Une commission d’enquête de l’Assemblée nationale « visant à établir les freins à la réindustrialisation de la France » planche depuis le 18 février dernier.
Il y a quelque jours, appelé à formuler un avis devant cette commission, le directeur général de Safran, Olivier Andriès, avait notamment indiqué que pour lui, « il n’est plus question d’investir en France dans une ville détenue par des écologistes. Ce n’est plus possible. Si c’est pour se faire accueillir, dans une région où l’on crée 500 emplois, par des tomates, ce n’est pas la peine, je ne le ferai pas ». L’ire du patron d’un des grands groupes français spécialisés dans les domaines de l’aéronautique, de l’espace et de la défense serait due aux critiques émises par les élus écologistes de la mairie de Rennes lors de l’annonce du projet d’implantation d’une unité de production d’éléments de turbines d’avions (destinés notamment aux avions Rafale) sur un terrain racheté à Stellantis par Rennes métropole et « fléché sur des activités liées à la transition écologique (mobilité décarbonée et construction durable) ».
Les propos d’Olivier Andriès sont symptomatiques du sentiment de toute puissance et de l’arrogance qui caractérisent la plupart des dirigeants industriels français. A force de bénéficier depuis maintes années de toute la sollicitude et de la bienveillance coupable du pouvoir politique, ils se considèrent désormais en terrain conquis. Tout leur est dû et même ce qui est aberrant et inadmissible. Leur quête effrénée de croissance et de profits ne doit rencontrer aucun obstacle et certainement pas des freins liés au respect de normes environnementales. Pour quelles raisons la construction de moteurs d’avion et l’aéronautique de défense ne seraient-elles pas partie prenante de la transition écologique ? Dominique de Villepin n’a-t-il pas déclaré récemment au micro de France inter : « Quand on parle de risque de guerre et d’efforts à faire c’est aussi quelque chose qui va bénéficier à tous les européens, à l’économie européenne Tout cela bénéficie y compris à la transition climatique. Dès lors que vous développez une industrie par définition, il faut qu’elle soit la plus décarbonée possible »
Nous vivons décidément une époque marquée par un totalitarisme industriel et croissantiste qui détourne le sens des mots et impose sa logique du mensonge et de déni de la réalité.
Pour tous ces illuminés, sortis le plus souvent de grandes écoles censées célébrer la rationalité et le langage de la raison, l’accumulation d’engins de mort et toutes les destructions que leur fabrication et leur utilisation engendrent représentent de la création de richesses, la mort devient préférable à la vie.
Le pape François vient de mourir. Lors d’une de ses audiences, en 2022, il avait déclaré : « la guerre est une folie. Et ceux qui s’enrichissent avec la guerre et le commerce des armes sont des criminels qui tuent l'humanité »
Il me semble que la commission d’enquête de l’Assemblée nationale chargée d’établir les freins à la réindustrialisation de la France pourrait s’abstenir de recevoir les avis de « criminels qui tuent l’humanité ».