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Billet de blog 30 mai 2014

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Un préalable pour endiguer la montée du FN

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Depuis dimanche dernier, les appels à manifester contre le Front National se multiplient. La France se réveille avec un teint brunâtre, et elle prend peur, un peu comme un malade qui reçoit les résultats de son bilan de santé après avoir longtemps refusé de prêter attention aux premiers symptômes. Les esprits s’échauffent, imaginent le pire, refusent d’abdiquer devant une forme de dégénérescence qui menace l’ensemble de la société. Mais, sauf à remettre en cause le processus électoral lui-même et à réclamer de nouveau l’interdiction d’un parti nationaliste, ouvertement xénophobe et extrémiste, il ne sert à rien de contester dans la rue le verdict des urnes. Les manifestations contre le FN constituent certes un défouloir, un moyen d’évacuer sa colère et de calmer son amertume, une nouvelle occasion de dénoncer les idées, les valeurs véhiculées par ce mouvement mais elles n’ont aucune chance de convaincre les  électeurs du Front de changer de camp. L’électorat du Front National n’est pas un électorat d’adhésion mais avant tout un électorat de rejet des partis installés. Manifester contre le Front National sert la stratégie de Marine Le Pen qui entend être la représentante des exclus et de tous ceux qui pâtissent d’un système construit et défendu par les pouvoirs en place. Manifester contre le Front National renforce la posture victimaire d’un parti qui joue de la réprobation et de la stigmatisation dont il fait l’objet. Manifester contre le Front National, juste après les résultats, c’est s’exposer à recevoir de ce mouvement - qui se déclare respectueux des institutions et des échéances électorales - des leçons de démocratie et de tolérance, un comble ! Manifester contre le Front National est contre-productif.

Le  Front est rejeté par l’ensemble de la classe politique, le rejet de la politique profite au Front National.

« Quand le vin est tiré, il faut le boire » . . . le Front National est installé dans le paysage politique, il faut désormais enrayer sa progression, qui n’est pas une fatalité, en s’attaquant aux racines du mal.  L’extrême droite n’est pas née de la dernière pluie : les scandales à répétition, la perte de crédibilité  de la parole des élus, les engagements démagogiques et irresponsables de nos dirigeants,  la personnalisation de la vie publique, la concentration des pouvoirs et la présidentialisation extrême d’un régime qui infantilise la classe politique et les citoyens  ont alimenté ses eaux et creusé son lit.  La Vème république initiée par De Gaulle, renforcée par Jospin, est dans un état de délabrement spectaculaire mais les tenants d’une VIème République peinent toujours à faire entendre et reconnaître leurs arguments. Les partis dominants avec la complicité des médias tirent en effet grand profit de la bipolarisation induite par notre système. Ceux qui alternent au pouvoir depuis l’instauration de la Vème République n’hésitent pas à se nourrir du rejet que suscite le Front pour se présenter comme les seuls remparts crédibles ; cette logique binaire, qui est déjà à l’oeuvre en vue de la prochaine présidentielle, fait du FN l’allié objectif de l’UMP et du PS. Depuis des années, les partis dominants et les médias dénigrent « l’extrême gauche » et contribuent à marginaliser les analyses de tous ceux qui veulent un changement radical de politique  tout en alimentant insidieusement les thèses de l’extrême droite par un traitement de l’actualité qui place au premier plan et juxtapose des sujets comme l’insécurité, l’immigration, le chômage, etc . .  

 Il faut  impérativement casser cette logique infernale qui nous enferme dans un éternel recommencement. Désormais la coupe est pleine, notre capacité à supporter des monarques pitoyables en République atteint ses limites  et toutes les forces qui réclament une véritable alternance doivent  unir leurs efforts pour réclamer une nouvelle constitution qui permettrait enfin un réel engagement citoyen (qu’il conviendrait d’encourager et de nourrir),  une séparation des pouvoirs et un véritable contrôle démocratique.  C’est le préalable indispensable au changement et au reflux du FN.

Pour cela,  allons plutôt manifester devant nos palais nationaux et devant les symboles de cette Vème République corrompue.

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