On entendra ici critique, par écrit appelant à échanges et discussions pour examiner le fond des choses au delà des contingences du moment....
Projet Peillon-Hollande ? Pour y voir clair dans les propositions éducatives hors supérieur du candidat socialiste pour la prochaine élection présidentielle , il semble nécessaire d'adjoindre aux trois points (36 à 38) de ses 60 engagements, des éléments de son discours à Orléans et l'interview donnée à Médiapart par celui qui sera peut-être le futur ministre de l'Education Nationale .
Commençons par dénouer le plus complexe, l'affaire des 60000 postes. Après Orléans et l'interview de Vincent Peillon, on y voit plus clair même si nous devons franchir un nouvel obstacle opposé à notre capacité d'entendement. Sur ce site Vincent Peillon affirme :
"On a beaucoup de chance parce qu’on a un candidat qui dit : « L'éducation c'est ma priorité. » Et qui y met les moyens nécessaires. Nous allons avoir 42 000 postes par an, 30 000 départs à la retraite remplacés et 12 000 créations nouvelles (pour tenir la promesse des 60 000 postes en plus) pendant quasiment cinq ans."
Pour dénouer les tenants et aboutissants de cette "nouvelle promesse" du candidat, j'ai déjà commis deux commentaires dans la file des commentaires sur l'article source que je retouche à peine ci-dessous.
42000 postes par an !!!! Comment ? D'abord avec le remplacement de 30000 profs partant à la retraite!
Quelle est cette blague ?
Les profs ne sont pas propriétaires de leurs postes. Ils existaient avant eux et leur survivront!! Un poste c'est par exemple: un poste de certifié de 18 heures en Histoire-Géographie au collège Léonard-Limosin à Limoges. Avant que votre serviteur ne soit nommé sur ce poste , il était tenu par un collègue aujourd'hui retraité et quand ce sera mon tour un autre ( il faut le souhaiter!!) me succèdera....le poste est donc la garantie pour les usagers d'heures d'enseignement délivrés sur un territoire par un personnel diplômé et recruté sur concours....voilà ce qu'est un poste!! Le poste est garanti d'ailleurs par le statut de l'enseignant qui n'est donc pas une affaire de professionnels de l'éducation mais une garantie pour la société, la garantie d'un corps de fonctionnaires d'Etat bien formés recrutés démocratiquement sur concours et répartis géographiquement sur le territoire en fonction de besoins dans la société, donc quand Mr Peillon balaye la question du statut d'un revers de main, il est un peu léger.
Mais pour revenir à mon propos, rien d'étonnant à cela, avec la supercherie des 42000 postes par an !!! Pour 30000, ils sont déjà là car (Soyons répétitifs, nous serons pédagogues!!) le prof n'est pas propriétaire de son poste.
Les 12000 qui restent sont donc le 5è des 60000 promis sur la législature.
Effectivement,les 30000 postes "créés" par Mr Peillon correspondent aux départs en retraite de l'Education Nationale chaque année approximativement comme le montre ce lien où l'actuel ministre répond à une question d'une députée à l'AN.On y retrouve grosso-modo le chiffrage de 30000 soit:
Environ 9500 départs d'enseignants dans le primaire.
Environ 14500 dans le secondaire
Et environ 5000 pour tous les autres corps soit environ 30000......donc sur les 42000 , il ne reste en réalité que les 12000 (1/5è de la législature) par an.
Si on adjoint au nouveau chiffrage Peillon (Qui prend les mêmes chiffres mais rebat les cartes pour donner un effet "moyens en plus" avec ces 42000 postes par an!!!) l'architecture d'ensemble du projet du candidat socialiste , quel équilibre d'ensemble trouve-t-on ?
Sur les 60 engagements du candidat Hollande , les points 37 et 38 se répètent pour dire qu'il faudra mettre le paquet sur la maternelle et la primaire, ce que confirme Mr Peillon, après le point 36 où l'on parle 60000 recrutements.
Une inquiétude sur le maintien des moyens actuels sur le collège et le lycée point. Pourquoi ? Si la "barrière Peillon" des 30000 départs en retraite est dépassée les prochaines années, il pourrait il y avoir une diminution des moyens au collège et au lycée......Notre inquiétude est renforcée par la légèreté avec laquelle Vincent Peillon considère la situation dans le secondaire car parait-il .... rien ne presse dans ces domaines.
Prenant donc par le bout des 42000 qui m'avait fait sursauter nous arrivons à un projet global dans lequel sans conteste un certain volontarisme se mettra en place pour rectifier le tir au primaire. Cela prend même la forme d'un pari tant le reste du projet en direction du secondaire est maigre, voire inquiétant!!
Hormis, quelques vagues promesses sur les quartiers difficiles, les réformes successives au collège et au lycée sont actées. L'objet de ce billet n'étant pas un état des leiux exhaustif, je renvoie à un article sur Bayrou qui m'avait donné l'occasion d'exprimer tout le bien que je pensais de son oeuvre lors de son passage à l'Education Nationale. Nous vivons toujours dans ce collège là!!
Pour ce qui concerne le lycée, c'est encore mieux (façon de parler)!! Ici la réforme Chatel trouve une certaine considération: "Il y a aussi eu une réforme du lycée qui n'a pas produit tous ses effets, même si elle n'était pas stupide dans sa conception, mais qui a été très pénalisée par l'absence de moyens." affirme VP ici même. Ceci est idiot, tout simplement car affirmer que la réforme Chatel est bonne à condition d'y mettre des moyens, c'est ne rien comprendre à la nature profonde de la réforme Chatel, pompe aspirante à moyens de fonctionnement dans le lycée. Et si on considère que la réforme Chatel est mauvaise sans y mettre plus de moyen, alors on y met des moyens car sinon on accepte de poursuivre de mauvaises réformes et on est donc loin du rien ne presse!!
Au final, le projet Peillon-Hollande ne me parait pas satisfaisant. Mettre le "paquet"(revenir à l'existant de 2007 au final, pas de quoi se relever la nuit!!) sur le 1er cycle , pour faire reculer l'échec dans les apprentissages fondamentaux et espérer le faire reculer ainsi, par rebond, dans le secondaire sans le réformer profondément ne fonctionnera pas car le collège et le lycée actuels produisent de l'échec intrinsèquement.
Ils en produisent tout simplement car la droite au pouvoir a mis en oeuvre de mauvaises réformes qui les ont saccagés. Ces réformes ont eu pour but une mise à niveau de notre système sur le "moule" anglo-saxon eurtopéen en matière d'éducation ainsi le fameux "socle de compétences"....nous ne pouvons qu'être inquiets lorsque le candidat du Parti Socialiste s'en fait un vibrant défenseur au point 37 de son programme.La compétence est à l'apprenant ce que l'employabilité est au citoyen. Compétent aujourd'hui, employable demain et donc responsable de son bonheur ou malheur.....on entre ici dans des considérations qu'il serait fort utile de développer ailleurs.
Pour honorer la conception française de l'éducation, en ce tricentenaire de la naissance de JJ Rousseau, il y a très certainement beaucoup mieux à faire que de se contenter de ce bien timide projet.