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Billet de blog 14 août 2015

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L'Europe doit mettre en place une taxe carbone (Michel Barnier-Jean-Michel Naulot, Le Monde)

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A mesure qu'approche la conférence de Paris sur le climat, les pays participants présentent tous des objectifs ambitieux pour développer les énergies renouvelables et lutter contre les émissions de dioxyde de carbone. Mais ces objectifs n'auront de valeur que s'ils sont accompagnés de moyens convaincants. Si l'industrie des énergies renouvelables a maintenant de solides références, il n'en va pas de même des marchés du carbone. Créé en  2005, le marché européen a tourné au fiasco.

La filiale de la Caisse des dépôts qui se consacre à la transition énergétique et écologique de l'économie considère que la contribution du prix du carbone à la réduction des émissions peut être évaluée entre 0 et 10  % depuis dix ans.

Alors que la plupart des spécialistes estiment que pour être efficace le prix du carbone devrait se situer dès maintenant autour de 25 à 30  euros, ce prix se maintient depuis 2012 à moins de 8  euros. L'Allemagne, qui possède quatre des cinq centrales à base de charbon les plus polluantes en Europe, a même décidé ces dernières années d'accroître sa production d'électricité à base de charbon. Les raisons de cette situation catastrophique sont bien connues : allocation de quotas trop importante, distribution de quotas gratuits. Mais derrière ces dysfonctionnements, il existe une cause fondamentale : la grande rigidité du système.

Des ressources financières significatives

Peut-on vraiment programmer les allocations de la période 2021-2030 alors qu'il est impossible de prévoir la conjoncture économique, le prix des énergies fossiles, tellement volatil, le temps qu'il fera au cours des prochains hivers… Or, le marché du carbone n'a aucune utilité s'il ne garantit pas un niveau de prix élevé afin de décourager les sites industriels les plus polluants, et s'il ne donne pas aux chefs d'entreprises un prix du carbone sur la longue durée pour qu'ils puissent arrêter leur politique d'investissement avec un minimum de sécurité. Dans l'hypothèse où le prix du carbone ne dépasserait pas significativement la zone des 30  euros dans les années 2019-2020, ne peut-on imaginer qu'au lieu de passer à la quatrième phase d'allocation des quotas (2021-2030), l'Europe opte pour une taxe carbone?

L'engagement en faveur du recours à la taxe serait pris dès maintenant. Ce serait un moyen de montrer la détermination de  l'Europe en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Les ressources financières dégagées au profit de la cause climatique seraient significatives, au lieu d'être symboliques, et la taxe toucherait les produits importés. L'idéal serait naturellement que d'autres régions du monde fassent de même. Dans quelle situation serions-nous, si nous constations en  2030 qu'en raison des dysfonctionnements du marché carbone, l'objectif de réduction des émissions de gaz carbonique n'a pas été respecté ? Nous aurions sous nos yeux la certitude d'une hausse de température supérieure à 2 degrés avant la fin du siècle. Les conséquences seraient alors non pas dramatiques mais véritablement apocalyptiques. Pour agir, il serait trop tard ! Nous n'avons pas le droit de prendre ce risque insensé pour les générations futures.

Tribune publiée par Le Monde daté du 14 août 2015

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