Le week-end dernier, des militants d’Extinction Rébellion et de Youth for climate ont investi les locaux d’une usine phare de la transition énergétique, l’usine Arkema de Pierre-Bénite. Selon les organisateurs de cette action, “ Arkema a des pratiques obscures qui affectent la santé des habitants et la biodiversité environnante ”. Cette entreprise de la chimie est en effet particulièrement polluante, elle fabrique des polymères et des composants utilisés dans les batteries au lithium des véhicules électriques en rejetant dans l’environnement des composés fluorés toxiques. Ces molécules sont qualifiées de “polluants éternels” car elles ne se dégradent que très lentement et persistent donc pendant de nombreuses années dans l’environnement.
D’après un rapport de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable publié en 2023, le site rejette chaque année jusqu’à 3,5 tonnes de PFAS (de l'anglais per- and polyfluoroalkyl substances), ces fameux polluants éternels. D’après l’ANSES, “la toxicité de ces composés chimiques est multiple : ils provoquent une augmentation du taux de cholestérol, peuvent entraîner des cancers, causer des effets sur la fertilité et le développement du fœtus. Ils sont également suspectés d’interférer avec le système endocrinien (thyroïde) et immunitaire.” Alors qu’il en a pourtant l’obligation depuis 2015, ARKEMA ne communique pas la totalité des résultats d’analyse de ses rejets.en aval du site de production
La politique écologique du gouvernement se réduisant à une approche techniciste, la transition énergétique avec notamment le développement des voitures électriques est souvent présentée comme un des éléments clés de sa politique de développement durable. Pour le pouvoir macroniste , cette approche est d’ailleurs la seule envisageable car elle ne remet pas en cause une économie axée sur la consommation et la croissance. Mais qui est assez naïf et désinformé pour considérer aujourd’hui que la voiture électrique, surtout lorsqu'il s'agit d’un gros SUV, est un véhicule écologique ? Qui peut encore croire que l'électricité produite par des champs de panneaux photovoltaïque ou à partir de méthaniseurs engraissés avec du maïs nous permet de nous déplacer ou de consommer de façon durable ?
Les cycles de vie de tous nos objets électrifiés et connectés ont un impact environnemental considérable.
Un rapport publié le 1er mars par un groupe d’experts des Nations Unies, le “Global Resources Outlook 2024” (*), montre que la consommation mondiale de ressources naturelles a triplé en cinquante ans. Evidemment, l’extraction et la transformation de ces ressources pèsent aussi très lourd dans nos émissions de gaz à effet de serre : environ 55%.
Les émissions de gaz à effet de serre ont d’ailleurs encore augmenté en 2023 de 1,1% par rapport à 2022, malgré l’urgence et les avertissements répétés de la communauté scientifique.
Les modes de production énergétique alternatifs ne sont pas une solution au problème du dérèglement climatique et ils engendrent aussi une pollution chimique généralisée qui constitue une terrible menace pour le vivant.
Avec les énergies “vertes” ( dont le nucléaire fait partie !), on pourrait dire que nous tombons de Charybde en Scylla, mais non, c’est encore pire : nous avons tout à la fois Charybde et Scylla, nous avons à la fois la pollution chimique et les gaz à effet de serre. Notre civilisation techniciste et croissantiste a le don d'engendrer et de multiplier les monstres qu’elle ne peut maîtriser.
(*) https://www.unep.org/resources/Global-Resource-Outlook-2024