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Billet de blog 3 déc. 2013

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L'art de transformer, les transformations de l'art

Jean-Marc ADOLPHE
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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

En toute transparence. Je viens de déposer un projet de candidature pour la direction de résidences d'artistes du dispositif "Public Art Experience", un projet d'art public à Belval (Luxembourg)

L’art de transformer,

les transformations de l’art

projet de candidature pour la direction de résidence d’artistes du dispositif « Public Art Experience », un projet d’art public à Belval.

Jean-Marc Adolphe

lundi 2 décembre 2013

« Les moules sont d'une texture nouvelle, je vous avertis,

ils ont été coulés demain matin.

Si vous n'avez pas dès ce jour la conscience relative de votre durée,

 il est inutile de vous transmettre, il est inutile de regarder devant vous car devant c'est derrière, la nuit c'est le jour. Mais... »

Léo Ferré, La solitude

« Nous voilà tenus de regarder tous les ordres de l'existence effective comme autant d'arts – choisis en pleine conscience de l'« impossible » de leur pari. Connaître la socialité comme un art ; [la politique comme un art ; la production et les échanges comme un art] ; le sens comme un art ; [le regard comme un art ; l' « humain » comme un art] – reconnaître ce seul infini comme ce seul absolu : la relativité connue réelle de tout réel.

(…)

Qu'est-ce qu'un « art » ? Le pari pris d'une possibilité nouvelle du visible, de l'audible, du lisible, du vivable – choisie pour l' « impossible » même qu'elle ose, et qu'on aura, par après, le cran de risquer, avec ce qu'il faut de légèreté instruite, à l'encontre des fatalités du zoologique et du grégaire.

 (…)

 Qui est vivant ?

Bataille avec Pascal. L'affirmation du débord hors tout sens du grand flux avec la position d'un point d'impossible choisi, depuis lequel faire face, lutter avec lui – les deux côtés ensemble, sauf à surenchérir indéfiniment sur la perte, ou à se crisper sur des idéalités tôt ou tard connues des leurres.

Pascal avec Bataille : la tension révélante maximale, productive, vivante : le conflit du tenable, maintenu comme un impossible - « en avant », « et tirant ».

La question moderne la plus brûlante : à quelles conditions nous serait-il possible de conquérir – par 'décrochement », « bond », « saut » - le saltus de Dante – ce point d' « impossible » à poser comme l'objectivité la plus nécessaire pour une possibilité vivante de la vie, une autre fois ?

 (…)

 Ce point d' « impossible », connu comme « impossible », pour cela désiré avec feu ; cette position d'un point d'appui choisi, nous les regardons les vérités les plus solides, les moins compromises, les plus dignes de confiance à l'encontre des abandons qui submergent ce présent de tant de parts.

 (…)

 Qui est vivant ? - Celui qui donne une chance à la vie, une autre fois. »

 Jean Paul Michel, « Pascal avec Bataille ». Réponse à la question : « Qui est vivant ? », in Ecrits sur la poésie, 1981 – 2012, Flammarion, Paris, 2013

action – altérité – accomplissement – apprentissage – biologies – bruissements – citoyenneté –  combinatoires – compétences – communication – connaissance – convictions – créativité – complicités – découvertes – démocratie – défis – développements – dissémination – documentation – écologie – économie – esprit d’entreprise – expériences – expérimentation – fête – formation – futurs – gai –  savoir hospitalité – identités – imaginaires – inclusion – indisciplinarité – innovation – intertextualités – invention – investigation – jardin – kibboutz – laboratoire – langages – médiations – mémoires – mobilités – mouvement –  nécessité –obstination – partage – participation – pensée – proximités – qualités – résidences – rêves – rhizomes – société – substances – technologies – ubiquité – valeurs – visions – vocations – voisinages – watts – xénos – yin yang – zapateado.

Jean-Marc Adolphe.

Né en 1958 à Saint-Aignan (Loir-et-Cher)

 Première performance publique à 12 ans au Collège d’enseignement secondaire de Selles-sur-Cher.

Au lycée (Jean Giraudoux, Châteauroux), déjà, préside le Foyer Socio-Educatif. Il y crée un journal lycéen et un club théâtre.

 Etudie le journalisme à l’Institut Universitaire de Technologie de Tours.Parallèlement à ses études, est cofondateur d’un syndicat national étudiant autogestionnaire (le Mouvement d’Action Syndicale). Est également l’un des principaux animateurs-correspondants des Studios, complexe associatif de cinémas d’art et d’essai.

Débutant sa carrière de journaliste à Montpellier en 1980, participe au lancement de la première radio libre locale, L’Echo des Garrigues. Parallèlement à son activité de journaliste free-lance (Agence d’Informations Culturelles, France Culture, Pour la Danse, Ballett International, Publico, etc.), participe à la création d’un café-concert, où il organise des concerts (premier concert en France de Björk avec son premier groupe, Kukl), des spectacles de théâtre et des festivals (Nuits de Barcelone). Avec le soutien de l’association Peuple et Culture, il crée un magazine culturel régional mensuel, Strapontin (« le journal qui s’ouvre en grinçant »). Ses prises de position critiques lui valent quelques mois plus tard une « interdiction professionnelle » totale de Georges Frêche, alors maire de Montpellier.

Se tourne alors vers Paris (1985), où il poursuit une double activité de journaliste et de conseiller artistique. Devient pigiste à L’Humanité, critique de danse, tout en collaborant à de nombreux médias (Les Lettres françaises, Le Point, Le Courrier de l’Unesco, etc.). Reprend la direction artistique de l’Espace Kiron,où il met en place une programmation exigeante en théâtre (textes de Maurice Blanchot, EdmondJabès, James Joyce, etc.) et en danse (premier spectacle en France de Saburo Teshigawara, etc.). AvecNicole Gautier, en 1991, il fait partie de la petite équipe qui reprend la direction du Théâtre de la Citéinternationale, en totale déshérence. Chargé de la communication et des relations avec les publics,il inscrit très vite le Théâtre de la Cité internationale parmi les lieux qui comptent dans le paysagethéâtral parisien : la fidélisation des publics en est le fer de lance, avec les opérations « Public, cherpublic » puis « L’art d’être spectateur ».

Simultanément, de 1985 à 1992, il est conseiller artistique pour plusieurs festivals, dont le Festival Danse à Aix (1987-1988) et le Festival Internacional de Teatro de Granada en Espagne (1988-1991).

 Parallèlement à la création de Mouvement en 1993, il est engagé en 1994 comme conseiller artistique pour la danse au Théâtre de la Bastille, dont il renouvelle les publics avec une programmation audacieuse basée sur la découverte de nouveaux talents : Alain Platel, Meg Stuart, João Fiadeiro, Jérôme Bel, Boris Charmatz, Caterina Sagna, Rachid Ouramdane, Raimund Hoghe, Akram Khan, PARTS@Paris - festival de cinq semaines consacré à l’école PARTS d’Anne Teresa De Keersmaeker. A partir de 2002, tout en se consacrant principalement à la direction de Mouvement, il a encore été conseiller artistique de l’Espace des Arts, scène nationale de Chalon-sur-Saône (de 2002 à 2009), où il a mis en place une programmation danse, créé le festival Instances, et instauré de nombreux dispositifs de médiation avec les publics.

 Est enfin le fondateur et directeur artistique du SKITE, laboratoire de recherche de nouvelles formes de création, dont cinq éditions ont eu lieu à ce jour : Paris / Théâtre de la Cité Internationale (1992), Lisbonne Capitale culturelle européenne de la culture (1994), Performing Arts Forum / Saint-Erme-Outre-et-Ramecourt (2007), Porto (2008), Caen-New-York (2010), dans des projets réunissant pendant un mois de 45 à 120 jeunes artistes.

Public Art Expérience

.

Les mots « public » et « art » semblent connus, même si la façon dont ils sont entendus peut être source de nombreux malentendus. Et leur croisement (public et art) est déjà source d'autant de conflits irrésolus que de joyeuses fécondations. Le mot « expérience », lui, est inconnu. Ou plus exactement, si l'on croit connaître le mot, ce qu'il désigne reste encore à connaître.

« Rien n'existe vraiment tant que nous n'en ayons fait l'expérience », écrit Bernard Noël. Nous savons certes, depuis Aristote, que « c'est par l'expérience que progressent la science et l'art ». Mais Confucius nous appelle à plus de modestie : « L'expérience est une lanterne accrochée dans le dos qui n'éclaire que le chemin parcouru ».

 C'est donc à tâtons, sans autres lumières que celles des chemins déjà parcourus, qu'il faudra débroussailler les chemins de l'à venir, expérience faisant, pour elle-même, et pour les alliages neufs qui sauront fondre (sans les confondre) l'art et le public dans une communauté de destins.

A la lanterne : nul projet n'est indemne du passé d'où il éclôt. Nul projet véritable ne peut s'enraciner hors-sol (ou alors, sans racines, se condamne à dépérir).

 Belval. Nom qui chante. Chant de la forêt initiale, primitive. « Escher-Bësch ».

Chant plaintif des arbres déracinés, de la terre retournée, piétinée, recouverte par l'industrie des hommes. Chant bruyant des machines, des fours, des matières en fusion. Chant sourd du labeur des hommes, partant en fumée dans les fourneaux mais aussi bien inscrit dans toutes les formes de l'acier. Belval, quel que soit le visage qui l'attend aujourd'hui, garde la mémoire de tous ces chants enfouis, souterrains, à fleur de peau.

Architecture du devenir qui se souvient de son passé : les deux derniers Hauts Fourneaux, maintenus et éclairés comme des vigies, sont à la fois les témoins d'une époque et les emblèmes du nouveau Belval. En leur verticalité même.

 Friche industrielle, incluse dans toute la chaîne des friches culturellement reconverties.

Conversion : action de se tourner vers. Autrefois Dieu, aujourd'hui, quoi ?

Se convertir : passer d'une croyance à une autre.

Friche reconvertie en lieu de savoir et de culture : passer d'une croyance industrielle laminée à une croyance nouvelle, la société de la connaissance ?

Site en reconversion : la transformation vers un nouvel horizon de croyance. Mais aussi l'adaptation, ici et maintenant, aux « conditions nouvelles de l'économie ». Quelle peut être l'économie du savoir, l'économie de la culture, l'économie de l'expérience ? Ce sont tous ces champs qu'il faut fertiliser de semences nouvelles, encore à inventer.

Sur ce terrain à cultiver, Belval fait aujourd'hui campement, et mieux même, campus.

Qu'au cœur même de l'ancienne usine de Belval, sur la Terrasse des Hauts Fourneaux, s'implante désormais une Cité des Sciences, et qu'au sein de cette Cité des Sciences, en leurs humanités mêmes, place soit faite aux arts, dans toutes leurs composantes, est gage de fertilité retrouvée, forestière. Considérer non seulement les arts en tant que tels, dans leurs technicités respectives, mais aussi comme forces d'alliages, dans leurs alchimies respectives.

L'art comme branche de la sidérurgie (du grec siderurgos, « forgeron ») : forger de nouveaux concepts, de nouvelles pratiques. Les arts se transforment entre eux, dans l'altérité échangée, au contact poreux de la société (et non plus dans la bulle close de « l'art pour l'Art »), et pareillement, la société peut se transformer au contact des arts (et non plus dans le seul « accès aux grandes œuvres de l'humanité »).

21e siècle

. Tout au long du 20e siècle, les avant-gardes historiques et artistiques (du futurisme italien au Pop art, du Bauhaus à l'Ecole de Vienne, du Dadaïsme à l'Internationale situationniste, de l'Expressionnisme à Fluxus, du Suprématisme à la Banalyse, du Lettrisme au Nouveau Roman, de De Stijl à Gutaï, du Constructivisme à la Nouvelle Vague cinématographique, etc.) ont  « atteint une pureté et réussit une délimitation radicale de leur champ d'activité sans exemple dans l'histoire de la culture. Les arts sont à présent en sécurité, chacun à l'intérieur de ses frontières légitimes, et le libre-échange a été remplacé par l'autarcie » (Clément Greenberg, Towards a Newer Laocoon, 1940).

 Ces dernières années, des formes transversales, hybrides, « indisciplinaires » sont venues bouleverser le champ d'action des différentes matières artistiques. Cependant, au-delà de ces mutations esthétiques, la mission de l'artiste reste, comme le disait le peintre Mark Rothko, de « réparer le monde ». Mais les outils de la réparation ont aussi mué. En ce début de 21e siècle, il importe de passer de la transformation des arts à « l'art de transformer ». Plusieurs mouvements, courants, tendances, à l'œuvre dans la création contemporaine, ont ouvert cet espace des possibles : « art contextuel » (Paul Ardenne), notion d'art « à l'état gazeux » (Yves Michaud), « esthétique relationnelle » (Nicolas Bourriaud), design de proximité (Ruedi Baur), arts in situ et de l'espace public, etc., inventent des démarches qui se situent délibérément hors des marchés constitués de l'art.

 Pour sortir de la « misère symbolique » (Bernard Stiegler), reste alors à vraiment opérer ce que le philosophe Jacques Rancière nomme le « partage du sensible ». Des programmes de formation, des initiatives d'artistes, des cadres publics ou associatifs (nouveaux commanditaires de la Fondation de France, projet SKITE, Quartiers Créatifs dans le cadre de Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture, etc.), contribuent déjà à changer de paradigmes et à déplacer la signification de l'art dans nos sociétés.

Le dispositif « Public Art Experience », projet d'art public à Belval, fournit un terrain de jeu idéal pour expérimenter de nouveaux prolongements à ces sillons déjà tracés, mais aussi, et au-delà, dans une logique d'ensemencement et de fertilisation, pour affilier, fédérer, relier des initiatives existant localement en tous points de la planète (Glocal). Il s'agira donc, à l'enseigne de la « transformation », de réaliser la pleine inscription des projets de résidence dans un contexte donné (et lui-même évolutif), mais aussi bien de le déborder, dans l'espace et dans le temps. Cette mise en œuvre sera rendue possible par une politique des relations multiples où seront explorées toutes les voies imaginables des inter-dits et des inter-faire (inter-générationnel, inter-national, inter-sectoriel, inter-culturel). Et donc, à partir de l'encrage-Belval, savoir « se marier à l'infini » (Manoel de Oliveira).

Répondre au défi que pose devant nous le 21e siècle

exige la mise sur orbite d'un réseau neuronal. Le projet qui me porte à la candidature pour la direction des résidences d'artistes Public Art Experience saura faire corps conducteurs de multiples connexions mises en éveil :

  • Avec la pluralité des ressources présentes sur le campus de l'Université du Luxembourg.
  • Avec le territoire local et régional (transfrontalier)
  • Au plus lointain (poussée des seuils)
  • Dans le temps (la mémoire de la forêt – les Hauts Fourneaux comme statues d'arbres-, la prospective de l'inconnu).

 En dehors du thème donné pour la première résidence (« transformation »), il n'y aura pas de sujet spécifique. La spécificité du sujet, c'est le sujet lui-même. En ce sens, le cahier des charges soumis à la prochaine direction des résidences sera le premier objet de la transformation : simultanément, le respecter au pied de la lettre, rigoureusement ; et rendre ses frontières fluides, poreuses, plastiques (en élargir le cadre). Ce travail sera mené en étroite concertation avec les responsables du Fonds Belval et le Conseil Artistique de la première résidence. Je m'adjoindrai les conseils extérieurs de personnalités qualifiées « réunies » en un collège informel : l'architecte Patrick Bouchain ; Danielle Igniti, responsable du service culturel de Dudelange  ; l'anthropologue et philosophe Bruno Latour ; Raymond Weber, président d'ONG ; Jean-Pierre Mongarny, banquier solidaire (Secrétaire Général de la Fondation Crédit Coopératif) ; Jean-Pierre Burdin, syndicaliste ; Jean-Marc Goy, Counsel for International Affairs de la Commission de Surveillance du Secteur Financier (CSSF); le designer Ruedi Baur ; la philosophe Marie-José Mondzain ; la dramaturge Bojana Cvejíc ; la critique et curatrice Joanna Warsza, la directrice de la Cité des Utopies Véronique Barcelo ; l'anthropologue Tim Ingold ; et le plasticien Michel François.

En application exigeante, pleine et entière, du « pacte culturel », élaboré par le Forum Culture(s) signé par tous les partis politiques luxembourgeois le 6 décembre 2008, et en accord avec les principes fondateurs de l’Agenda 21 pour la Culture, il s'agira en outre que cette première résidence pose, dans l'économie d'un devenir, les jalons et les bases du développement ultérieur du dispositif Public Art Experience tel qu'il pourra être successivement transmis aux prochaines directions.

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 « L'évolution est événementielle.

C'est l'événement qui fait l'évolution

et l'événement – en l'occurrence la circonstance –

fait la transformation. »

(Yves Coppens)

Quel scénario pour la résidence ?

Préparer le terrain, étayer, créer le désir. La première mission de la direction des résidences du dispositif Public Art Experience, projet d'art public à Belval sera de labourer le champ de Belval et les champs voisins, d'y deviner quelles travées, d'y chercher quelles lignes, d'y dénicher quelles pépites, pour co-élaborer le cadre d'hospitalité des résidences d'artistes à venir. Il faudra donc œuvrer à la rencontre, aller au-devant des désirs même latents, faire accueil aux souhaits qui s'exprimeront, tisser les mailles qui constitueront l'étoffe du projet. Plus trivialement, bâtir des partenariats, multiples et divers, en archipels (citoyens et associations ; Cité des Sciences ; collectivités territoriales ; partenaires culturels au Luxembourg et en Lorraine, puis en Europe et dans le monde entier ; lieux de vie, d’éducation, de santé ; entreprises et mécènes ; etc). L'une des conditions essentielles du déploiement plein et entier du dispositif Public Art Experience sera de faire intelligence collective autour des enjeux qui en profilent la voie.

Dans le cadre de la coopération transfrontalière et dans celui de la coopération décentralisée entre la France et le Luxembourg, l'Agence culturelle luxembourgeoise, le Conseil Régional de Lorraine et la Direction de la Recherche à la Direction générale à la création artistique du ministère de la Culture en France (Bruno Tackels), seront sollicités pour fédérer autour de la « Transformation » et des projets de résidences d'artistes, une constellation d'intérêts afin de porter, depuis Belval, l'innovation au cœur du projet sensible européen.

Les ressources du site Belval. La multiplicité des ressources présentes sur le site de Belval et notamment dans l'étoilement de la Cité des Sciences seront autant de passerelles à emprunter pour connecter l'activité journalière du site à la fulgurance dilatée des résidences d'artistes.

Assez de rond-points où la circulation ne fait que circuler, tournant ainsi en rond !  « Il n'y a que deux lignes dans le monde », dit Robert Wilson. « Le temps est la ligne qui va au plus profond de la Terre au Paradis, tandis que l'espace est une ligne horizontale. Cette traversée du temps et de l'espace est la base de toute forme d'architecture. » Posées sur deux socles, la grande barre et la tour de la Maison du Savoir manifestent cette dynamique conjointe (transmission horizontale du savoir, élancement vertical de l'institution) auxquelles les résidences d’artistes devront apporter leur concours.

La Maison des Sciences Humaines sera le partenaire naturel et privilégié de tout le programme de séminaires, conférences, réunions de travail, ateliers participatifs, qui émailleront le tempo des résidences artistiques, pendant, en amont et en aval.

A vocation essentiellement publique, la Maison des Arts et des Etudiants, fenêtre ouverte sur le monde non-académique, sera l'écrin des spectacles, expositions, concerts, joutes oratoires, installations et happenings, organisés en lien avec le programme des résidences.

Le Pavillon Skipe sera le lieu d'accueil d'un salon de l'innovation transformatrice ouvert à toutes les disciplines humaines.

Avec la Maison de l'Innovation, des synergies maximales seront recherchées en termes de développement de moyens alternatifs d'information et de communication liés à la thématique de la transformation.

Enfin, d'autres partenariats, plus ponctuels, seront quêtés avec la Maison du Nombre, la Maison de l'Environnement et le Lycée Bel-Val (ateliers de pratiques artistiques conduit par les artistes invités en résidence).

Le développement de la résidence, c'est le développement de la résidence

.Offrir un volume de résidences n'est en rien « assigner à résidence ». Dans la limite des formats budgétaires et des contraintes techniques et d'intendance, les artistes (ou collectifs) résidents auront toute liberté pour inviter à leurs côtés, sur des durées élastiques, qui bon leur semblera (poètes, philosophes, écrivains publics, artistes en affinités, étudiant(e)s, travailleurs, gens de la moyenne...)

Chaque résidence sera ainsi non close sur l'univers qui pourrait confortablement l'étouffer, mais ouverte au semis, au hasard de la rencontre, aux bruissements de passage.

Dans la mesure du possible (budgétaire, technique, d'intendance), la direction des résidences aura toute latitude pour inviter au dernier moment et sans que cela fût prévu dans le cadre de l'appel à projets, tel ou tel artiste migrateur (chorégraphe syrien réfugié en Europe, cinéaste iranien interdit de tournage dans son pays, poétesse saoudienne, musicien Rom d'exception, etc.).

Chaque résidence fera l’objet d’une étude de cas préalable d’évaluation de coalition de gouvernance et de mutualisation de moyens : co-productions, mises en réseau de compétences et de ressources, banque de données et banque de dialogues avec les institutions voisines ou plus lointaines (Les Théâtres de la Ville de Luxembourg, Casino Luxembourg Forum d’Art Contemporain, Mudam, Kulturfabrik-Esch-sur-Alzette, Carré-Rotondes, Théâtre municipal d’Esch-sur-Alzette, Centre national de l’audiovisuel-Dudelange, Nord-Est Théâtre / Centre Dramatique National de Thionville et de Lorraine, Centre chorégraphique national de Lorraine, Centre Pompidou-Metz, FRAC Lorraine, Centre National de la Danse, Théâtre Nanterre-Amandiers, Palais de Tokyo, HEAD-Genève, Das Arts-Amsterdam , Hellerau-Allemagne, Performing Arts Training Research-Bruxelles, etc. Lien sera fait avec l’Université de Tous les Savoirs (Yves Michaud), le Laboratoire Arts-Sciences à Meylan (France), et Watermill Center (Etats-Unis).

En cours de résidence, chaque résidence fera l’objet d’accompagnements et de recherche d’affiliations, afin d’assurer dans le flux du vivant la plus large diffusion des œuvres, ébauches, concepts, tentatives mises à l’œuvre au sein de Public Art Experience.

Compás.

Le tempo des résidences sera rythmé/scandé par trois temps de saisons. Une Université d'été, un Conciliabule d'automne, un Parlement du printemps viendront condenser les ramifications à l'œuvre dans le champ des transformations. L'hiver sera un temps d'hibernation : rentrée des récoltes et des collectes, mise en conserve pour plus tard, confitures de bilans, humus de perspectives.

La diffusion des résidences, du local au global. A se risquer avec le plus grand consentement dans l'espace public, les résidences prendront à témoin l'opinion publique de leur élaboration, de leur temps de maturation et de la saveur de leurs fruits.

Le bouche à oreille sera la première diffusion de ce travail continu : propagation du faire-savoir par le premier des médias (recrutement d'étudiants colporteurs, passeurs d'expériences, instigateurs de curiosités). C'est cette dynamique de parole vive qui va, à moindre coût, faire naître sur le territoire des alentours la mise en éveil, l'attention portée, le désir d'en être.

Parce que tout savoir véritable doit être une fête véritable, la diffusion festive sera le vecteur d'une essentielle prise de goût. Des œuvres participatives, ayant pour objet la transformation, seront commandées à des artistes expérimentés. Exemples : le metteur en scène et plasticien Robert Wilson (Walking, marche de long en large) ; le compositeur Nicolas Frize (Fenêtres sur Fenêtres, sur le thème de la culture et du travail) ; le plasticien Olivier Grossetête (Ville éphémère, construction d'une ville en carton) ; le « sculpteur social » Stefan Shankland ; le designer urbain Olivier Nourrisson (projet Skrikodrôme) ; les Souffleurs commandos poétiques ; le chorégraphe Willy Dorner (Bodies in Spaces) ; le plasticien Jan Kopp et les artistes du réseau Suspend Spaces ; le metteur en scène Eric Lacascade et son Laboratoire d'Imaginaire Social.

L’art se répand en tous lieux

. Loin de s’enfermer dans leur sphère résidente, les résidences d’artistes auront à composer, selon des protocoles de bords-à-bords, avec des lieux d’éducation, de santé, de retraite, etc., des alentours avoisinants.

La médiation est le second maillon de la diffusion. Les échos provenant de la ruche Public Art Experience iront butiner dans tous les médias existants ou non encore inventés, des feuilles de chou locales aux réseaux sociaux, en passant par les longueurs d'onde des radios, les écrans plats des télévisions et des tablettes, les profondeurs des revues. De plus, chaque résidence devra trouver à être son propre média par l'invention in situ et imprimée d'un « Journal de Belval ». L'espace public sera lui-même le non-lieu d'interventions graphiques venant manifester par mots, images, fresques, signes, les logiques de transformation en œuvre au sein des résidences. Les graphistes Malte Martin et Pascal Colrat seront les conducteurs de ces disséminations.

En dehors de ces diffusions « matérielles », des diffusions volatiles, d'essences parfumées, seront sollicitées par toute sorte de ruses et stratagèmes : invitation de jeunes journalistes internationaux, chercheurs, étudiants, conviés à rendre compte de ce qui se passe dans le fourneau non visible des résidences de Public Art Experience.

Art public, faisant ainsi sa publicité, ban public, stimulant les multiples voies de cheminement des idées et des pratiques qui transforment l'acte même de transformer.

Global et singulier. Campus - cité unie vers Cythère, plaque tournante de toutes les odyssées planétaires qui inventent, d'île en île, des endroits, des envers et des initiatives qui manifestent en actes la transformation artistique, culturelle, sociale, sociétale, environnementale, etc., qui, ici et là, et même ailleurs, a déjà commencé à faire hospitalité aux temps nouveaux, car « ce qui doit arriver ne peut manquer. »

Quatre observatoires internationaux graviteront autour du dispositif Public Art Experience :

-          Un observatoire international des nouvelles pratiques curatoriales (sous la direction de Joanna Warsza, de Goran Sergej Pristas et d’Elsa Gregorio)

-          Un observatoire international de la création artistique (sous la responsabilité de Claude Véron)

-          Un observatoire international arts et société (sous la direction de Klaus Dilger, de Charlotte Bohl et de Rolf Aberheden)

-       Un observatoire international arts et recherche (sous la direction de Véronique Barcelo et de Marie-Esther Lacuisse).

Economie du projet / cadres budgétaires

 En totale adéquation avec chacune des lignes exposées dans ce dossier de candidature, l’économie du programme de résidence Public Art Experience, projet d’art public à Belval, sera elle-même soumise aux possibles d’un jeu de transformations. Tout en respectant les orientations et les marges de manœuvre contenues dans le cahier des charges, il s’agira d’en élargir les bords afin de rendre au dispositif Public Art Experience la plasticité qu’il mérite.

  1. 1.                  Offre de prix pour la mission du directeur de résidence

A)                 Rémunération forfaitaire

En tant que directeur de la résidence « Transformation », je m’appliquerai à moi-même un principe éthique de coût raisonnable des valeurs engagées. Concernant la rémunération forfaitaire, relative à l’élaboration du concept de résidence, à la rédaction du dossier d’appel de candidatures pour les artistes,  à l’organisation et la direction des auditions d’artistes, je demanderai une somme de 3.500€, à laquelle s’ajouterait une somme de 1.000€ correspondant à la collaboration à la publication du livre de résidence.

B)                 Rémunérations à la vacation

Il est encore trop tôt pour évaluer précisément le nombre de vacations journalières qui seront indispensables à la mise en œuvre et au suivi de la résidence « Transformation ». Dans la période de préfiguration des résidences d’artistes, j’offrirai sur le site de la Maison des Sciences une conférence mensuelle déclinant le thème de la transformation et le concept proposé : « l’art de transformer, la transformation des arts ». Pour chaque vacation journalière, je demanderai à ce que la rémunération prévue soit scindée en deux de façon à pouvoir m’assurer en toute occasion la collaboration d’un(e) assistant(e).

  1. 2.                  Budgétisation de la première résidence

L’étant donné indiqué dans le cahier des charges (financement de la résidence) est un socle à partir duquel de multiples ramifications budgétaires peuvent être envisagées (mutualisation des coûts, recherche de co-productions et de mécénat, subventions, stratégies de financement participatif, diffusion des œuvres et des publications, etc.).

Le coût des résidences d’artistes pourra considérablement varier (de 10 000 à 100 000 €) en fonction de la nature du travail artistique (écrivain, plasticien sculpteur, musicien, cinéaste, etc.), de la forme de la résidence (individuelle ou collective), des moyens de production afférents à la nécessité de chaque résidence.

L’élaboration budgétaire de chaque résidence fera l’objet d’une évaluation collective, à laquelle sera associée le Conseil artistique. Les budgets alloués devront être transparents sincères, et publics. Ils feront l’objet d’une démarche pédagogique quant au bon usage de fonds publics.

Conformément à tout ce qui m’a engagé jusqu’à présent en responsabilité de directions artistiques et/ou éditoriales, je veillerai à ce que l’économie globale du projet et de chacune de ces entités ne fasse l’objet d’aucun dépassement illégitime. Davantage même, j’estime que tout euro engagé à partir de fonds publics doit générer une économie redistributive qui soit éminemment profitable à l’ensemble de la société. Je proposerai, sur ce point, que soit mis en place un Conseil de surveillance de l’usage des fonds publics, qui puisse attester devant l’assemblée des citoyens le total respect des principes éthiques ci-dessus énoncés.

Jean-Marc Adolphe, le 2 décembre 2013

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