Après le rejet de la taxe Zucman, c’est désormais une évidence : sous la présidence d’Emmanuel Macron, il y a une règle d’or qui ne peut souffrir aucun compromis, les ultrariches doivent pouvoir continuer à bénéficier de tous les dispositifs d’évitement et d’exemption fiscale qui leur permettent de garder intacte leur motivation pour devenir encore plus riches. La solidarité nationale ne les concerne pas. Ne sont-ils pas du reste avant tout, comme le capitalisme dont ils sont les représentants les plus emblématiques, des prédateurs sans véritable attache, des sans domicile fixe de luxe, à la recherche permanente pour leurs affaires ou pour leurs loisirs des meilleures opportunités aux quatre coins de la planète ? Le capital mondialisé, voilà la seule patrie des milliardaires comme Bernard Arnault. De la devise de la république, ils ne retiennent que la liberté, la liberté d’entreprendre et d’exploiter sans vergogne toutes les formes de ressources susceptibles de nourrir leurs profits et leurs fortunes.
Le projet de budget de la Sécurité sociale, après avoir été rejeté en commission des affaires sociales, est débattu cette semaine à l’Assemblée nationale. C’est un budget encore plus révoltant que le budget de l’État car de nombreuses dispositions prévues vont frapper les personnes disposant de faibles revenus ; toute une batterie d’horreurs risquent, si elles sont adoptées, de faire basculer bon nombre de français dans la trappe à pauvreté. Ainsi, dans le domaine des dépenses de santé, les mesures envisagées pour réaliser des économies comme par exemple le doublement des franchises médicales, sont indifférenciées et vont toucher beaucoup plus durement les populations déjà défavorisées et fragilisées par la maladie. Or les maladies et tout spécialement les affections de longue durée comme les dépressions, les troubles musculo-squelettiques ou les cancers qui sont en forte augmentation sont aussi la conséquence de choix coupables en matière de politique économique et sociale. La dégradation de notre environnement, conséquence d’un développement irraisonné et irresponsable, a des effets délétères sur notre santé en fragilisant notre système immunitaire et en contribuant aussi au développement de nouveaux parasites et agents pathogènes. Comme on peut le lire sur le site de Santé Publique France, « le changement climatique est identifié comme un des grands enjeux en santé environnementale et comme une menace majeure pour la santé publique. Le changement climatique vient s’ajouter à d’autres facteurs déjà bien identifiés comme l’exposition aux pesticides particulièrement élevée dans notre pays et à toutes les pollutions industrielles dont les PFAS, les polluants éternels, qui sont particulièrement invasifs (ils contaminent l’eau du robinet dans plusieurs régions françaises). Une politique de santé publique véritablement efficace devrait être avant tout préventive mais c’est évidemment incompatible avec la poursuite de la politique agricole et industrielle actuelle qui ne peut qu’aggraver les problèmes et détériorer l’état de santé général de la population. Le vote récent de la loi Duplomb en est un exemple caricatural. Conscient de ces contradictions, le gouvernement s’emploie à masquer sa responsabilité par une politique de communication tendancieuse voire mensongère. Ainsi un rapport du Haut-Commissariat à la stratégie et au plan sur « les politiques publiques de santé environnementale » commandée par l’Assemblée nationale a été édulcoré par les services de l’État et notamment par le cabinet de la ministre de l’agriculture Annie Genevard afin d’adopter des formulations minimisant les risques sanitaires des pesticides, certains membres du conseil scientifique chargé de superviser le rapport se sont insurgés contre de telles pratiques. Clément Beaune, le haut-commissaire au plan, au lieu de protéger les membres de son institution, a choisi au contraire de participer à leur intimidation. Comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement avec un Haut commissaire adepte du techno-solutionnisme pour traiter la crise environnementale et qui entend notamment doper le secteur de l’Intelligence Artificielle en multipliant les centre de données dédiés à l’IA et faire de la France « un hub scientifique mondial » ! Accroître le potentiel de l’IA en France ne peut se faire sans une augmentation notable de notre consommation d’électricité et de nos émissions de gaz à effet de serre. D’après l’ONG Beyond Fossils Fuels : « Au cours des six prochaines années, l’explosion de la demande en énergie des centres de données dans l’UE [Union européenne] pourrait entraîner une hausse de 121 millions de tonnes des émissions de CO2, soit presque l’équivalent des émissions totales de toutes les centrales électriques au gaz d’Italie, d’Allemagne et du Royaume-Uni en 2024 combinées » Il est vrai que l’IA pourra aider les météorologues à bâtir des modèles pour mieux comprendre et prévoir le changement climatique induit par cette même IA.
Même si les macronistes sont décidément des adeptes du « en même temps » et d’une gouvernance paradoxale qui défie toute logique hormis celle du profit, il leur est malgré tout de plus en plus difficile d’assumer des contradictions insurmontables.
Pris dans cet étau productiviste, le peuple subit et souffre. Le budget de la Sécurité sociale en discussion peut être qualifié de budget de la double peine car les populations défavorisées qui subissent des politiques ineptes et qui souffrent le plus de la dégradation de notre environnement par manque de moyens d’adaptation sont aussi celles qui devraient être le plus affectées par les économies budgétaires programmées.