Plus de 80 milliards d’euros de profits pour les entreprises du CAC 40 en 2011 et, à ce titre, environ 40 milliards d’euros versés aux actionnaires, un montant record, selon le journal « Les échos », sans parler des salaires mirifiques des grands patrons . . .
Que la fête continue ! Le capital ne connaît pas la crise. Depuis l’élection de N Sarkozy, la fortune se porte haut et fort ; elle doit tenir son rang, sans fausse pudeur. L’Etat a choisi son camp et poursuit avec une obstination zélée des réformes réclamées par le patronat qui visent toutes à améliorer la rentabilité du capital et à diminuer le coût du travail. La nouvelle réforme fiscale programmée cette année ne devrait pas décevoir ses habituels mandants et notamment Laurence PARISOT qui déclarait déjà en 2008 que la suppression de l’ISF serait « la meilleure façon de conserver des investisseurs dans notre pays et la meilleure façon de faire venir d’autres investisseurs qui avaient quitté notre pays ». Sous l’emprise de l’idéologie libérale, L’Etat ne redistribue plus mais accentue au contraire le partage inégal de la valeur ajoutée. L’abondance pour une petite minorité est payée au prix fort par la grande majorité des français. Le capitalisme financier continue ainsi, inexorablement, à multiplier les pauvres et les exclus dans une société où la richesse créée augmente.
Mais la société de consommation et de croissance ne peut survivre en état de manque. Elle est avant tout programmée pour la jouissance, et la consommation ostentatoire de quelques uns ne peut suffire à son bonheur. L’abstinence et la privation pour une frange de plus en plus importante de la population lui font courir un risque mortel qui peut la mener vers d’autres totalitarismes. Confrontée à la mondialisation, à la compétition permanente, aux flux de marchandises et de capitaux, notre civilisation moderne forme et valorise à tour de bras des consommateurs « malins », à la recherche des meilleurs prix, qui contribuent chaque jour à détruire un peu plus les emplois de leurs compatriotes. C’est Saturne dévorant ses propres enfants. Notre république fabrique avant tout des citoyens individualistes qui, la crise venue, se retrouvent démunis, sans recours, sans ressource psychologique et abandonnés par un Etat qui a entrepris depuis longtemps déjà, sous la pression des milieux patronaux, un parcours destiné à le priver de toutes ses prérogatives et notamment des instruments lui permettant d’actionner les mécanismes de solidarité. Le « travaillez plus pour gagner plus » a rejoint la liste interminable des promesses électorales non tenues mais il faut aussi désormais se contenter de moins , se satisfaire d’un pouvoir d’achat en baisse tout en assistant aux agapes d’une petite classe d’hyper privilégiés qui se gobergent avec mépris. Alors, noyés dans un sentiment d’aigreur, les esprits s’échauffent et tout refait surface : les années « fric » de François Mitterand et de Bernard Tapie, les privatisations en série sous Balladur puis sous Lionel Jospin, les mallettes du RPR et le financement illicite des partis politiques, le non à la Constitution Européenne effacé par le Traité de Lisbonne, l’impunité des hommes de pouvoir, l’affaire Woerth –Bettancourt, l’affaire du sang contaminé, l’amiante, les laboratoires Servier, et tous les autres petits et gros scandales politico-financiers, démocratiques, sanitaires, etc, qui émaillent la vie de la Vème République.
Marine LE PEN, dont les médias parlent beaucoup, n’est pas venue toute seule, elle est bien accompagnée ! Sa montée dans les sondages traduit le désarroi des français mais surtout la déshérence d’une démocratie et d’une République qui ne fonctionnent plus et se révèlent incapables d’assurer au peuple la garantie des droits fondamentaux et le respect des revendications et aspirations collectives.
Il est grand temps de changer de République et de mœurs politiques si nous voulons éviter que les français rejoignent en masse de nouvelles identités protectrices afin de faire face aux dangers réels ou supposés qui les menacent.
Jean-Luc Gasnier