Jean-Luc GASNIER (avatar)

Jean-Luc GASNIER

Inactif en activité, membre d'ATTAC33, de nationalité française mais terrien avant tout

Abonné·e de Mediapart

633 Billets

3 Éditions

Billet de blog 30 juillet 2018

Jean-Luc GASNIER (avatar)

Jean-Luc GASNIER

Inactif en activité, membre d'ATTAC33, de nationalité française mais terrien avant tout

Abonné·e de Mediapart

Il n’y a pas d’affaire Benalla

Il n’y a pas d’affaire Benalla car Alexandre Benalla se fond parfaitement dans le tableau d’ensemble de la meute macronienne. N’est-il pas vain et futile d’exiger d’une bande de brigands que leurs rôles et missions soient clairement définis et respectés ?

Jean-Luc GASNIER (avatar)

Jean-Luc GASNIER

Inactif en activité, membre d'ATTAC33, de nationalité française mais terrien avant tout

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La motion de censure déposée par les groupes parlementaires de l’opposition dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler « l’affaire Benalla » ne sera pas votée et c’est  bien dans l’ordre des choses. En Macronie et sous la Vème république, il ne peut pas y avoir d’affaire Benalla.

Après les différentes interviews accordées ces derniers jours par Monsieur Benalla, il apparaît d’ailleurs évident que toute cette affaire repose sur un malentendu et relève de la polémique.  Alexandre Benalla, un beau monsieur calme et posé, dans des habits de gentleman correspondant à son statut,  a fourni  des explications claires et convaincantes.

Le premier mai fut une journée bien particulière.  La république était probablement en danger, menacée par des hordes de manifestants rebelles. Monsieur Alexandre Benalla, citoyen modèle, était là, au cœur des affrontements. Comment pouvait-il se résoudre à rester passif en de telles circonstances ?  Comment pouvait-il ne pas faire face ? Comment pouvait-il, lui, le chargé de mission élyséen , le Monsieur sécurité, ne pas prêter main forte – et expérimentée – à des agents harcelés et débordés ? Comment peut-on reprocher à Alexandre Benalla d’avoir porté, ce jour-là,  secours aux  CRS  en maîtrisant fermement, avec certes un peu de vigueur,  un homme et une femme dont le comportement était particulièrement dangereux ?

Comment Monsieur Benalla pourrait-il comprendre  et admettre que, dans une société où toute forme de résistance à l’ordre établi et au modèle économique dominant,  est depuis des années sévèrement  réprimée par les forces de l’ordre, il ne puisse pas  donner un coup de main à des camarades en difficulté et contribuer à mâter des exaltés ? Comment rester simple observateur quand le régime qu’il chérit est attaqué ?

Comment la société et la représentation nationale pourraient-elles lui reprocher des gestes de défense un peu appuyés quand depuis de nombreuses années la gendarmerie et la police tabasse, éborgne et même tue en toute impunité ?

Comment reconnaître une affaire Benalla quand la justice délivre  un non-lieu dans le drame  de Sivens, quand l’instruction pour élucider les causes du décès d’ Adama Traore  dans un fourgon de la gendarmerie tourne à la farce morbide , comment pointer du doigt ce petit fait divers dans une manifestation avec tous ces éborgnés, tous ces mutilés, tous ces traumatisés, avec toute cette répression aveugle ?

Il n’y a pas d’affaire Benalla car Alexandre Benalla se fond parfaitement dans le tableau d’ensemble de la meute macronienne.  N’est-il pas vain et futile d’exiger d’une bande de brigands que leurs rôles et missions soient clairement définis et respectés ?

Alexandre  Benalla œuvre dans un système qui s’assure de la passivité des citoyens par une prophylaxie sécuritaire en leur faisant prendre conscience, jusque dans leurs chairs, de la disproportion des rapports de force. Il fait partie de cette violence systémique qui nous entoure, nous submerge et nous neutralise progressivement.

Dans son ouvrage intitulé « les Ennemis de la terre » qui pourrait être dédié aux amis de Macron, Armand Farrachi nous rappelle que « toute société oppressive rêve que l’individu porte encore le poids des chaînes et la marque du fer quand les traces matérielles en auront disparu, qu’il forge lui-même les barreaux de sa cage et règle sa conduite sur le désir du maître, comme ses chevaux  qu’on habitue à tenir le front bas en les enfermant face à une pointe où ils se piquent dès qu’ils relèvent le cou, de sorte que toute leur vie ils emportent ace eux, même au grand air, la menace de la pointe invisible enfoncée plus vivement encore dans leur mémoire que dans leur chair »

Face à la brutalité du régime et à la violence de l’Etat, sous une Vème République décidément monstrueuse,  aucune forme de violence n’est tolérée. La contestation ne dispose plus pour se faire entendre que des marches pacifiques ou des journées de grève perlées, autant de petits grains de sables qui sont aussitôt aplatis par le bulldozer du pouvoir élyséen.

 A force de coups de matraques, de stratégies syndicales sclérosées et épuisantes, d’indignations éphémères et émiettées, la résistance  menace de s’épuiser.

Pendant ce temps la catastrophe écologique, sociale et économique approche à grand pas. La résignation ne doit pas s’installer.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.