Un système socio-fiscal plus juste
Un Revenu d’Existence pour chacun
Une urgence démocratique !
C’est un devoir pour notre société de donner à chacun de ses membres les moyens d’une vie digne.
Un Revenu Universel d’Existence peut répondre à ces attentes.
C’est à son système socio-fiscal d’organiser son financement qui doit être compris, accepté et reconnu comme juste.
Aujourd’hui, plus personne ne s’étonne que l’on puisse se faire soigner gratuitement, plus personne ne met en question le droit à une éducation gratuite et obligatoire, le droit aux études, les subventions à la recherche et à la culture, aux transports collectifs, à la sécurité, à la retraite …
Ce sont les impôts et les cotisations sociales qui permettent de financer ces droits acquis par les luttes des générations qui nous ont précédées.
Mais encore aujourd’hui une partie de la société n’a pas accès au minimum nécessaire pour se loger dignement, manger sainement, vivre sans peur du lendemain … exister !
La proposition d’un revenu universel d’existence, financé par une TVA sociale et un impôt progressif sur le capital, l’ISF récemment démantelé doit permettre de donner à notre société le socle d’Humanité qui lui manque !
Longtemps resté limité au cadre restreint des écrits et discours philosophiques, de Thomas More[1] à André Gorz[2] en passant par Thomas Paine, Bertrand Russel, Jacques Duboin, Martin Luther King et bien d’autres, comme les très libéraux Milton Friedman et Friedrich Hayek avec son impôt «négatif», le revenu universel est entré aujourd’hui de façon incontournable et irréversible dans le débat politique.
Un débat sur le revenu de base[3] a réussi à s’imposer sur la scène politique en Europe !
En France, lors des primaires de la droite et du centre, Nathalie Kosciusko-Moriset proposait d’introduire un revenu de base s’appuyant sur une taxe de 23% sur le revenu. Le député Frédéric Lefebvre avait déjà proposé un amendement allant dans cette direction. Mais ce discours trop éloignées des « valeurs» de l’électorat conservateur lui fut inaudible.
Le Revenu Universel d’Existence, porté par le candidat Benoit Hamon au cours de la campagne présidentielle permit au « peuple de gauche », qui avait voté cinq ans plus tôt pour celui qui n’avait qu’un « ennemi, sans visage »[4], … d’exprimer sa volonté de plus de justice sociale. Mais le manque de clarté sur son financement et l’absence de calendrier pour sa mise en œuvre marginalisa cette proposition.
Si un Revenu de Base pour tous, un Revenu Universel d’existence est bien entré dans le débat public, le flou de son financement est délétère.
Avant d’aborder la question cruciale de son financement, il est important de répondre aux réticences les plus couramment formulées, de bonne foi le plus souvent, avec l’évidence du bon sens de beaucoup de nos concitoyens.
Pourquoi un revenu universel ?
De quoi s’agit’ il ?
Le mouvement citoyen MFRB[5] en donne la définition suivante :[6]
« Le revenu de base[7] est un droit inaliénable, inconditionnel, cumulable avec d’autres revenus, distribué par une communauté politique à tous ses membres, de la naissance à la mort, sur une base individuelle, sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie, dont la montant et le financement sont ajustés démocratiquement. »
C’est ce qu’affirme l’article 25 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 :
« Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires »
C’est enfin la devise de la République
LIBERTE, EGALITE, FRATERNITE !
I
Alors pourquoi ce droit n’est pas encore effectif dans nos sociétés modernes ?
Parce que les blocages[8] qui figent notre société dans la situation actuelle s’appuient sur des objections légitimes souvent formulées, tant nous sommes imprégnés d’une[i]culture[9] privilégiant une résignation multiséculaire dont les plus fréquemment entendues sont les suivantes :
Plus personne ne travaillera !
Cet un argument souvent avancé est contredit dans les faits. Des milliers de personnes disposent de revenus qui leur permettraient de ne pas travailler pour vivre … Et pourtant elles travaillent.
Les raisons en sont multiples et il est impossible de les citer toutes :
Une pression sociale forte fait que ce qui est considéré comme de la paresse soit mal perçu.
Une insatisfaction liée à l’envie de certains de posséder toujours plus. Il est commun de dire que la publicité crée de nouveaux besoins. L’existence d’un environnement dans lequel se côtoient des personnes aux niveaux de vie très hétérogènes, un besoin de luxe d’ailleurs légitime qui peut être sans limites.
Ce désir de consommation et d’accumulation restera encore longtemps ce moteur de croissance … au risque d’ailleurs réel d’une détérioration de notre environnement.
Nous serons tous également pauvres !
Cet argument découle de la définition par certains économistes d’un seuil de pauvreté à 50 ou 60% du revenu médian[10] . Il serait plus juste de dire que nous serions plus nombreux à être un peu plus riches. Donner à tous un revenu fixe enrichit proportionnellement plus les pauvres que les riches, modifiant mécaniquement le seuil de pauvreté calculé comme un pourcentage du revenu médian, le revenu moyen lui restant le même. Ce ne sera pas une société où nous serions tous pauvres comme nous en menacent certains, mais une société qui aura banni la pauvreté.
La bonne conscience d’une société de petits consommateurs oisifs !
Certains[11] pensent que le revenu de base servirait à se donner bonne conscience en proposant un « solde de tout compte » à toutes les personnes considérées comme peu ou pas intégrables dans nos sociétés post industrielles. On laisserait à une partie de la population le loisir de regarder la télévision en buvant son coca-cola comme le caricaturait l’affiche pour la campagne du Non au revenu de base lors de la votation du 5 juin 2016 en Suisse ! C’est aujourd’hui le sort réservé aujourd’hui aux personnes exclues de tout, stigmatisées parce qu’elles perçoivent un RSA ou d’autres allocations spécifiques quand elles parviennent à les obtenir !
Un revenu pour tous, c’est une sécurité permanente offerte aux initiatives et aux envies de chacun. C’est pour le petit paysan la possibilité de cultiver sa terre sans la pression de la rentabilité, c’est pour l’artiste le temps de créer sans peur du lendemain, c’est plus de liberté pour tous !
Si seuls certains travaillent pour entretenir les autres, ce n’est pas juste !
Bien sûr toutes les richesses dont nous profitons proviennent d’un travail. Mais ceux qui travaillent produisent beaucoup plus que leur travail propre. Le travail organisé crée une plus-value[12] essentiellement due à tout ce qui a été pensé, réalisé avant même le début de chacune de nos existences. Cela appartient à tous, et pas aux seuls propriétaires des moyens de production, c’est à la société toute entière, à nous tous, quelque soit son statut, c’est pourquoi chacun doit pouvoir profiter de cette abondance.
Le choix d’un financement du revenu d’existence par un impôt indirect sur la consommation, la TVA et par un impôt sur la fortune, l’ISF fait tomber cet objection souvent entendue
Pourquoi donner un revenu de base à ceux qui n’en n’ont pas besoin ?
La question peut se poser bien sûr ! A quoi sert de donner quelques centaines d’euros tous les mois à une personne qui dispose d’un capital de plusieurs millions, dont les revenus mensuels se comptent par dizaines de milliers d’euros.
C’est pourtant fondamental. C’est l’affirmation que nous faisons tous partie d’une même société. C’est pour signifier que nous avons tous droit à notre part de la richesse produite par notre société indépendamment de tout travail, de tout titre de propriété. Qui aujourd’hui penserait supprimer la sécurité sociale à une personne au prétexte que ses revenus lui permettraient de payer son médecin et ses médicaments ?
C’est l’affirmation claire qu’il n’y a pas deux catégories de citoyens[13], ceux qui perçoivent des aides de l’état et ceux qui cotisent pour les premiers. Tous les besoins essentiels sont garantis, même à ceux qui ont déjà le superflu! (mais qui sait de quoi est fait l’avenir). C’est un puissant moyen de lutte contre la stigmatisation de toute une partie de la population, c’est un droit[14] pour tous !
C’est par le travail que l’on se réalise !
Les différents sens que l’on donne à la notion de travail[15] nous fait entrer dans un débat passionnant mais tout à fait hors de propos ici; Cet argument est souvent avancé lorsque l’on parle de revenu de base. Le lien fait entre travail et rémunération dans notre société[16] tend à nous faire croire que toute activité qui ne donne pas lieu à une rémunération, salariée ou non n’est pas un travail. Or beaucoup de travaux sont accomplis sans salaire associé, et par ailleurs un revenu suffisant sans obligation de travail permettra à chacun de mieux valoriser un travail salarié. Le chantage à l’emploi tel qu’il existe aujourd’hui dans une société gangrénée par un fort taux de chômage, sera alors beaucoup moins efficace. C’est donc un nouveau rapport de forces qui obligera à mieux rémunérer le travail salarié grâce à la sécurité apportée par un revenu de base, mais aussi la possibilité d’un choix, le loisir de travailler pour soi, en fonction de ses véritables envies, de ses désirs. C’est tout simplement plus de liberté.
On ne supprimera jamais certains travaux répétitifs, pénibles … mais nécessaires !
C’est bien évidemment une question qui se pose. C’est aussi un moyen de rendre justice à toutes ces personnes qui aujourd’hui doivent accepter des conditions de travail indignes pour des salaires de « travailleurs pauvres ». L’existence d’un revenu sans condition permettra une négociation rééquilibrée entre représentants des salariés et employeurs. On peut raisonnablement penser que la délégation de beaucoup de tâches nécessaires à des entreprises exploitant une main d’œuvre sans droits ne pourra perdurer sous leur forme actuelle. Les conditions de travail et de rémunération de beaucoup de salariés devront être revues à la hausse. Une automatisation non rentable aujourd’hui le deviendrait si la masse salariale globale pour ces travailleurs devait augmenter de façon significative. Il est aussi probable qu’avec de meilleurs salaires horaires les temps partiels pour ces tâches les plus dures auront tendance à se développer. C’est bien sûr, particulièrement pour les personnes exerçant ce type d’emploi, que l’existence d’un revenu de base apporterait une liberté nouvelle. Ce serait une avancée majeure pour toute une frange de la population maltraitée dans notre société. L’argument quelquefois entendu selon lequel les employeurs n’auront plus besoin de bien payer leurs salariés, ceux-ci ayant déjà de quoi vivre parait pour le moins étonnant, et même quelque peu méprisant. Il sera toujours hors de question de toucher aux garanties d’un salaire minimum, à celles des conventions collectives, aux protections statutaires des fonctionnaires…
C’est un moyen simple d’aller vers un plus juste équilibre des forces entre des intérêts qui resteront contradictoires.
Le travail fait avec plaisir sera toujours payé ?
Ce n’est pas parce ce que beaucoup de personnes trouvent du plaisir dans leur travail que leur fonction n’est pas utile à la société. Cette évidence d'aujourd'hui le restera demain. Un salaire rémunère une activité dont une administration, une entreprise a besoin pour fonctionner. L’existence d’un revenu donné à tous ne supprimera aucune des fonctions nécessaires à la bonne marche de l’organisation de notre vie en commun. Le choix d’une activité salariée ou indépendante se fera avec plus de liberté. Chacun verra le champ des possibles s’ouvrir plus largement, permettant ainsi une meilleure prise en compte de l’épanouissement au travail.
Il y aura toujours des personnes qui veulent avoir plus que les autres !
Bien sûr et la richesse, à quelque niveau que ce soit, est toujours une notion relative. Le plus souvent l’idée que l’on se fait de la richesse se façonne à partir de son environnement immédiat. Lorsque l’on aborde le concept de revenu de base, l’objection quelquefois faite par certaines personnes, pas toujours par les plus privilégiées, consiste à dire que si l’on supprime la pauvreté, on supprimera par la même le luxe. C’est une idée qu’il faut combattre, non pour des raisons morales mais parce que le luxe lui aussi fait partie des nécessités pour toute société. Ce n’est pas le luxe qu’il faut combattre, c’est l’injustice. Il faut que pour tous, pour l’ensemble de la population le sentiment d’un monde juste devienne une évidence. Nous en sommes très loin. L’idée quelquefois avancée d’un revenu maximum ne peut être que contre productive et risque de servir les intérêts de tous ceux qui veulent conserver le statut quo actuel. Les propositions comme le salaire à vie de Bernard Friot[17] allant de 1500 à 6000 euros mensuels, comme le facteur 12 de Giraud et Renouard[18] ou le « au delà de 20 SMIC je prends tout »[19] ne seraient applicables qu’en renonçant à beaucoup de nos libertés. Que faire des droits d’auteurs lorsque le tirage d’un roman à succès fait que celui-ci aura gagné en un an le prix d’un château ? Quelques mesures fiscales de bons sens peuvent être utiles, et pourquoi pas limiter les hauts salaires à douze fois le salaire le plus bas à temps plein, avec tous les droits attachés au statut de salarié ; c’est d’ailleurs à peu près se qui existe déjà dans la fonction publique en France. Alors footballeurs, tennismen, chanteurs et acteurs à succès, artistes internationaux, avec quelquefois des carrières courtes vont continuer à venir nous enchanter. L’argent n’est d’ailleurs pas en général leur première motivation. Il faut simplement que leur participation au bien de tous soit juste. C’est alors à l’impôt progressif sur le revenu d’opérer la régulation nécessaire pour que l’avidité, la chance, le travail ou le talent de certains profitent à tous. Mérite récompensé, hasard heureux, une grande diversité sociale qui va se maintenir… Mais ne laissons pas une oligarchie financière, s’auto reproduisant de générations en générations[20] gangréner notre démocratie !
II
Financer le Revenu Universel d’Existence :
La taxe sur la valeur ajoutée
Si dans son principe l’existence d’un revenu pour tous est admis par une majorité de nos concitoyens,[21] c’est pour son financement qu’apparaissent l’essentiel des réticences.
C’est pourquoi l’option d’une caisse autonome gérée par le fisc et abondée par la TVA et l’impôt progressif sur le capital, l’ISF présente beaucoup d’avantages.
La TVA est indépendante du travail, ne s’appuyant que sur la consommation de l’utilisateur final. L’un des reproches fait au revenu universel tombe de lui-même, on ne demande plus au travailleur de donner une partie de son travail à « l’assisté » qui profite du système.
Nous sommes tous des consommateurs, nous payons tous la TVA, elle nous est rendue sous forme d’un revenu inconditionnel !
Mais retirer au budget de l’Etat les ressources de la TVA au profit du financement d’une partie du revenu universel d’existence, implique de trouver ailleurs les moyens de faire fonctionner celui-ci.
C’est donc une importante réforme de simplification fiscale qu’implique le financement d’un revenu de base[22] par la TVA et l’ISF. Il est important de clarifier quelques questions légitimes qui permettront d’éclairer le débat
1-La TVA perçue dans le pays du consommateur
L’essentiel des moyens financiers dont dispose l’état aujourd’hui provient de la taxe sur la valeur ajoutée, la TVA. C’est l’impôt qui rapporte le plus à la collectivité[23] mais qui de façon paradoxale n’est que rarement mentionné lorsque s’expriment les partisans d’un moins disant fiscal. Vilipendé par une partie de la gauche, parce qu’il frappe proportionnellement plus ceux qui consomment tout ce qu’ils ont gagné chaque mois, contrairement à ceux qui disposent de moyens suffisants pour économiser une partie de leurs revenus. La TVA est un bon moyen de financer, au moins en partie, un revenu de base pour deux raisons essentielles : cet impôt n’est pas directement lié au revenu, contrairement à l’impôt direct. L’argument souvent entendu « vous voulez donner de l’argent de ceux qui travaillent à ceux qui ne font rien » perd de sa pertinence symbolique. La deuxième raison tient à la nature de cet impôt, c’est une taxe en partie européenne, dont les taux appliqués aux différents types de produits et prestations concernées sont dépendants d’un accord communautaire. Ce pourrait donc être aussi le socle d’un revenu de base européen. Enfin dans une société de surconsommation comme la notre, une modulation par une TVA différenciée selon des choix raisonnés, comme la trace carbone, la longévité, une plus ou moins grande utilité ne peut que nous pousser dans la direction de comportements plus respectueux de notre planète.
En France, plus que dans d’autres pays en Europe, on sépare de façon largement artificielle les ressources fiscales, et les ressources sociales. Il y existe par ailleurs une grande porosité entre ces deux modes de prélèvements. Ce n’est pas à strictement parler un prélèvement obligatoire car personne n’est obligé d’acheter quoi que ce soit. C’est de plus un impôt qui n’est pas directement lié au travail fourni par celui qui paye cette taxe. Selon le produit ou la prestation achetée, le taux de TVA devrait-être décidé de façon démocratique. C’est aux citoyens qu’il revient de choisir ce qui doit être fortement taxé, et ce qui doit l’être faiblement. Aujourd’hui les taux les plus faibles sont réservés à ce qui est considéré comme indispensable, les médicaments, la nourriture, les travaux d’amélioration de l’habitat … mais d’autres critères de choix peuvent être faits. Favoriser les transports collectifs, les économies d’énergie, et inversement imposer de fortes taxes pour éviter le gaspillage d’eau, de biens rares … .
Cette TVA modulée, avec un taux moyen de 20% doit pouvoir financer, de façon efficace et juste une grande proportion de ce que sera le revenu universel, n’a-t-on pas déjà parlé de TVA sociale? Grace à l’absence de lien direct avec un travail fourni, cette ressource est la plus socialement acceptable avec l’impôt sur le capital.
III
L’impôt progressif sur le capital
2- L’impôt de Solidarité sur la Fortune
Un impôt sur le capital présente les mêmes avantages que l’impôt sur la consommation. Il n’est pas directement lié au travail contrairement à l’impôt sur le revenu. De plus c’est dans ce domaine que l’on observe le plus d’inégalités dans nos sociétés. Enfin avec la fusion de la taxe foncière et de l’ancien ISF, nous avons une source de financement acceptée par une majorité de citoyens attachés à plus de justice fiscale comme le confirme régulièrement tous les sondages d’opinion.
C’était déjà l’idée de Thomas More, à la fin du quinzième siècle, qui dans son ouvrage Utopia proposait l’abolition de la propriété «dans une société idéale où chacun y jouit en abondance de toutes les commodités de la vie»; Thomas Paine, lors des révolutions américaine et française, demande en tant que député de taxer les propriétaires de terres agricoles, l’essentiel des moyens de production de l’époque, afin de donner de quoi vivre à ceux qui ne possèdent rien. Cette même idée aujourd’hui, c’est l’impôt sur le capital. Parmi les prélèvements obligatoires existants, c’est celui qui est le plus populaire dans la population française. La réélection de Mitterrand en 1988 serait expliquée en partie, selon plusieurs sondages[24], par l’abrogation de l’impôt sur les grandes fortunes, l’IGF du programme commun de la gauche par le gouvernement de cohabitation de Jacques Chirac. Vrai ou faux, il est toujours difficile d’analyser les motivations profondes et multiples d’un vote. C’est en tout cas pour cette raison que les différents programmes de gouvernements de droite qui ont suivi n’ont jamais osé clairement proposer de supprimer l’ISF, rétabli par Lionel Jospin, lors de la cohabitation de gauche … seul François Fillon a osé, avec le succès que l’on sait, proposer sa suppression! Cet impôt qui dès le départ présentait d’énormes trous dans son assiette, comme la non imposition des œuvres d’art, a subi au cours du temps des attaques[25], venant des gouvernements de droite bien sûr mais aussi de gouvernements dits de gauche. Cela en a fait par conséquent un impôt peu productif. L’absence de véritables contrôles, la possibilité de déduire jusqu’à un tiers du prix de sa résidence principale, le fait de pouvoir déduire la valeur de l’ «outil de travail», (comme cela est bien dit quand il s’agit des actions d’un dirigent d’entreprise) … . Aujourd’hui l’impôt sur le capital est limité à l’IFI, l’impôt sur la fortune immobilière, les taxes sur les successions et les impôts fonciers. De plus l’impôt sur la fortune cumulé aux autres impôts directs, ne peut dépasser un pourcentage des revenus du contribuable, par décision du Conseil constitutionnel[26], pour que ce prélèvement ne soit pas «confiscatoire»! Une raison de plus pour changer de constitution et aller vers une sixième République. C’est pourtant ce type de contribution qui semble la plus pertinente pour financer, au moins en partie le coût d’un revenu de base. Plusieurs raisons militent dans ce sens : c’est d’abord un impôt qui n’a qu’un lointain rapport avec le travail contrairement à l’impôt sur le revenu sous sa forme IRPP ou CSG. De plus cet impôt réaménagé peut être un puissant facteur de cohésion sociale si l’on décide d’élargir son assiette à l’ensemble des biens. Enfin cette contribution s’appuyant sur ce qui existe déjà, est peu susceptible de variations intempestives : un gage de stabilité pour un revenu garanti pérenne! Pour que cet impôt soit lisible et accepté par tous, son taux doit être faible avec l’assiette la plus large possible : tout ce qui appartient en propre à une personne doit être inclus, et ce dès le premier euro quelque soit la localisation de ces biens sur terre. Faire de chacun un contribuable, c’est faire de chacun un citoyen. Un taux progressif applicable à chaque personne (deux parts pour un couple) avec pour la première tranche un taux proche de la taxe foncière actuelle, de 0,1% jusqu’à 100.000 euros, par exemple de 0,5% de 100.000 à 1million, 1% de 1 à 10 millions, 2% au delà permettrait ainsi de financer une bonne partie d’un revenu universel. L’impôt sur les successions existant déjà, nous ne ferons que le citer, mais sans lien évident avec un financement d’un revenu pour tous. En ordre de grandeur si cet ISF progressif (0,1%, 0,5%, 1%, 2%) sur le capital de l’ensemble des avoir des personnes résidentes duquel on aurait déduit l’ensemble de ses emprunts, l’actif net de tous les résidents en France dépassant les douze mille milliards d’euros, constituant la richesse privée de nos concitoyens[27] procurerait un rapport potentiel pour le fisc de 120 à 150 milliards d’euros, la répartition de la richesse en France et la progressivité proposée allant jusqu’à 2% permettrait même peut-être d’obtenir un rendement bien supérieur !
IV
Financer l’Etat et la protection sociale
Comment remplacer l’apport de la TVA dans le budget de l’Etat !
Simplifier et rendre juste la fiscalité personnelle !
Du concret, applicable maintenant
Un impôt sur le revenu, compréhensible par tous, personnel, progressif par tranches jusqu’à 50% des revenus réels pour le fonctionnement de l’Etat, l’éducation, la santé, la culture, les services publics, la sécurité…
L’IRPP, l’impôt sur le revenu des personnes physiques qui dans notre système fiscal actuel est l’arbre qui cache la forêt. Cet impôt prélevé à la source par un foyer fiscal sur deux, avec des taux progressifs allant de zéro à quarante cinq pour cent, est par excellence l’impôt des classes moyennes et moyennes supérieures. En effet de nombreuses « niches-fiscales » autorisent à beaucoup de potentiels gros contribuables[28] de diminuer les sommes qu’ils auraient dû normalement acquitter… l’optimisation !
Mais en réalité le principal impôt sur le revenu s’appelle la CSG, la contribution sociale généralisée. Cette contribution s’appuie sur la presque totalité des revenus, du travail comme du capital avec la particularité d’être un impôt strictement proportionnel au revenu connu.
L’une des mesures de justice fiscale urgente serait de fusionner l’IRPP et la CSG et d’en faire ainsi un impôt individuel, global sur tous les revenus, progressif, compréhensible par tous. Cette fusion de la CSG et IRPP promise par François Hollande[29] en son temps, préconisée par Thomas Piketty[30] n’a toujours pas vu le jour. Mais la mesure acquise juste en fin de mandat et conservée par Emmanuel Macron, le prélèvement à la source, effectif depuis janvier 2019 permettrait d’avancer très vite dans ce domaine. L’individualisation de l’impôt sur le revenu deviendrait alors beaucoup plus facile à mettre en œuvre, et pourquoi pas, une fusion avec la CSG. Si la volonté de simplification promise par « la France en Marche » rencontre une volonté réformatrice et un courage politique revendiqué, cette réforme, même sans l’intention de changer les taux de prélèvements (ce qui n’a jamais fait partie des propositions « ni de droite, ni de gauche ») permettrait alors, toutes choses égales par ailleurs, une meilleure lisibilité de la fiscalité directe en France.
… et un plafonnement des niches fiscales
Des études[31] ont montré que leur efficacité économique est très contestable pour beaucoup d’entre elles. Elles profitent à ceux qui sont déjà les plus privilégiés. Mais c’est aussi un moyen pour certains de choisir à quoi doit servir une partie de leur contribution. Cette possibilité, si elle est acceptable dans son principe, doit être limitée, à un montant relativement faible (possibilité de faire des dons à des associations d’utilité publique, travaux de protection de l’environnement, aide au fonctionnement de la démocratie par le biais de financement de partis politiques …) ne doit jamais excéder un plafond de quelques centaines d’euros et ne pas faire perdre à l’impôt sur le revenu son rôle déterminant dans la construction de plus de justice sociale.
Pour redevenir compréhensible par tous, il faudrait que l’impôt sur le revenu soit simple. La fusion de la CSG et de l’IRPP, associé à la personnalisation de ce nouveau prélèvement à la source serait une grande avancée. Pourquoi ne pas profiter de la mise en œuvre du prélèvement à la source de l’IRPP en janvier 2019 pour supprimer cette notion injuste de foyer fiscal. L’impôt sur le revenu, concernerait alors tous les contribuables, dès le premier euro, comme c’est le cas pour la CSG. Le revenu de base, quand il existera serait évidemment imposable, avec une première tranche au taux des CSG et CRDS actuelles, entre 8% et 10% pour le tranche comprise entre 0 et 12500 euros par an pour une personne, et pourquoi pas des tranches successives augmentant de 8 en 8, de 9 en 9 ou même si besoin de 10 en 10% à chaque fois que le revenu personnel double, salaire brut, bénéfice net, honoraires, droits d’auteurs etc. et limité à 50% des revenus bruts …
Thomas Piketty, préconise une révolution fiscale[32] avec notamment la fusion de l’IRPP et de la CSG, avec l’introduction d’une progressivité à décider démocratiquement. Cela faisait aussi partie des propositions de réforme fiscale de François Hollande en 2012. Il est démontré qu’aujourd’hui, que pour les contribuables les plus aisés[33], les taux de prélèvements deviennent dégressifs. Et lorsque la part des revenus du patrimoine augmente, la dégressivité augmente. Le taux d’imposition réel moyen sur le revenu du capital est aujourd’hui en France de 11%.[34] Il est urgent de corriger cette anomalie. Il semble raisonnable de penser qu’après la fusion de L’IRPP, de la CSG et la CRDS dans un grand impôt personnel progressif et prélevé à la source, la rentabilité globale devrait atteindre des niveaux biens supérieurs que ceux obtenus avec ces trois prélèvements actuels. Jusqu’où faut-il aller dans la progressivité de ce nouvel impôt global sur le revenu ? La question mérite d’être posée.
Pour résumer : un impôt sur l’ensemble des revenus bruts des personnes physiques, sur une base individuelle, s’appliquant dès le premier euro et augmentant par tranches de 8% en 8% à chaque fois que le revenu double. Soit 8% de 0 à 12 500 euros bruts annuels (c’est aujourd’hui la CSG), puis 16% sur les revenus de 12 500 à 25 000 euros, 24% pour la tranche de 25 000 à 50 000 euros, 32% de 50 000 à 100 000 euros, 40% de 100 000 à 200 000 euros, 48% de 200 000 à 400 000 euros, 56% sur les revenus au delà de 400 000 euros avec un plafond limitant à 50% les prélèvements sur l’ensemble des revenus !
Notons qu’en absence de fusion de la CSG et de l’IRPP, c’est comme s’il existait une première tranche pour tous dès le premier euro de revenus et donc un prélèvement socio-fiscal de 8% associé à une dernière tranche à 45% pour les hauts revenus !
Les politiques de subventions à l’emploi sont à revisiter (après la suppression du CICE, il serait logique de supprimer les diverses exonérations de charges des entreprises)
L’existence d’un revenu pour tous doit permettre à chacun d’organiser les temps de sa vie avec un degré de liberté largement accru, inconnu à ce jour. Le choix d’un temps de travail salarié plus léger pour chacun de ceux qui le souhaitent devrait entrainer mécaniquement une diminution du chômage. Les subventions à l’emploi, qui sont en réalité des subventions aux employeurs, avec notamment des diminutions ou exonérations de charges patronales, entrainent des déficits dans les caisses de sécurité sociale. Cela n’a aucune raison de perdurer. Ces économies pour la collectivité permettraient à l’Etat d’obtenir des moyens supplémentaires pour répondre aux besoins généraux de la population.
Plusieurs prestations actuelles perdent leur justification avec l’existence d’un revenu de base
Il existe aujourd’hui en France et dans de nombreux pays en Europe des aides ou prestations qui sont allouées à la personne ou au foyer et qui seraient naturellement remplacées par un revenu universel. Il s’agit de toutes les prestations spécifiques liées à des situations particulières. Tout d’abord le RSA socle et le complément de RSA touché par celles et ceux dont le salaire d’un travail à temps partiel reste insuffisant pour vivre. L’existence d’un revenu de base pour tous, qui va s’ajouter à tous les autres revenus permet de remplacer ce type de prestation. Seule une allocation liée au handicap doit faire exception et procurera un complément de revenu spécifique à des personnes qui ont des besoins spécifiques. La dépendance peut aussi alors être considérée comme un handicap lié à l’âge et donc financée par la sécurité sociale.
Dans le même ordre d’idée, il n’y a plus de raison de fournir une prime pour l’emploi, ni même les aides fiscales aux entreprise au prétexte de la lutte contre le chômage. Les bourses sur critères sociaux pour les étudiants, les allocations logement, la demi-part fiscale pour les foyers ayant des enfants ou d’autres personnes à charge n’ont plus de raison de perdurer, chacun aura un revenu inaliénable!
Mais toutes les prestations ne doivent pas disparaitre pour autant et certaines doivent pouvoir se cumuler avec le revenu de base, même si elle ne sont pas liées directement à une activité ; c’est le cas des indemnités chômage payées sur des prélèvements sur les salaires (l’ensemble cotisations patronales et salariales), des retraites, de la sécurité sociale et complémentaires, qui ne sont que des salaires différés s’appuyant sur des prélèvements tout au long d’années d’activité, les revenus de remplacement pendant les périodes de maladie ou d’accidents, les prestations des mutuelles … pour résumer tout ce qui est dû aux personnes qui ont cotisé préalablement, tout ce qui est couramment considéré comme constituant des prestations contributives. Tout ce que l’on dénomme «charges, patronales et ouvrières» constitue en réalité aujourd’hui près de la moitié du salaire, le salaire brut et la cotisation de l’employeur, c’est de la rémunération socialisée, c’est du salaire différé, cela s’ajoute, comme tout revenu du travail, au revenu universel, et ne peut donc évidemment pas contribuer à son financement . Le revenu d’existence ne peut en aucun cas remplacer les allocations contributives !
Une partie du financement de l’Etat proviendra naturellement d’économies résultant de la suppression des contrôles
Un revenu donné à tous, de façon individuelle, quelque soient ses autres ressources présente l’avantage de n’avoir plus besoin de vérifier si la personne a droit à telle ou telle prestation. C’est d’abord une source d’économies importante pour la collectivité et une façon de mieux respecter les choix de vie individuels de chacun. Ce n’est pas à l’Etat d’influencer par des avantages fiscaux les modes de vie des personnes. Plus besoin savoir si deux personnes constituent on non un couple, afin de déterminer à quelles prestations elles ont droit, plus de foyer fiscal. Les enfants ont droit aussi, avec des modalités particulières à leur revenu de vie.[35]
Plus de quittances de loyer et de feuilles de paie pour le calcul d’ une aide au logement, pas de contrôles pour savoir si oui ou non une personne a droit au RSA. Plus de justificatifs de réussite aux examens pour pouvoir prolonger une bourse d’étude. Beaucoup de salariés à petits revenus aujourd’hui renoncent à des prestations auxquelles ils auraient droit face à la complexité des formulaires de demande. Enfin, et c’est peut-être l’essentiel c’est la fin de la stigmatisation de celui qui doit demander l’aide dont il a besoin pour vivre. Un même droit pour tous les citoyens !
V
Quel montant pour un revenu de base ?
Cette question est fondamentale et ne peut donner lieu qu’à une réponse démocratique. Elle varie avec le temps, la conjoncture et il suffira de proposer quelques grands principes. Ce revenu varie évidemment en fonction de la richesse produite et de la richesse accumulée dans un pays donné. Il est couramment admis que le seuil de pauvreté se situe, selon les différentes versions proposées par les économistes, entre 50 et 60% du revenu médian, ou simplement 30% du revenu moyen. Un revenu de base, inconditionnel et universel devrait donc pour éradiquer la pauvreté se situer à ce niveau. La dénomination « Revenu Universel d’Existence » implique les moyens d’une existence digne. Mais la question est plus complexe. L’existence même d’un revenu distribué à tous modifiera mécaniquement le seuil de ce revenu médian. Il semble logique d’y associer un autre marqueur : le revenu moyen ! Dans un pays dans lequel de fortes inégalités de revenus persistent, le revenu moyen se situe au dessus du revenu médian (un écart de plus de 20% en France), ce revenu moyen est lui, beaucoup plus dépendant et représentatif de la richesse produite dans un pays. Un revenu de base pour tous les membres d’une communauté politique distribué tous les mois, calculé sur une base de 25% du revenu moyen pourrait être un bon compromis et correspondrait approximativement au seuil de pauvreté. Calculé de cette façon, le revenu universel serait aussi beaucoup plus facilement généralisable. C’est vers cet objectif de justice, d’utopie réaliste qu’il nous faut aller !
Mais c’est un choix de société qui doit être fait de façon démocratique. TVA et ISF finançant le revenu d’existence, leurs taux respectifs doivent permettre d’équilibrer les comptes, il s’agit de vases communicants dans lesquels les entrées les sorties s’annulent.
Un revenu de base donné à tous de la naissance à la mort, imposable comme tous les autres revenus, c’est compréhensible, facile à concevoir pour les citoyens majeurs : c’est une somme virée le premier jour de chaque mois sur un compte courant personnel. Le problème est plus délicat pour la période allant de la naissance à la majorité : plutôt que de donner une somme forfaitaire fixée arbitrairement aux parents ou à la personne en charge de l’enfant, il semble plus judicieux de proposer une somme correspondant à l’intégralité du coût de la nourriture, des vêtements, de l’éducation, des loisirs d’un mineur, calculé sur une moyenne et variable selon les différents besoins aux âges de 0 à 18 ans et en finir avec les « bébés allocs » et les difficultés pour des adolescents d’acquérir un peu d’autonomie. Les associations de consommateurs fournissent des données intéressantes et fiables tous les ans. C’est un préalable à une liberté de choix qui doit être donné à tous ; le désir et la possibilité d’avoir un ou plusieurs enfants ne doit pas être dépendant de considérations matérielles, ni pour gagner plus avec beaucoup d’enfants, ni en frustrant d’autres couples pensant devoir se priver pour avoir les moyens d’élever un ou plusieurs enfants. Cela, allant de pair avec la suppression des allocations familiales, allocation logement, des demi-parts fiscales, des allocations de rentrée des classes, des primes de fin d’année, prime d’activité d’allocation de mère au foyer, allègements fiscaux pour les entreprises …
La gratuité pour tous les besoins essentiels de l’existence de la naissance jusqu’à la majorité pourrait correspondre au revenu de base pour cette première tranche de vie !
Sans TVA, comment financer de l’Etat et la Sécurité Sociale ?
Quelques indications chiffrées permettent d’entrer dans le concret.
Pour la France, à partir de donnée disponibles pour l’année 2016 :
- Pour l’Etat : Les économies (non exclusives) sur ce qui n’aura plus lieu d’exister :
Le revenu de base remplacerait plusieurs aides, subventions et déductions fiscales qui perdent toute justification !
-Les économies générées par la suppression du revenu de solidarité active : 11 milliards
-Les économies générées par la diminution du personnel chargé de contrôler et de gérer les différentes aides spécifiques, dont le RSA socle et autres aides liées à la situation sociale du récipiendaire : 600 millions
-L’aide au logement: 9,5 milliards sans compter le coût pour l’état de l’emprunt à taux zéro, et les aides spécifiques au logement (un total de 40 milliards pour l’immobilier)
Les allocations familiales: 80 milliards
Les aides aux entreprises par des réductions de charges : 40 milliards
Aide nouvelles aux employeurs(ancien CICE) : 20 milliards
Les niches fiscales : 90 milliards
Ces données 2016 extraites de la presse nationale représentent des sommes de plus de 280 milliards d’euros qui n’auraient plus aucune raison de se maintenir après l’instauration d’un revenu de base !
2-Les ressources nouvelles pour l’Etat et la protection sociale :
Concernant l’impôt sur le revenu : il est difficile d’évaluer dans l’absolu ce que rapporterait un impôt progressif sur les revenus, mais la somme de la CSG, de la CRDS, de l’IRPP donne des pistes utiles. Le logiciel mis en ligne sur le site de « La révolution fiscale » permet de faire quelques approximations. Avec de tranches calculées sur les revenus bruts de chaque personne comme indiqué précédemment, … même avec la raisonnable limitation de l’impôt sur le revenu à 50% de l’ensemble des revenus, une question de choix de société, un rapport d’équilibre entre démocratie sociale et pragmatisme dans un espace européen largement ouvert aux vents de la finance mondiale … il est dit quelquefois que trop d’impôt tue l’impôt, ceci mériterait d’être vérifié ! Roosevelt aux Etats-Unis alla jusqu'à imposer à 92% les hauts revenus dans les années 30 ! L’IRPP rapporte à l’état 75 milliards, la CSG 90 milliards. La fusion de ces deux impôts ferait passer de 165 milliards en gardant la progressivité actuelle et à plus de 200 milliards par la simple application de la personnalisation de l’impôt et d’une juste progressivité jusqu’à 50% !
La lutte contre la grande et la petite évasion fiscale doit être renforcée: c’est un serpent de mer qui refait surface de façon régulière sans que jamais les gouvernements successifs y apportent de solutions réellement efficaces. L’économie souterraine représenterait plusieurs points de PIB en France, mais loin derrière d’autres pays latins. Pourtant quelques mesures simples pourraient donner des signaux forts évitant à tous de succomber à la tentation de petites économies ; l’obligation d’utiliser sa carte bancaire pour toutes les transactions à partir de 20 euros serait une piste C’est déjà une pratique courante pour nos achats aujourd’hui, et qui concerne plus de 90% des transactions dans les pays scandinaves. Les chèques et les virements pour les gros achats en ne gardant en circulation que les billets de 5, 10, 20, 50 euros à la rigueur, conjugué à la suppression des grosses coupures, on peut penser qu’une partie de la petite et de la grosse fraude diminuera. Une meilleure traçabilité des flux financiers ainsi possible aidera chacun à rester dans les clous. C’est techniquement facile, les banques et de les administrations sont prêtes, c’est une question de volonté politique, aujourd’hui bien faible ; mais là, pas de menace de nettoyage au karcher ! Ce serait alors plusieurs milliards d’euros qui rentreraient dans les caisses de l’état au profit de tous !
… C’est largement de quoi remplacer la TVA dans le budget de l’Etat.
VI
Et pour vous ?
Qui y gagne, qui y perd, c‘est légitimement une question que chacun est en droit de se poser. A partir de quel niveau de revenus la bascule s'opèrerait elle ? Il n’y a pas de réponse immédiate et claire. Des avis documentés[36] proposent le chiffre de 4000 euros par mois pour qu’une personne seule, un fonctionnaire ou un salarié du privé constate qu’en dessous de cette somme, ses revenus progressent, qu’au dessus ses revenus diminuent. Mais ces calculs se basent exclusivement sur un prélèvement sur les revenus pour financer le revenu universel. Ce n’est pas ce que nous proposons.
Notre proposition d’introduire le nouvel impôt sur le capital, l’ISF rétabli et une taxe sur la valeur ajoutée, une TVA «totalement sociale».
Le capital moyen d’une personne en France serait de 180 000[37] euros. (aucune statistique officielle n’existe dans ce domaine). Si l’on taxe ce citoyen théorique, strictement moyen à hauteur de 0,1% sur la tranche inférieure à 100 000 euros, 0,5% sur les 80 000 euros au-delà de la première tranche, l’impôt sur le capital serait de 500 euros par an, si ce même citoyen strictement moyen gagnait tous les mois le salaire brut médian de 1800[38] euros, plus un revenu universel de 700 euros soit 30000 euros par an, il paierait 8% de 12500 euros (première tranche)+ 16% de 12500 euros(deuxième tranche)+24% de 5000 euros (troisième tranche) euros soit un total de 1000+2000+1200, soit 4200 euros d’impôts directs sur le revenu, et donc un impôt direct total de 4700 (revenu)+500 (capital), soit 5300 euros, soit 442 euros par mois largement compensés par un revenu de base de 700 euros par mois*. La somme est à discuter démocratiquement, mais semble compatible avec les prélèvements fiscaux et les économies résultant de la fin du financement de la plupart des aides sociales qui perdraient toute justification après l’instauration d’un revenu universel. C’est donc une somme de 8400 euros par an (imposables) moins 500 euros d’ISF, près de 7900 euros qui viendrait s’ajouter aux autres revenus de ce citoyen « moyen » ! L’exemple choisi, dans le cas d’une personne célibataire au revenu strictement médian avec un capital strictement moyen démontre qu’aujourd’hui c’est largement plus de la moitié de la population de notre pays qui gagnerait à l’instauration d’un Revenu Universel d’Existence. A chacun de faire le calcul pour ce qui le concerne !
En réalité il est difficile de connaitre à l’avance ce qu’apporterait pour les classes moyennes l’introduction d’un revenu universel. Les grands équilibres ne seraient pas bouleversés, mais c’est la certitude d’aller vers plus de clarté et de justice sociale. Les comportements individuels sont par nature très différents et les envies de consommation des uns ne sont pas celles des autres. Nous proposons, pour la France, comme pour le reste de l’Union européenne, et pourquoi pas ailleurs, d’aller vers plus de justice, même si cela ne suffira pas pour que disparaisse toute la pauvreté du monde!
Une étude serait intéressante à mener, ce serait celle qui permettrait de connaitre à partir de quel niveau de prélèvements les pertes pour la collectivité dépassent les gains que celle-ci peut en attendre. En effet c’est aux deux extrémités de l’échelle sociale que l’introduction d’un revenu de base pour tous, sera réellement sensible, avec son corollaire, des prélèvements accrus pour les très riches. Il est peu probable que massivement des personnes refusent un revenu donné à tous, mais quel est le seuil d’acceptabilité pour les nouveaux prélèvements nécessaires ? Marc Zuckerberg, le multimilliardaire créateur de Facebook se dit prêt à participer au financement d’un revenu universel, et à militer pour faire accepter cette idée autour de lui. C’est la confirmation que cette idée est à l’ordre du jour. C’est un droit universel qui devrait figurer en bonne place dans la constitution d’une Sixième République en France. Ce serait un puissant facteur d’intégration européenne si ce droit entait dans les pays de la zone euro. C’est une sécurité de vie, de consolidation de la paix, la fin de la peur du lendemain … plus de sérénité.
C’est une simplification de la fiscalité
C’est une mesure de justice sociale
C’est une Urgence Démocratique.
Jean-Noël Marzo
[1] Thomas More (1478-1534)
[2] André Gorz (1923-2007)
[3] Le revenu de base est aussi appelé revenu universel, revenu d’existence, revenu inconditionnel… nous utiliserons dans le texte l’ensemble de ces termes. Le mot d’allocation quelquefois proposé évoquant la notion d’assistance est à bannir.
[4] Discours du Bourget, François Hollande, 2016
[5] Mouvement Français pour le Revenu de Base
[6] In Le Revenu de Base. Un outil pour construire le XXIème siècle, Economie éditions Yves Michel 2016
7 Déclaration Universelle des Droits de l’Homme votée par l’ONU lors de sa création
[8] Certains sont évidents : la perte d’immenses privilèges pour une infime minorité (les 1%)
[9] Tu gagneras ton pain à la sueur de ton visage Genèse Chapitre III verset 19
[10] Le revenu médian correspond à celui qui sépare la population en deux groupes, 50% gagnent plus, 50% gagnent moins : il est était de 1772 euros par mois en France en 2016. Le seuil de pauvreté serait alors de 886 ou 1063 euros Pour Eurostat ces 60% sont aussi appelé taux de pauvreté monétaire. A ne pas confondre avec le revenu moyen
[11] C’est un argument souvent entendu à gauche.
12 le Capital. Critique de l’économie politique Karl Marx 1867
[13] Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen Organisation des Nations Unies 1948
[14] L’impôt sur le revenu incluant, dès le premier euro le montant du revenu de base est aussi un argument en faveur de non stigmatisation, affirmant les droits et les devoirs de tous.
[15] Lire Le travail. Histoire d’une idéologie Guillaume Borel Les Editions Utopia
[16] Le travail, quelles valeurs Préface de Dominique Méda Les Editions Utopia
[17] L’enjeu du salaire Bernard Friot La dispute Travail et salariat 2012
[18] Le facteur 12 Pourquoi il faut plafonner les revenus Carnets nord Essai Mars 2017
[19] Dans le programme de La France Insoumise, pour les élections présidentielles de 2017, il n’est pas prévu de tout prendre mais d’imposer à 90% les revenus supérieurs à 400 000 euros annuels, ce qui est bien différent d’un revenu maximum.
[20] Des dynasties financières se perpétuent sans aucun intérêt économique pour la société : les familles Peugeot, Dassault, Rothschild, de Wendel, certaines périclitent, d’autres apparaissent… la liste est longue
[21] Pour 64% des Européens l’introduction d’un revenu de base est positive, 51% des Français favorables à un revenu universel Enquête BVA mai 2016
[22] Beaucoup de propositions de financements sont présentées comme s’il ne s’agissait que d’une question secondaire, c’est important au contraire. Dans le texte, nous allons des plus hypothétiques vers les plus fiables.
[23] Plus de la moitié des recettes de l’état, 145 milliards estimés en 2016, auxquels il faudrait ajouter des taxes particulières comme la taxe sur les produits pétroliers, sur le tabac … source : Les comptes publics en France.
[24] L’ISF Un impôt populaire Le Parisien 26 octobre 2016
[25] Liliane Betancourt, deuxième fortune de France n’a rien payé au titre de l’ISF en 2015 !
[26] Le conseil constitutionnel contrôle la conformité des lois aux fondements de la cinquième République.
[27] Le patrimoine global des résidents en France ne peut être qu’estimé. Ce n’est qu’au moment des successions que des données plus précises ( ?) sont à la disposition de l’administration fiscale.
[28] Six priorités pour une fiscalité plus juste Alternatives économiques n°358
[29] Nous ferons une grande réforme fiscale. Programme pour les élections présidentielles de 2012
[30] Le capital au XXIème siècle Thomas Piketty. Editions du Seuil
[31] Hoang Ngoc Le Monde Diplomatique Octobre 2013
[32] Le capital au 21ième siècle éditions du seuil 2013
[33] Jean Gadrey n°358 juin 2016 Alternatives Economiques
[34] Quelles réformes de la fiscalité du patrimoine ? Guillaume Allègre, Mathieu Plane, Xavier Timbeau OFCE juin 2012
[35] La face cachée des prestations familiales. L. Régent Editions de l’Onde 2018
[36] Mouvement Français pour le Revenu de Base
[37] Alternatives Economiques Numéro à retrouver 2016
[38] Données provisoires 2016 Insee.