L’adaptation est un mécanisme de survie primordial pour les êtres vivants mais aussi pour les sociétés qui doivent se développer et survivre aux modifications de leur environnement. Dans une démocratie représentative, un des rôles essentiels des élus (et notamment des élus les plus influents) est de permettre, de faciliter cette adaptation. Que demande-t-on en effet à un homme ou une femme politique ? Quelles sont les qualités qui peuvent justifier sa place de décideur et d’arbitre parmi ses concitoyens ? Ce ne sont certes pas des compétences d’expert dans tel ou tel domaine, dans telle ou telle technique, mais bien sa lucidité et sa capacité à faire preuve de clairvoyance afin d’opérer des choix politiques permettant d’affronter les défis contemporains et à venir. Et comme la politique est aussi affaire de communication, d’exemplarité, un responsable politique se doit d’adopter un comportement exemplaire et de délivrer un message susceptible de faciliter les mutations et les transitions nécessaires. Rien ne sert de prôner le changement si le discours et les actes ne sont pas en cohérence.
Jugés à l’aune de ces critères essentiels et vitaux, nos hommes politiques, se révèlent particulièrement défaillants. Ils ne sont ni clairvoyants, ni lucides, mais stupidement démagogues et malhonnêtes.
Que penser en effet d’une ministre de l’Ecologie qui ne trouve rien de mieux à proposer - au moment même où elle présente le projet de loi sur la transition énergétique - que la gratuité des autoroutes le week-end ? Quelle merveilleuse perspective pour les français et quel progrès en matière de pouvoir d’achat, surtout pour les plus défavorisés, que de pouvoir emprunter librement les grands axes de circulation afin de rallier le plus rapidement possible les parcs d’attraction ou les centres commerciaux qui seront bientôt ouverts le dimanche ? Après la suppression définitive de l’écotaxe et la démission de Christian de Perthuis, le président du comité de la fiscalité verte, le « virage majeur » ( pour reprendre l’expression de Christian de Rugy, le président du groupe EELV à l’Assemblée nationale) de la transition énergétique pris sous l’impulsion de Ségolène Royal est en fait celui du capitalisme vert. L’écologie ne sera pas punitive mais juste un élément de marketing supplémentaire au service du gouvernement et des entreprises. La voiture électrique dont la fabrication et l’entretien sont particulièrement polluants ( lire ici ) en est le symbole le plus spectaculaire.
Que penser d’un ministre de l’économie qui propose pour relancer l’activité économique de créer de nouvelles lignes d’autocar à travers le pays, en expliquant de surcroît que cette réforme pourrait « bénéficier aux pauvres qui voyageront plus facilement » ? Eh oui, « le train est trop cher » ! donc, plutôt que d’investir à bon escient (et non dans les lignes TGV ) ou de pratiquer une politique tarifaire adaptée afin de le rendre accessible aux plus démunis, Emmanuel Macron propose de mettre de l’argent public dans le transport routier et de fragiliser ainsi encore davantage le rail.
Si, pour Emmanuel Macron ou Ségolène Royal, le projet le plus abouti d’une société consiste à favoriser le déplacement des populations défavorisées en automobiles durant le week-end, pourquoi ne pas anticiper franchement les conséquences du réchauffement climatique en faisant fondre la mer de glace au chalumeau afin d’engager dans la foulée les aménagements autoroutiers qui mettront le sommet du Mont blanc et l’air pur des cimes à portée d’autoroute ? Des milliers d’emplois seraient au rendez-vous avec en prime la haute montagne accessible à tous en voiture ou en autocar.
Face à la crise écologique et sociale, toute la politique de ce gouvernement consiste à accompagner voire à amplifier les effets désastreux des politiques néolibérales. Alors qu’il conviendrait de s’engager vers une économie économe, coopérative, et de partage, l’économie dispendieuse de compétition et de croissance, formidablement énergivore, demeure la référence unique de nos édiles socialistes. Dans un univers concurrentiel marqué par la recherche effrénée du profit, la seule perspective est pourtant l’augmentation inéluctable des travailleurs pauvres dans un environnement dévasté.
En 2013, Emmanuel Macron déclarait à Médiapart : « L’idéologie de gauche classique ne permet pas de penser le réel tel qu’il est. Il nous manque des outils ». Pourquoi pas, mais, pour penser le réel tel qu’il est et trouver les bons outils, peut-on faire confiance à Emmanuel Macron et à tous ses collègues socialistes ?