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Billet de blog 14 mai 2011

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L'actionnaire ou le citoyen

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Nous sommes à un an désormais de la prochaine élection présidentielle. Trente ans se sont écoulés depuis la victoire de François Mitterrand le 10 mai 1981, depuis la première et la seule victoire de la gauche à cette élection qui surdétermine et rythme la vie politique française. La réélection de Mitterrand en 1988 revêtit une toute autre signification : elle maintenait au pouvoir un homme converti à la politique spectacle et au libéralisme, compromis dans de multiples affaires et préparant activement le terrain pour le camp prétendument adverse. 1981 reste donc une date unique pour toute une fraction de l’électorat. Cela explique sans doute l’espèce d’exaltation nostalgique qui entoure désormais une commémoration qui évoque un passé apparaissant de plus en plus lointain et décalé par rapport au désenchantement actuel ; c’est aussi le souvenir d’une joie, d’une ferveur populaire suscitée par l’espoir d’un changement véritable et profond. On sait ce qu’il advint de cet espoir de changement, de l’union de la gauche, des promesses faites aux uns et aux autres et notamment aux écologistes qui réclamaient déjà à l’époque l’arrêt du nucléaire. Dès mars 1983, avec ce fameux « tournant de la rigueur », l’économique prenait le pas sur toute autre considération ; l’expérience socialiste si « coûteuse » et hasardeuse pour les classes dirigeantes prenait fin.

Depuis, les réalités économiques et les exigences du patronat ont progressivement imposé leurs marques. L’ensemble du champ sociétal est en passe d’être soumis aux règles du capitalisme financier même si quelques îlots de résistance hautement symboliques comme la Sécurité sociale ou les 35h demeurent des acquis farouchement défendus.

En trente ans, les marges de manœuvre de la sphère politique se sont considérablement rétrécies. Le pouvoir a progressivement changé de camp ; sous la pression des grands acteurs économiques et d’ institutions internationales comme le FMI, l’OMC ou encore l’Union Européenne , le législateur vote régulièrement des textes qui soumettent les citoyens au diktat de la finance. Ainsi, à la date anniversaire du 10 mai, l’assemblée nationale a adopté cette semaine un projet de loi constitutionnelle qui vise à interdire tout déficit budgétaire. Nos élus se dépossèdent de leurs prérogatives pour mieux pouvoir s’abriter par la suite derrière des règles auxquelles ils ne peuvent déroger. Derrière le voile apparent de la démocratie, la tyrannie de l’argent roi tisse patiemment une toile qui renforce la puissance du capital et de l’actionnaire pour mieux contraindre le travail, malmener l’environnement et la démocratie. Les principaux prétendants à la magistrature suprême, issus des partis de gouvernement, déclarés ou non, acceptent ces règles du jeu et s’en font les relais ; ce sont les favoris des médias dominants. Les candidats qui refusent de se soumettre à ces critères et notamment ceux de la gauche alternative sont présentés comme des extrémistes et des populistes. La propagande médiatique s’emploie à modeler les esprits afin que le peuple utilise sagement son bulletin de vote. Les fossoyeurs de la démocratie, une fois l’élection remportée, peuvent ensuite délaisser le citoyen pour avantager outrageusement l’actionnaire en se prévalant paradoxalement de la légitimité démocratique. Il faudrait faire front, résister en masse pour mettre à bas un tel système qui sape insidieusement et inexorablement toute vie collective. Il faudrait retrouver le goût des luttes communes et des rassemblements dans une période d’ « extinction » massive des citoyens que l’on réduit au silence, et que l’on pousse à la résignation, fabriquant ainsi des individus fragilisés, isolés et désabusés.

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