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Billet de blog 19 mars 2019

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6 -La démagogie électorale, la compétence gouvernementale et l'invention du réel

Or, pour que cette vérité puisse construire le monde, il faut qu'elle passe de l'individuel au collectif. Qu'elle soit sélectionnée par le peuple sinon positivement, du moins négativement. Mais pour qu'elle puisse être sélectionnée, il faut d'abord qu'elle soit inventée par un ou des individus. C'est là que le bât blesse ! Entre le premier temps démagogique de la prise en compte de l'arbitraire..

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Illustration 1

LA DYNAMIQUE DÉMOCRATIQUE - 6

La démocratie est représentative, ou elle ne l’est pas !

L’expression collective et la vérité sont antinomiques.


La vérité ne peut pas relever du collectif, du peuple.

La vérité est du ressort de l’individu.

Le peuple a toujours tort mais il est souverain, il faut qu’il soit souverain parce qu’il a tort…

6 - La démagogie électorale, la compétence gouvernementale, et entre les deux, « l'invention du réel »...

Or, pour que cette vérité puisse construire le monde, il faut bien qu'elle passe de l'individuel au collectif.
Qu'elle soit sélectionnée par le peuple sinon positivement, du moins négativement.
Mais pour qu'elle puisse être sélectionnée, il faut d'abord qu'elle soit inventée.., par un ou des individus...
C'est là que le bât blesse !
- Entre le premier temps démagogique de la prise en compte de l'arbitraire collectif.
- Et le deuxième de la mise en œuvre d'une politique rationnelle.
- Il y en a un troisième : celui de "l'invention" d'une politique efficace.

Je dis bien l'invention d'une politique efficace, et non l'établissement d'un programme de gouvernement, parce que si cette invention n'est pas incluse dans ce programme, celui-ci restera inefficace.

  • Il s'agit bien d'une « invention du réel », qui consiste à anticiper la société à venir, à l'imaginer, à la créer donc.

Il ne s'agit pas de prolonger la société présente, il s'agit d'inventer la prochaine.
Prolonger la société présente, les gens compétents savent très bien le faire, mais imaginer la prochaine société ne relève pas de leurs compétences.
La compétence découle d'une réalité qui existe déjà, donc un programme politique établi par les compétents prolonge cette réalité.
Or pour résoudre les problèmes de la réalité présente, il faut en sortir.

La compétence n'est pas un critère de décision, elle est un critère d'exécution.

On a besoin des gens compétents mais pour mettre en œuvre la politique efficacement, mais pas pour l'inventer.
Se prévaloir de leur compétence pour prétendre savoir quelle politique il faut mettre en œuvre, est une imposture !
Ce qui ne signifie pas que les compétents soient incapables d'invention, mais ils ne peuvent pas la légitimer par leur compétence...

L’invention de la société future est cruciale, faute de quoi on subit le présent sans le maîtriser

Inventer, créer la société à venir, consiste à mettre au jour, à réaliser les potentialités qui arrivent à maturations dans le long processus d'évolution historique, en cohérence avec le monde tel qu'il se présente.

Ces potentialités et ce monde actuels sont assez simples à résumer :

1 L'individualisation
L'autonomie et la liberté que l'individu a acquises lui donnent un sentiment de légitimité qui lui rendent de plus en plus insupportables les légitimations grégaires qu'on veut lui imposer, qu'elles soient religieuses, nationales, ethniques, sociales, etc...

2 La mondialisation
Elle met en relation et donc en concurrence, de plus en plus, tous les secteurs de la vie. Pour les consommateurs et les citoyens, c'est formidable ! Mais pour les producteurs, les salariés, elle est une menace pour leur production et leur emploi.
Cette nouvelle donne nécessite une capacité d'adaptation et une protection différentes des précédentes.

  • Pour que l'individu puisse vivre sa liberté en sécurité, il faut que sa protection soit attachée à son individualité.

Alors que la protection passée et actuelle sont une protection grégaire, qui protègent le salarié par son appartenance à une structure de production, par un type de contrat de travail, ou par un statut : l'adaptation dans ce cadre grégaire se réalise par la sélection entre les salariés, CDI et précaires :

  • Ce sont les précaires qui assurent la protection des CDI ; sans les précaires, la sécurité de l'emploi des CDI n'existerait plus.

Avec la mondialisation, la précarisation des emplois se généralise : garder une sécurité de l'emploi grégaire dans ce cadre devient suicidaire...
Chacun se sent menacé, surtout en fin de carrière, si ce n'est pour soi, c'est pour ses enfants ses petits-enfants... Même si une bonne formation vaut mieux, on voit bien qu'elle n'empêche pas le déclassement, l'exclusion sociale...

Quelle sont les propositions des politiques ?

- La droite sarkozyste s'emploie à contraindre les salariés à se soumettre à la réalité du monde sans leur proposer la moindre solution à leur insécurité nouvelle ; elle se contente de casser les anciennes protections. Ce n'est pas forcément par "anti-socialité", mais elle observe la nécessité des entreprises de s'adapter au contexte économique, et pour elle, les conditions sociales sont secondaires.
De la part de droite c'est normal, on ne peut pas s'attendre à ce qu'elle adopte le point de vue des salariés.
Aussi n'invente-t-elle rien !

- L'extrême gauche qui est plutôt libertaire, est celle qui réclame le plus la protection grégaire de l'emploi, qui est anti-libertaire !
De sa part c'est normal, elle conteste le système dans lequel on vit, et elle n'en assume pas la responsabilité, ni la cohérence.
Elle n'invente donc rien !

- Mais le plus grave, c'est que la gauche de gouvernement ne le fasse pas non-plus, la RTT a été un prolongement de cette protection grégaire.
Ce n'est pas parce qu'elle ne se soucie pas des salariés, non-plus parce qu'elle n'assume pas la réalité du monde actuel, c'est parce qu'elle est incapable d'imaginer l'articulation de la sécurité individuelle de l'emploi des salariés, avec la compétition des entreprises entre elles.

  • Un programme de gouvernement qui n'inventera pas cette articulation restera inefficace, n'apportera pas le sentiment de sécurité nécessaire pour bien vivre notre liberté...

À suivre…

Jean-Pierre Bernajuzan

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