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Billet de blog 19 décembre 2017

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La voiture électrique à batteries et le syndrome fluocompacte

De nos jours, la voiture électrique à batteries est à la voiture électrique à hydrogène, ce que la lampe fluocompacte fut à la lampe LED: une mauvaise solution intermédiaire.

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Il y a une dizaine d'années, pour remplacer les vieilles ampouls à incandescence, on trouvait surtout sur le marché des ampoules fluocompactes.

Peu de gens connaissaient les LEDs qu'on trouvait seulement sur quelques sites internet spécialisés. C'était le temps des pionniers.

Aujourd'hui, les fluocompactes sont interdites, car elles contiennent du mercure. Les LEDs triomphent partout. Non seulement les LEDs ne contiennent pas de mercure, mais elles ont bien d'autres avantages:  elles consomment encore nettement moins, elles durent plus longtemps, elles ont un spectre de couleurs infinies. Enfin, elles sont vraiment compactes et infiniment adaptables au plan esthétique.

Pour autant, au plan commercial, le détour était tout bénéfice: au lieu de vendre tout de suite du LED, les producteurs d'ampoules ont d'abord vendus du fluocompacte comme une première innovation, puis du LED comme un seconde innovation, sans se soucier des quantités de mercure libérées dans l'environnement par la première innovation, l'innovation intermédiaire.

Ainsi en sera-t-il des voitures électriques.

Illustration 1
Tesla=fluocompactes vs. Mirai=LEDs © Montage par Jean-Lucien Hardy, Mediapart (photo LEDs par Jared Tarbell sous licence Creative Commons)

Aujourd'hui, les gens connaissent les voitures électriques à batteries, et relativement peu de gens connaissent les voitures électriques à hydrogène. L'histoire se répète: les voitures à batteries suivent le modèle fluocompacte et les voitures à hydrogène suivent le modèle LED.

Les voitures électriques sont un progrès par rapport aux voitures à énergie fossile, mais il vaudrait beaucoup mieux investir directement dans les voitures à hydrogène, plutôt que de faire le détour par les voiture à batteries.

Les vendeurs de voitures électriques à batteries ne se soucient guère des multiples inconvénients de ces batteries. Ils occultent ou minimisent ces inconvénients pour leurs clients :

- des inconvénients pratiques: manque d'autonomie, temps de chargement, multiplication des aires de stationnement pour les recharges.

- des inconvénients de performance: il faut gaspiller de l'énergie pour transporter une batterie dont le poids est le tiers du poids du véhicule.

- des inconvénients environnementaux en amont: l'extraction du lithium est un désastre écologique, source d'inégalité.

- des inconvénients environnementaux en aval: les déchets contenant du lithium s'accumulent.

- des inconvénients liés à la prolongation du nucléaire.

Sur ce dernier point, il est permis de penser que la voiture électrique à batteries fait l'affaire du lobby nucléaire. Les besoins en électricité pour recharger instantanément des milliers de voitures électriques seront gigantesques et pourraient retarder l'arrêt du nucléaire.

L'hydrogène ne présente pas ces inconvénients, car l'hydrogène est stocké et n'affecte pas la capacité instantanée du réseau électrique.

En attendant que les énergies nouvelles se généralisent, les voitures électriques à batteries vont prolonger le besoin nucléaire, alors que les voitures à hydrogène pourront utiliser le moyen de production classique de l'hydrogène à partir de gaz naturel. Le bilan financier sera catastrophique pour les voitures à batteries qui induiront des milliards d'investissement pour prolonger les centrales nucléaires, puis pour retraiter des déchets supplémentaires dont il faudra se préoccuper pendant des milliers d'années après nous.

Par contre, le bilan sera neutre pour l'hydrogène, sachant que la production d'essence et de diesel nécessite déjà des quantités phénoménales d'hydrogène pour "nettoyer" le pétrole. Ainsi, il paraît que Total est une des plus gros producteurs d'hydrogène, essentiellement pour satisfaire ses besoins de "nettoyage" du pétrole. La diminution du besoin en hydrogène pour raffiner le pétrole sera compensée par le besoin en hydrogène utilisé directement pour les piles à combustibles des véhicules.

En imaginant que les véhicules électriques se généralisent, ils ne pourront pas être rechargées instantanément par des énergies renouvelables qui sont pour une bonne part intermittentes. Il faudra donc utiliser des moyens pour stocker l'énergie excédentaire par rapport à la demande du réseau. L'hydrogène convient très bien pour stocker l'énergie. Il convient même pour le stockage saisonnier. L'hydrogène peut être stocké en été quand la production photovoltaïque est optimale pour être consommé en hiver quand cette production est nettement plus faible au nord de l'Europe. On pourrait même en arriver à stocker de l'hydrogène pour recharger des véhicules à batteries grâce à des générateurs équipés de piles à hydrogène. Mais une telle solution serait absurde. Mieux vaut miser dès maintenant sur les véhicules électriques équipés de piles à hydrogène.

J'écris "véhicule", car le raisonnement tient pour les voitures, comme pour les bus ou les camions.

Les véhicules électriques à batteries relèvent d'un modèle économique transitoire qui va permettre à des sociétés comme Tesla d'engranger des bénéfices, jusqu'à ce que les problèmes pratiques et la saturation du réseau électrique démontrent l'absurdité du modèle des voitures à batteries, ... à ceux qui ont besoin de cette démonstration. Je reviendrai au cas Tesla dans un prochain article.

Je fais partie des gens qui étaient contre le nucléaire bien avant Fukushima (2011), avant Tchernobyl (1986) et même avant Three Mile Island (1979). L'histoire nous donne raison. Il en sera de même pour les véhicules électriques à batteries qui restent complices d'un nucléaire en voie de disparition.

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