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Billet de blog 16 avril 2011

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Les dodos ne sont pas tous morts

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L’idée émise cette semaine par le gouvernement d’une prime de 1000€ pour les salariés travaillant dans les entreprises distribuant des dividendes et qui pourrait se traduire par une disposition spéciale dans le prochain projet de loi de finance rectificative est bien évidemment destinée à servir le candidat N Sarkozy qui vient d’avoir ces mots magnifiques : « la situation, je la sens bien pour 2012 ». Décidément, notre président est très prévisible et, avec lui, le pire est toujours sûr. Gageons qu’il ne s’embarrassera pas de scrupule pour tenter une nouvelle fois de tromper l’électorat et d’imposer au peuple français la poursuite de la cure néolibérale réclamée par les grands groupes industriels et financiers. Le partage inégal de la valeur ajoutée et des fruits de l’augmentation de la productivité pourra ainsi perdurer et s’accentuer encore. Le versement d’une gratification supplémentaire de 1000 €, consenti à une petite minorité de salariés, loin de remettre en cause la logique actuelle du capitalisme patrimonial, ne peut que la conforter. Dans un monde de financiers, la rémunération du capital et du travail demeurent antagonistes. Et, pour préserver les intérêts de l’actionnaire, ce qui est donné au travail sous une forme doit lui être repris sous une autre. Les salariés sous contrat à durée indéterminée, protégés par des syndicats bien implantés, bénéficiant de statuts et de conventions collectives « favorables » et intéressés aux résultats de leur entreprise deviennent peu à peu l’exception, la partie haute d’un sablier qui déverse inexorablement dans un bas-fond du capitalisme des chômeurs et des prolétaires constituant une ressource de main d’œuvre à bon marché . Ce nouveau lumpenprolétariat subit délocalisations, externalisations, travaux précaires, travaux à temps partiel, humiliations en tous genres pour des salaires misérables, caractéristiques d’un monde d’exploitation, sans voix et sans « action » (au sens capitaliste et syndicaliste du terme). Pour tous ces travailleurs et aussi pour tous les jeunes stagiaires à la recherche de leur premier emploi dont l’humanité faisait sa une le jeudi 14 avril, la nouvelle trouvaille du gouvernement est une frustration supplémentaire, un cadeau de pré-campagne électorale qui ne comble pas mais accroît au contraire encore davantage les inégalités. Ce régime détestable s’est fait une spécialité dans l’exacerbation des oppositions et des divisions entre les différentes catégories de la population : entre laïcs et « religieux », entre immigrés et français « de souche », entre les français qui se lèvent tôt et ceux qui se lèvent tard, etc . . . Tout le monde finit par se regarder en chien de faïence. Avec le monde du travail, Sarkozy tente en permanence - en s’appuyant notamment sur les divisions syndicales - d’accentuer les clivages et de rompre la cohésion d’un corps social déjà marqué par des inégalités et des injustices criantes. La prime de 1000€ s’inscrit aussi dans le cadre de cette stratégie : acheter à bon compte la participation passive de certains en leur octroyant, en leur concédant, certaines « avancées ». Pour les salariés qui pourront en bénéficier, c’est sans doute appréciable sur le moment mais c’est assurément privilégier le court terme sur le long terme : cela ne peut être qu’une satisfaction de courte durée car le capitalisme trouvera bientôt de nouvelles proies parmi les « privilégiés » qui piètent tranquillement, tels des dodos, dans l’univers trompeur et euphorisant de la participation aux résultats.

Jean-Luc Gasnier

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