rapport comporte plusieurs axes : 1) le lancement d'une plateforme régionale de prévention et de médiation, un outil au service du réseau, lieu d'échanges et de réflexion commune ; 2) la mise en place de formations en direction de bénévoles impliqués dans des associations exerçant des missions de  médiation; 3) le financement à titre expérimental de diagnostics pour l'élaboration de stratégies locales de prévention et de sécurité; 4) des aides à la construction, la réhabilitation et l'équipement de lieux publics destinés à des structures de médiation en vue de l'accueil du public, de Maisons de la Justice et du Droit (MJD) et de Points d'accès au Droit (PAD) portés par les collectivités territoriales

La mise en oeuvre du rapport a été accompagné par l'augmentation en 2013 des crédits alloués aux actions de médiation, dont la consommation rapide a montré qu'il existait dans ce domaine une forte demande – malheureusement, le budget 2014 n'a pas suivi

Ce n'était certes pas la première fois que la Région s'intéressait à la médiation, à travers l'aide aux associations intervenant dans ce domaine. Par sa contribution au Syndicat des transports d'Ile-de-France (STIF), elle participe au financement de quelque 500 postes de médiateurs dans les transports. Elle a soutenu aussi des réflexions plus globales, comme en 2009 le projet « Franciliens Tous Médiateurs » du Forum Français pour la sécurité Urbaine. Cependant, le rapport-cadre de 2012 a incontestablement donné une impulsion à l'action régionale, en initiant une action plus cohérente et plus territorialisée et, même si ce n'était pas exprimé de manière aussi explicite, en l'inscrivant dans la perspective de la construction, en Ile-de-France, d'un service public et d'un nouveau droit pour le citoyen: le droit d'accès à la médiation.

C'est cette perspective que je souhaite que nous ayons à l'esprit dans nos échanges de cet après-midi lorsqu'à travers les thèmes des deux tables rondes sur la médiation sociale et l'accès au droit, nous nous interrogerons sur le rôle que pourrait jouer la Région.

Vous êtes ici toutes et tous des spécialistes du sujet, et je ne vous apprendrai rien sur l'importance de la médiation sociale qui, sous ses formes diverses, participe au renforcement des capacités personnelles, aide à la résolution des petits conflits de la vie quotidienne, contribue à rétablir les liens entre les services publics et les usagers.

Elle a fait l'objet, au cours de ces 20 dernières années, de nombreux travaux. Je rappellerai en particulier :  la charte de référence de la médiation sociale, visée par la CIV du 1er octobre 2001, qui en précise les missions, le cadre déontologique d'intervention et les conditions de son bon exercice ; la publication du guide d'évaluation de l'utilité sociale de la médiation sociale en 2009; le rapport « Médiation sociale: pour la reconnaissance d'un métier » du groupe de travail animé par le Secrétariat général à la Ville paru en décembre 2011 ... mais aussi les travaux menés au sein des associations d'élus comme le Forum Français pour la Sécurité Urbaine et le Réseau des Villes correspondants de nuit et de médiation sociale.

Chacun s'entend pour dire que le métier de médiateur est très exigeant et difficile, que son exercice nécessite de grandes qualités de « savoir être », qu'il nécessite un grand professionnalisme. Et pourtant, paradoxalement, il conserve trop souvent une image peu valorisée – peut-être liée à son histoire de recrutement par le biais d'emplois aidés et à la reconnaissance encore incomplète du métier. Son utilité sociale – pourtant largement confirmée par toutes les études qui en démontrent même la rentabilité financière – n'est pas encore reconnue à sa juste valeur au niveau du salaire et elle n'a pas encore vraiment trouvé son financement pérenne.

Vos travaux de cet après-midi, apporteront je crois des éclairages intéressants sur ces différents points, et ouvriront certainement quelques pistes quant au rôle que pourrait jouer la Région. Permettez-moi de vous livrer quelques réflexions à ce sujet, en déroulant l'idée-force selon laquelle nous avons aujourd'hui à travailler ensemble à la construction d'un service public de la médiation en Ile-de-France, auquel chaque habitante et chaque habitant de notre région doit pouvoir accéder, quel que soit le lieu où il habite – et je ne développe pas ici le gisement d'emplois, utiles à la collectivité, qui pourraient être créés par de développement de la médiation.

Comment faire?

Un état des lieux est nécessaire, c'est un travail assez complexe, car la médiation sociale est elle- même multiple, elle intervient dans un cadre partenarial et le champ territorial de son action est également important, car un service public doit pouvoir être accessible à tous. Ce travail est en cours, il doit prendre en compte aussi la diversité des structures qui interviennent dans la médiation, opérateurs prestataires, associations porteurs de projets de cohésion sociale, services intégrés dans les communes, plus rarement Groupement d'intérêt public ou autres structures de portage mutualisées associant plusieurs partenaires publics et privés. Toutes ces structures ont leur place, et je n'oublierai pas la médiation qui s'exerce comme compétence de base par des intervenants en contact avec le public ou encore des professionnels qui peuvent se trouver ponctuellement dans une posture d'intermédiaire, voire par des bénévoles encadrés par des professionnels, comme à Montreuil.

Il me semble qu'après avoir posé la première pierre avec le rapport-cadre de février 2012, la Région pourrait maintenant se fixer un nouvel objectif – c'est en tout cas une question que je soumets au débat - celui de définir avec nos partenaires, dont l'État, une stratégie régionale et un plan d'actions pour le développement de la médiation.

Ce plan pourrait viser la professionalisation de la maîtrise d'ouvrage publique comme celle des acteurs de la médiation - médiateurs et structures de médiation; il apporterait un soutien aux démarches globales des collectivités territoriales et aux porteurs de projets; il mobiliserait plus largement les outils de la Région en matière de formation et de développement économique, la médiation pouvant trouver place dans la Stratégie régionale de développement économique et de l'innovation. Je ne veux pas être plus long sur le sujet, mais j'ai en tête le travail ambitieux engagé par la Région Nord-Pas-de-Calais - un travail que connait bien Laurent Giraud, directeur de France Médiation.

Voilà les quelques réflexions que je souhaitais partager avec vous en introduction à nos échanges de cet après-midi.

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