Le procès du journal satirique « le Berry Ripou » contre l'ancien secrétaire de Préfecture et le Ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux se déroulera à Bourges le Vendredi 17 septembre à 14h au Tribunal de Grande Instance de Bourges. Ce procès est l'occasion de revenir et mettre en lumière la différence entre le discours et les actes du Président de la République, M. Nicolas Sarkozy, en matière de défense et de respect de la liberté de la presse. Extrait réécrit des conclusions de notre avocat.
A la veille de son élection Présidentielle, M. Nicolas Sarkozy se faisait chevalier blanc de la liberté de la presse et du doit à la caricature. En effet, lors du procès contre Charlie Hebdo par rapport aux caricatures de Mahomet, Monsieur Nicolas Sarkozy, à l’époque ministre de l’intérieur, avait apporté son soutien au journal satirique alors dirigé par M. Philippe Val.
Il avait rédigé un courrier dans lequel il tenait les propos suivant :
Je tiens à apporter mon soutien à votre journal qui s’inscrit dans une vieille tradition française, celle de la satire (…) Au nom de la liberté de rire de tout (…) Je préfère l’excès de caricature à l’absence de caricature
De plus, Monsieur Nicolas Sarkozy avait lors d’une interview à LCI le 2 février 2006 toujours sur la publication de ces caricatures, il avait précisé à nouveau son soutien à la presse satirique.
Jean François Rabilloud : Est-ce qu’il faut selon vous d’abord défendre la liberté d’expression ou alors s’interdire de caricaturer tout ce qui concerne l’Islam ? Nicolas Sarkozy : Non, à l’évidence il faut défende la liberté d’expression et à tout prendre, je préfère l’excès de caricature à l’excès de censure. Et puis je me permets de vous dire monsieur Rabilloud que s’agissant de la caricature, je crois être bon client. Si je devais protester à chaque fois qu’on me caricature, je passerais mon temps à protester. La démocratie, c’est la possibilité de la critique, de l’échange des arguments et de la caricature surtout par le biais des dessins. C’est ça la démocratie. Et ça c’est non négociable. (…) On n’a pas été jusqu’à demander l’interdiction d’un journal parce qu’on avait offensé l’église catholique et je ne vois pas pourquoi il faudrait faire un cas particulier pour une religion par rapport à une autre. … bon autant que faire se peut, il faut éviter de blesser, les convictions et les personnes, parce que blesser c’est inutile. Même si encore une fois je préfère qu’on prenne le risque de blesser que le risque de la censure
Pourtant, depuis le début de son mandat, le Président Sarkozy ne cesse de saisir la justice. Notons quelques affaires :
- Début 2008, le président de la République et son épouse gagnent un procès contre Rayanair. La compagnie aérienne avait utilisé une photographie du couple non marié à l’époque. On pouvait lire sur cette publicité les pensées de Carla Bruni : « Avec Rayanair, toute ma famille peut venir assister à mon mariage ».
- En avril 2008, Thierry Bœuf, gérant de la société Arclo, avait commercialisé des tee-shirts utilisant le nom du président de Sarkozy. Sur l’un deux, il y a avait écrit : « Sarkozy tolérance zéro ». Le président de la République avait une fois de plus saisit la justice. Selon l’avocat de Monsieur Thierry Bœuf :
On est dans la satire politique. Même De Gaulle n’a l’avait pas fait en mai 68. Il n’a engagé aucune poursuite, et pourtant il avait été attaqué…
Ce qui montre une certaine incompréhension face à l’attitude du Président de la République qui saisit la justice.
- En octobre 2008, les éditions K&B ont mis en vente un ouvrage de Yaël Rolognese : Nicolas Sarkozy : Le Manuel Vaudou. Ce manuel était accompagné d’une poupée représentant le Président de la République ainsi que 12 aiguilles. Le président de la République a décidé de saisir la justice. Dans un premier temps, dans un jugement du 29 octobre 2008, le tribunal de grande instance de Paris a débouté le président de la République de sa demande de retirer des ventes le coffret. C’était la première fois, qu’un président était désavoué en première instance. Les juges avaient estimé que « la caricature et la satire, même délibérément provocantes ou grossières, participent de la liberté d’expression et de communication des pensées et des opinions ». Le chef de l’Etat a décidé de faire appel le 29 octobre 2008. La cour d’appel a estimé que la poupée vaudou constituait une « atteinte à la dignité » du président de la république. La justice a cependant autorisé la commercialisation sous conditions que l’éditeur appose sur les emballages un bandeau précisant le contenu de la décision.
- Dernièrement, le président Nicolas Sarkozy a assigné en justice le journal satirique Le Monte. Ce dernier avait publié des photomontages du chef de l’état. Sonora Media, la société éditrice a été condamnée en premier instance. Décision confirmée en appel. La justice estime que les publications « constituent une atteinte à la dignité de la personne humaine » et relevant leur caractère indécent, obscène et dégradant ». Le journal est cependant réapparu en kiosques, les photos occultées barrées de la mention « censuré ».
En plus, de n’avoir pas suivi ses dires, le Chef de l’Etat est le premier président en exercice de la Ve République à déposer une plainte pénale contre un organe de presse. En effet, François Mittérrand s’était interdit de saisir la justice pendant la durée de son mandat. Jacques Chirac avait fait de même.
Aujourd'hui, sur ordre de l'Elysée, du Ministère de l'Intérieur et du Ministère de la justice, les plaintes pressions, intimidations se multiplient contre de simples citoyens qui osent avec franchise et sans langue de bois critiquer l'action d'un gouvernement et d'un Président qui chaque jour font reculer la démocratie, la République et nos libertés fondamentales.
Le dernier scandale en date faisant état de manœuvres Elyséennes pour obtenir les sources du journal le Monde, la nomination à... Cayenne d'un magistrat soupçonné de liens téléphoniques avec le journal du soir, montrent encore une fois le peu de cas qui est fait des règles les plus essentielles de respect du droit de la presse dans notre pays.