Les électeurs de la petite circonscription –75.000 électeurs– de Rochester and Strood, dans le Kent, ont confirmé, hier 20 novembre 2014, dans le cadre de l’élection législative partielle, la tendance exprimée dans les sondages, bien que l’ampleur de la victoire ait été moindre. En effet les derniers chiffres donnaient à Mark Reckless quatorze points d’avance, il a finalement été élu avec sept points de marge, 16.867 suffrages, soit 2.700 voix d’avance sur la candidate conservatrice, Kelly Tolhurst. qui en obtient 13.947 ; le candidat travailliste ne recueille que 6.713 voix soit 16,8% des suffrages exprimés, une véritable correction. Ce résultat va, bien évidemment, donner l’occasion à UKIP et à Nigel Farrage de fanfaronner, mais la réalité impose de considérer qu’ils vont simplement, dans l’immédiat, prolonger et accentuer la situation fort embarrassante de David Cameron, le premier ministre britannique, car certains paramètres doivent être pris en considération.
Tout d’abord, Mark Reckless — reckless, en anglais signifie casse-cou — n’a pas pris beaucoup de risques, puisque, tout comme son collègue Douglas Carswell dans la circonscription de Clacton-on-Sea dans l’Essex, voir un précédent billet, il a quitté le parti conservateur, démissionné de son siège de député pour se représenter immédiatement à la législative partielle ainsi engendrée, sous la bannière de UKIP. Dans des circonscriptions, soit frappées par la crise (Clacton) , soit rangées derrière un rebelle (Rochester), les électeurs mêlent la prime donnée au sortant et le mécontentement face au pouvoir central. D’après le Guardian du 9 novembre, trois autres députés du parti conservateur, Philip Hollobone, élu de Kettering dans le Northamptonshire, Peter Bone, député de Wellingborough dans l’East Midlands voisin, et John Baron, député de Redhill dans le Surrey, entendraient suivre le même chemin.
Ces cinq députés sont connus pour leur opposition systématique non seulement à David Cameron mais aussi, très régulièrement depuis leur élection, à l’Union Européenne. Mark Reckless, le ré-élu de Rochester, était à la tête d’un groupe de 53 députés conservateurs, qui, le 31 octobre 2012, ont infligé une sévère défaite au premier ministre au parlement (307 voix contre 294) en votant avec le Labour pour faire passer un amendement travailliste demandant une diminution du budget européen du Royaume-Uni, ce qui avait affaibli David Cameron dans ses négociations avec l’UE. Il s’agit, donc, de députés conservateurs qui considèrent que Cameron est trop faible face à l’UE et ne va pas assez vite pour la quitter. Reckless, tout comme Carswell, jouait sur du velours puisqu’en 2010 il avait été élu, sous l’étiquettee Tory, avec plus de 10.000 voix d’avance sur la candidate travailliste, Teresa Murray. La situation qui résulte de tout cela est tout à fait paradoxale.
Les derniers sondages donnent Tories et Labour au coude-à-coude, mais, d’une part, Ed Miliband fait l’objet d’une fronde sourde et, à ce jour, non officiellement déclarée, d’autre part David Cameron d’une impopularité que seul François Hollande peut battre aisément. Les législatives du printemps 2015 constituent, donc, une grande inconnue, d’autant que UKIP ne pourra pas bénéficier de sièges résultant de défections conservatrices à grande échelle.