J'invite à lire, avant ce texte, l'excellent article de blog https://blogs.mediapart.fr/cartographe-encarte/blog/110518/petite-histoire-tragique-de-la-division-gauche auquel je vais faire référence, ainsi qu'éventuellement les commentaires assez agressifs (par passages) des partisans de Jean-Luc Mélenchon.
Je reprécise que j'ai voté pour JLM en 2012 et pour B.Hamon en 2017. Je me rattache à un groupe de "non-encartés" du Front de Gauche à Besançon, devenu depuis peu "A gauche citoyens", et au groupe local de "Génération-s".
Si j'ose résumer le blog de "Cartographe encarté", il présente l'historique de la dérive de JLM et de FI vers le refus de toute alliance "partisane", tout en soulignant quelques sérieuses contradictions dans la perspective des européennes à venir (Podemos, le "bloco" portugais...), et prophétise qu'il n'y aura pas d'alliances en France l'an prochain. Je partage à 99% l'analyse de l'auteur quant aux responsabilités très lourdes qu'endosse JLM pour l'avenir, et à 100% l'idée que la "division", c'est-à-dire l'absence d'alliances entre forces politiques, est une impasse dramatique pour "les gens", pour reprendre l'expression favorite de notre tribun. Je ne souhaite pas répéter trop lourdement combien j'ai pu admirer l'énergie et le talent de JLM.
J'ai eu l'occasion de discuter assez longuement avec un membre de FI du département 70 (François) lors du voyage que nous avons fait ensemble samedi 4 mai pour "la fête à Macron" (dont je rappelle que contrairement à certains propos, elle réunissait autour d'un appel non labellisé FI, mais lancé par deux personnalités en leur propre nom, F.Ruffin et F.Lordon, des citoyens de diverses "obédiences"). L'argument "décisif" de François pour rejeter a priori tout accord en vue de listes communes avec le PCF et Génération-s aux Européennes est que B.Hamon a prétendu, comme Pierre Laurent dans d'autres termes, que l'on peut faire une politique conforme aux intérêts des classes populaires en France dans le cadre des traités actuels ("à traités constants"). Il est donc "inutile" d'engager des pourparlers, qui risqueraient par-dessus le marché (si on ose dire !) de créer encore de la confusion sur la nécessité d'en finir avec les "vieux partis", ces "cadavres"... au lieu d'avancer vers la construction d'une force nouvelle rompant avec le clivage "gauche/droite" (je résume, mais avec les mots-clés et leur articulation athentique).
Quelques jours auparavant, lors d'une rencontre organisée par l'association locale (Besançon) EDGE (Espace de Discussion des Gauches et des Ecologistes), la représentante de FI, Claire Arnoux, avait concédé que "si le Parti Socialiste redevenait un parti de gauche, elle reverrait sa position" [énoncée auparavant, de ne jamais discuter avec ce parti]. J'y vois un indice parmi d'autres de cette évidence : FI est à l'heure qu'il est coincée dans une vraie contradiction, issue de la responsabilité nouvelle que lui confèrent l'excellent résultat de JLM au 1er tour de la présidentielle, ses résultats honorables aux législatives, sa présence à l'Assemblée Nationale, sur le fond de l'effondrement du PS et de EELV et de la stagnation du PCF. La montée en popularité de François Ruffin, qui énerve les purs et durs de FI parce qu'ils y voient le résultat d'un complot contre JLM et donc contre ses chances à la prochaine présidentielle, en est un autre indice. Ce n'est pas qu'on "aime mieux" Ruffin. C'est que celui-ci incarne des contre-valeurs de ce que JLM et surtout une partie des cadres de FI présentent.
Tout cela pour dire qu'il serait dommage d'abandonner aujourd'hui le combat pour convaincre FI d'engager les discussions préparatoires à des listes communes, non seulement françaises, mais transnationales, à l'élection de 2019. L'idée incarnée par les premières propositions autour de B.Hamon, Varouflakis et autres, si elle est aujourd'hui limitée par sa portée, est cependant un des piliers à venir d'une campagne à la fois européenne, internationaliste, et porteuse des valeurs de gauche, de la contestation de la Commission et de la majorité actuelle du Parlement Européen. Elle "parlera" beaucoup plus aux citoyens des classes moyennes et populaires que le magma "souverainiste" qui mixe "populismes" de gauche, de droite et d'extrême-droite, dont les nuances ont tout pour échapper dans les mois qui viennent à la compréhension active des électeurs.
C'est le chantier auquel le PCF et Génération-s ont à s'atteler dans le peu de temps qui reste. Le PCF, à trouver la voie du salut loin du souverainisme de certains de ses cadres (qui défendent désespérément une idée "républicaine" de la "frontière" jusque dans les discussions sur l'immigration) et de l'abdication face aux traités de son autre courant dominant. Génération-s, à radicaliser sa rupture avec les illusions héritées du Parti Socialiste, à permettre à ses membres, qui ne viennent pas tous, et de loin, du PS, et dont beaucoup n'ont voté ni Maastricht ni le TCE ni soutenu la ratification de Lisbonne, de s'emparer du débat et d'élaborer collectivement la voie qui convergera avec un PCF rassemblé. Alors, la discussion d'un côté avec les restes du PS et avec EELV, de l'autre avec FI voire Ensemble ou le NPA, pourra prendre consistance, et être menée autour de principes politiques nationaux et européens et non de perspectives tactiques toutes aussi suicidaires les unes que les autres.
Billet de blog 14 mai 2018
L'unité avec France Insoumise pour les Européennes est-elle impossible ?
En dialogue avec le post de "Cartographe encarté" [ https://blogs.mediapart.fr/cartographe-encarte/blog/110518/petite-histoire-tragique-de-la-division-gauche ]. D'accord avec son analyse, mais pas avec son diagnostic sec, qui me semble défaitiste et désarmant. PCF et Génération-s ont une ouverture à jouer et une responsabilité à endosser pour bloquer la dérive isolationniste de FI et de JLM.
Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.