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Billet de blog 8 février 2011

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Les deux enfermements

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Les deux enfermements

Michèle Alliot-Marie propose à Ben Ali l’assistance de la police française qui dispose, comme chacun sait, d’un savoir-faire inégalé dans le maniement des matraques, elle veut sauver des vies, épargner aux manifestants tunisiens les souffrances d’une répression trop dure, agissant sans discernement, malhabile car inexpérimentée ; elle entend ainsi préserver les chances d’une révolution naissante.

Michèle Alliot-Marie va passer ses vacances de Noël en famille, sous le soleil de Tunisie ; sur place, elle profite (utilise) du jet privé d’un vieil ami, Aziz Milled, un industriel du tourisme, homme « très respecté » en Tunisie et qui « a été spolié» par le clan Ben Ali. Aziz Milled peut donc être légitimement considéré comme un opposant à la dictature et sa fréquentation constitue sans aucun doute un acte de défiance et de résistance au régime en place.

Michèle Alliot-Marie nous prend tous pour des c. . . , elle fait partie de l’équipe de N Sarkozy et elle peut donc tout se permettre. En France, le pouvoir en place ne recule devant rien, il a été élu « démocratiquement » en 2007 et cette onction populaire originelle lui donne le champ libre ; elle légitime toutes les actions, autorise tous les reniements, condamne les français à la soumission et à la résignation jusqu’au prochain vote. La Vème République nous condamne à un enfermement «démocratique» entre deux élections.

En France, les millions de manifestants qui ont défilé dans les rues en septembre et octobre pour réclamer le retrait du projet de loi sur les retraites ont été superbement ignorés. La loi a finalement été promulguée sans modification majeure au mois de novembre, en attendant, cerise sur le gâteau, le débat sur la dépendance des personnes âgées qui devrait entériner la mainmise du privé dans notre système de protection sociale.

Les citoyens français sont trompés et méprisés par leurs dirigeants, le mécontentement s’amplifie, les mouvements de protestation et de colère se multiplient (comme celui qui vient d’être lancé par les magistrats) mais le train des réformes gouvernementales n’est pas stoppé et la politique menée est même de plus en arrogante, de plus en plus inégalitaire, une politique conduite pour le plus grand profit d’une petite caste de privilégiés. Cette politique est catastrophique au plan intérieur mais ses effets se font également sentir au niveau international : l’accroissement des inégalités, le pillage des ressources naturelles (comme au Niger avec AREVA) et parfois aussi des ressources humaines, la détérioration accélérée de l’environnement, la hausse du prix des matières premières et notamment des produits alimentaires, facteurs de misère et de désespérance, sont en grande partie le résultat des politiques néolibérales menées par les gouvernements des pays riches. Les chefs d’Etats occidentaux qui se posent aujourd’hui volontiers en donneurs de leçons font preuve comme toujours d’une hypocrisie et d’un cynisme révoltants : le fameux « principe de réalité » et la volonté de préserver coûte que coûte leurs intérêts les conduit à abandonner à la vindicte populaire des dictateurs qu’ils ont longtemps soutenus et sur lesquels ils se sont appuyés pendant des décennies pour développer des partenariats industriels et financiers, en exploitant sans vergogne les populations locales.

Les manifestants du Caire, de Tunis, de Sanaa, qui manifestent avec beaucoup de courage et qui réclament le départ de leurs dirigeants, sont donc aussi nos porte-voix, les porte-voix des altermondialistes. Ils rejettent leurs « élites » corrompues mais accusent indirectement tous les corrupteurs qui prétendent désormais leur donner des leçons de démocratie. Nous devons les soutenir en dénonçant encore plus fermement les mécanismes de domination qui conduisent les puissants à enfermer les peuples du Sud dans une misère présentée trop souvent comme inhérente à leur nature.

Jean-Luc Gasnier

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