C’est un terrible coup porté à l’économie locale. La décision du tribunal administratif de Toulouse d’annuler l’autorisation environnementale de l’A69 a plongé bon nombre de chefs d’entreprise de la région de Castres dans le désarroi et l’incompréhension, les laboratoire Pierre Fabre menacent de déménager et de "privilégier des territoires d'accès plus rapides et mieux sécurisés" pour leurs futurs investissements. De nombreux élus locaux s’inquiètent pour l’emploi et notamment pour les travailleurs du chantier désormais arrêté. Mais tout n’est pas pour autant définitivement perdu, l’État va faire appel et demander un sursis à exécution afin de permettre la poursuite des travaux en attendant le jugement définitif. Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la transition écologique soutient cet appel car ce projet d’autoroute est d’un intérêt public majeur, nécessaire au désenclavement d’un territoire qui n’est relié à Toulouse que par une route nationale ne permettant pas des déplacements à grande vitesse, le tronçon routier pourrait représenter un gain de temps de 20 mn ! Autant dire que pour les turbo-cadres de Pierre Fabre, l’enjeu est quasiment existentiel ! D’une façon plus générale, la ministre Pannier-Runacher comprend tout à fait les préoccupations des milieux patronaux qui plaident pour un développement durable voire continu : elle défend une vision positive, pragmatique de l’écologie qui ne peut se résumer à des « interdictions tous azimuts » et à des freins à la production, "c'est précisément ce qui fait qu'aujourd'hui les Français se détournent de l'écologie, alors même que nous avons absolument besoin de défendre l'environnement". L’argument massue, définitif car il émane du peuple souverain, est asséné : selon la ministre, les gens refusent l’écologie punitive car ils ne veulent pas d’une protection de l’environnement et du vivant qui fragiliserait les activités économiques et remettrait en cause leur niveau de vie. La solution du système dominant pour réconcilier les citoyens avec l’écologie est connue : la défense de l’environnement passe par la décarbonation et par le développement de technologies vertes qui non seulement ne menacent pas la croissance mais au contraire la soutiennent. Ce faisant, avec ce discours techniciste rassurant et prometteur, Agnès Pannier-Runachet, comme tous ses collègues du gouvernement, entretient la défiance vis-à-vis des associations de protection de la nature, défiance sur laquelle les politiques s’appuient pour justifier la poursuite d’une politique croissantiste qui ignore et réprime les défenseurs de l’environnement, volontiers qualifiés d’écoterroristes. C’est un véritable cercle vicieux car plus les tenants d’une croissance débridée mettent en œuvre leurs projets destructeurs de l’environnement et plus ils suscitent une opposition résolue de la part des écologistes permettant ainsi au pouvoir de les diaboliser et d’ alimenter le rejet d‘une écologie punitive dans l’opinion avec bien sûr le relais actif de la majorité des médias (entre les mains d’une poignée de milliardaires affairistes).
Le capitalisme se nourrissant de la croissance, ses ennemis mortels sont tous les objecteurs de croissance, toutes celles et ceux qui mettent en avant la protection du vivant plutôt que la production et l’accumulation de biens matériels et de choses inertes qui dévorent peu à peu notre espace vital.
Avec l’arrêt de l’A69, l’affairisme hexagonal vient d’enregistrer un revers mais il peut malgré tout rester confiant dans l’avenir car une puissante source de croissance est en train d’émerger et de submerger le débat national : la militarisation de l’UE sous l’égide de notre Président.
L’économie de guerre va permettre à notre industrie de l’armement qui est déjà très puissante de produire plus et d’engranger davantage de profits. Et comme le remarquent les élus locaux des sites de production, avec les contrats à venir « l’ensemble de l’économie locale va bénéficier du réarmement de la France car on sait qu’il y aura des emplois indirects » . Nous sommes bien dans le même schéma que pour les constructions d’autoroutes mais à une autre échelle. . .
Pour le coup, il s’agit vraiment de produire, travailler, et gagner plus pour tuer plus.
Et cette nouvelle perspective de croissance doit faire consensus, le Président y travaille, il paraît que la Russie qui est toujours bloquée dans les territoires du Donbass après trois années de guerre, s’apprêterait à envahir la Moldavie, puis la Roumanie.
La militarisation des esprits est en marche, les objecteurs de conscience et de croissance n’ont qu’à bien se tenir !