Cela ne pouvait plus durer, l'art de la dissimulation et de l'esquive a ses limites, François Hollande a donc fait son « outing » libéral : lors de cette mémorable conférence de presse du 14 janvier 2014, il a enfin levé le voile et montré son vrai visage d'homme de droite, acquis à une politique de l'offre, toute entière dévouée aux milieux d'affaires. Pour que la quasi-totalité des commentateurs se rendent enfin à ce que d'aucuns considéraient comme une évidence, il a fallu que notre Président, comme on dit vulgairement, « mette le paquet » : 30 milliards de cadeau supplémentaire aux entreprises par le biais de la suppression de la part patronale des cotisations familiales, l'annonce d'une réduction drastique des dépenses publiques (environ 50 milliards sur 3 ans) et l'assurance que tout serait désormais mis en oeuvre pour simplifier la vie des créateurs de croissance. Car l'objectif fondamental est bien là : retrouver le remède absolu, et en prendre une bonne dose car « il s’agit d’aller plus vite, d’aller plus loin, d’accélérer, d’approfondir. En 2014, l’enjeu n’est pas simplement que la France retrouve la croissance – elle se dessine. C’est que cette croissance soit la plus vigoureuse possible ». Le contenu de cette croissance importe peu, tout le monde sait désormais que le produit est frelaté, que ses effets sur les sociétés et l'environnement sont désastreux, mais les gros dealers comme F Hollande n'en ont cure : ils continuent de vanter les mérites d'une drogue qui, en système néo-libéral, concentre toujours plus les richesses et le pouvoir économique en répandant la misère et en multipliant les frustrations.
Pour accéder au Graal, la recette est simple, directement inspirée du modèle allemand ou britannique : une austérité accrue pour la grande majorité avec des restrictions de toute nature et en particulier la diminution des aides sociales et des services publics tandis qu'une petite minorité de détenteurs de capitaux se voit garantir des contraintes allégées et des opportunités de profits supplémentaires. La vraie maîtresse de F Hollande est Angela Merkel qui doit aujourd'hui se réjouir d'avoir modelé et corseté l'UE à sa façon. Ce mois de janvier marque décidément le début d'une nouvelle ère pour le quinquennat et ce gouvernement libéral avec la hausse de la TVA et une baisse du salaire net due à une hausse des cotisations vieillesse (compensée pour la part patronale mais pas pour les salariés). Avec tous ces milliards à distribuer aux patrons, les motifs de mécontentement vont se multiplier. Notre modèle social est en passe de disparaître dans « les eaux glacées du calcul égoïste » pour satisfaire la rapacité du MEDEF car, n'en doutons pas, sur ce chemin-là, tous nos biens communs seront bientôt vendus à l'encan. La haute fonction publique et sa technocratie autiste donneront encore l'illusion d'un pilotage de l'Etat quand toutes les manettes auront pourtant été abandonnées aux entrepreneurs privés. « L'observatoire des contreparties » compilera des documents et pourra bien rendre son éventuel rapport annuel, mais qui s'en souciera réellement ?
La grande casse sociale et environnementale ne fait que commencer.
Au moins n'y aura-t-il plus de débat sur la couleur politique de ce gouvernement. La représentation nationale est clairement dominée par un bloc libéral composé de l'UMP et du PS, sans doute le socle de «la cohésion nationale » appelée de ses vœux par le Président.
Face à cette nouvelle droite, la gauche ( la vraie), qui ne dispose quasiment plus de relais institutionnels et qui se confond pratiquement avec le Front de gauche, se doit de porter seule, mais avec encore plus de détermination, les enjeux écologiques et sociaux. L'adversaire qui pouvait parasiter les luttes a quitté les rangs.
C'est un choc de simplification bienvenu mais tout désormais est à reconstruire.