Michael Martin restera très certainement, dans l'histoire parlementaire britannique, le Speaker qui a laissé la police entrer sans mandat d'arrêt et arrêter un député à Westminster, le 3 décembre 2008. Rien ne laissait présager que le président de la Chambre des Communes allait être sous les feux des projecteurs. Rien ne laissait deviner non plus qu'il accéderait à ce poste un jour. Et lorsque la célèbre Betty Boothroyd, première femme Speaker de l'histoire du Royaume-Uni, descendit définitivement de sa charge en 2000, pour entrer à la Chambre des Lords et devenir Baroness Boothroyd, personne ne pensait vraiment à Michael Martin.
Mais il fallait récompenser la fidélité au parti travailliste et la promotion sociale, semble-t-il. Or Martin fut élu, pour la première fois sous l'étiquette travailliste, en 1978, dans la circonscription de Glasgow Springburn, devenue ensuite Glasgow North East. Il a toujours été réélu facilement depuis. Il est le symbole de la lutte sociale, puisqu'il a commencé sa vie professionnelle comme ouvrier dans la métallurgie, pour devenir ensuite permanent syndical. C'est un school-leaver, comme John Major, c'est-à-dire qu'ils ont tous deux quitté leur comprehensive school, à l'âge de 16 ans, avec leur O-levels, (ordinary levels)sorte d'équivalent du brevet des collèges.
Ils ne font donc pas partie du sérail parlementaire traditionnel, et, en ce qui concerne Michael Martin, c'est, en quelque sorte, une caution working-class. Cependant sa popularité est limitée, d'une part parce que le nombre de ses gaffes est presque aussi important que celles de Sarah Palin aux Etats-Unis, d'autre part parce qu'il ne s'est jamais départi d'un esprit de solidarité de classe très particulier. Ainsi, il ne sait plus rien refuser à Patrick McLoughlin, président du groupe conservateur à la Chambre de Communes, non seulement parce qu'il est d'origine écossaise, comme lui, mais surtout parce qu'il a commencé sa vie comme mineur, un autre working-class hero donc. Cette partialité très spécieuse n'est pas du goût de tout le monde chez les travaillistes qui connaissent également son cronyism, c'est-à-dire sa fâcheuse habitude à avantager ses amis.
De plus, ces derniers soupçonnent quelques mauvais relents de vengeance et de lutte des classes dans l'affaire de l'arrestation du député Damian Green, qui est conservateur et ancien journaliste, catégorie socio-professionnelle que Michael Martin n'aime guère. Bref, il n'y a pas grand monde pour défendre le Speaker, aujourd'hui, alors que d'ordinaire, conservateurs et travaillistes font front pour défendre le premier d'entre eux. Dans l'édition du Guardian du 5 décembre, le journaliste parlementaire Michael White laisse même clairement entendre que Michael Martin pourrait quitter son poste bien avant les prochaines législatives, prévues au plus tard en 2010.