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Billet de blog 15 septembre 2013

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Un horizon qui s'éloigne

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41,5 ans de cotisation, bientôt 43 ans pour une retraite à taux plein ! Offrir aux jeunes la perspective d'une vie de labeur. . .

Prendre sa retraite à un âge où la déchéance physique n'est pas encore là , où la perspective de la maladie est suffisamment éloignée pour autoriser quelques projets et bénéficier d'une pension qui permet de vivre dignement, sans trop compter, est contre-productif pour les économistes libéraux. Être autonome, pouvoir s'adonner à des activités choisies, non contraintes, permettant un accomplissement personnel, vivre en tant qu'individu libre et non en tant que producteur-consommateur, voilà qui est bien trop subversif et de fait intolérable pour les pouvoirs en place. Non, il faut sacrifier sa vie à l'entreprise, avoir le travail salarié et les congés payés comme seules perspectives avant la maladie ou la mort. La retraite pleine sera bientôt réservée à des vieillards et il faudra se contenter le plus souvent de pensions maigrichonnes ou amputées qui nécessiteront de recourir à des petits travaux d'appoint, des petits emplois de misère, afin de maintenir un minimum vital.

L'Allemagne est le pays européen souvent pris pour référence par le patronat français. Outre -Rhin, la politique de compétitivité engagée par le gouvernement Schröder au début des années 2000 a entraîné une chute spectaculaire des bas salaires et une hausse des contrats de travail à temps partiel. L'âge légal de départ en retraite étant de 65 ans (il passera à 67 ans en 2027), de plus en plus de personnes subissent une décote en liquidant leur pension de vieillesse : près de 60 % en 2008 contre 12 % en 2000. Et les effets sociaux sont déjà spectaculaires : selon le ministère des affaires sociales allemand, environ 700 000 seniors de 65 à 74 ans auraient un emploi à temps partiel. Et pour Ulrike Mascher, qui préside l’association pour la défense des droits sociaux VDK, ces nouveaux retraités sont bien loin de travailler par plaisir : « Quand on voit dans quelles activités les retraités travaillent, ils portent des journaux à 5h du matin, ils rangent des étagères dans des supermarchés, ils font des ménages, ils travaillent comme portiers la nuit. Ce sont des activités qu’on ne fait pas parce qu’on veut rencontrer des collègues ou parce que cela nous plaît mais parce qu’on a urgemment besoin d’argent parce que la retraite ne suffit pas. »

La réforme des retraites qui sera présentée prochainement devant le Parlement porte une nouvelle fois la marque du patronat qui doit désormais déployer des trésors d'ingéniosité pour faire la fine bouche et conserver un discours revendicatif ; le gouvernement s'emploie tous les jours à le satisfaire davantage.

C'est évidemment un nouveau recul social, une perspective affligeante, mais c'est surtout un recul de civilisation, un recul au plan des valeurs.

La recherche du profit pour les actionnaires conjuguée à une politique d'austérité, le maintien impératif (voire l'accroissement) de la rentabilité du capital, amenuisent inexorablement notre qualité de vie et restreignent finalement nos libertés individuelles ; l'entreprise, la production, la consommation d'objets et de services industrialisés, doivent constituer notre horizon indépassable. Il faut alimenter, nourrir, accroître et concentrer sans cesse le capital.

Comment peut-on se réclamer du progrès social, se prétendre progressiste et asservir l'ensemble de la société au pouvoir financier ?

Au mois de décembre 1972, le président Salvador Allende qui allait être victime, moins d'un an plus tard, le 11 septembre 1973, d'un coup d'état orchestré en sous main par Nixon et Kissinger, prononçait ces paroles à la tribune des Nations-unies : «  Nous sommes face à des forces qui opèrent dans l'ombre, sans drapeau, avec des armes puissantes, postées dans des zones d'influence directe.[...] Nous sommes face à un  conflit frontal entre les multinationales et les États. Ceux-ci sont court-circuités dans leurs décisions fondamentales - politiques, économiques et militaires - par des organisations qui ne dépendent d'aucun État, et qui à l'issue de leurs activités, ne répondent de leurs actes et de leurs fiscalités devant aucun parlement, aucune institution représentative de l'intérêt collectif. En un mot, c'est toute la structure politique du monde qu'on est en train de saper. »

A l'époque un certain François Mitterrand s'était rendu en Amérique latine afin d'assurer le Président Allende de son soutien et de tirer des enseignements de l'expérience en cours au Chili.

Aujourd'hui, l'Etat socialiste prête désormais main-forte aux multinationales.

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