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Billet de blog 26 décembre 2024

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Le résistible Article 16

et le ballon d'essai de Bruno Millienne

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Je ne suis pas de ceux qui accorde beaucoup d'importance à la psychologie des dirigeants politiques.

Ainsi, je n'explique pas les actions du Président Macron par un quelconque déséquilibre mental, par le fameux "Ego surdimensionné", un manque d'intelligence ou de connaissance du terrain dans lequel il évolue.

Les hommes, ou femmes d'État, les dirigeants politiques agissent contraints par des faits.

Le principal de ces faits, pour ce qui les concerne, c'est l'état de l'économie capitaliste mondiale. On comprend que pour cette raison, la situation du chancelier allemand Olaf Scholz est tout à fait comparable à celle de notre Emmanuel Macron, et cette comparaison s'étant à tous les dirigeants, qu'ils soient prétendus "de gauche" comme Keir Starmer, Lula da Silva, Pedro Sanchez ou Olaf Scholz, de droite comme Emmanuel Macron ou Justin Trudeau, d'extrême-droite comme Giorgia Meloni, Javier Milei ou Donald Trump.

Tous, même les plus progressistes, sont des dévots de "l'économie de marché", tous sont dans la même nasse. Je ne l'expliquerai pas aussi clairement que Romaric Godin ne l'a fait dans un récent article. La cause la plus claire de l'interminable agonie du capitalisme, c'est son succès.

Ils et elles ont tant pillé, tant exploité, que la bête humaine n'a plus, aujourd'hui, que de la peau sur ses os. Dans la plus grande partie du monde, les gens qui produisent, que ce soit du blé, de la toile, de la viande ou de l'acier n'ont pas de quoi nourrir leurs enfants, et dorment dehors.

Imaginez le souci de l'un des parasites qui nous gouvernent, et qui dispose d'une somme, par exemple cent millions. Il n'achètera pas des actions d'une entreprise prospère, parce que de telles actions coûtent cher en regard de ce qu'elles rapportent. Il n'investira pas dans un projet risqué, parce que ces projets, souvent, ne dépassent pas la deuxième année de vie. Il acquerra peut-être un Yacht pour cette somme, ce qui, au moins, lui apportera sans le moindre doute une satisfaction narcissique : il y recevra ses ami(e)s, ses rivales et rivaux... Certes, le coût d'achat n'est pas tout : il faut compter, pour un Yacht de cette valeur, cinq millions par an d'entretien et de fonctionnement.

L'accumulation de l'extrême richesse à un pôle et de la plus noire misère à l'autre pôle frappe toute la civilisation de stérilité.

Partout dans le monde, la productivité stagne, la courbe de croissance tend vers un plat, les taux de croissance sont presque nuls compte tenu des immenses valeurs déjà installées, les infrastructures vieillissent et leur rajeunissement serait hors de prix.

Macron, Starmer, Meloni et les autres ont une épée dans le dos. Le cas français est éclairant, avec la violence de la caricature. Il aurait pu débaucher quelques éléments du PCF et du PS s'il avait pu céder d'un pouce sur la taxation des dividendes, la hausse du SMIC, la réforme des retraites... Mais ceux qui l'ont fait élire lui ont donné le mandat impératif de ne céder sur rien. Et pourquoi ? Parce que le capitalisme international est au bord extrême d'un effondrement.

C'est ce qui me permettait, (voir mon billet de fin juillet 2024) d'affirmer que Macron, quoi qu'il fasse, ne résoudrait pas son problème, parce que ce problème est sans solution.

Cela me permettait également d'affirmer que le gouvernement Barnier ne passerait pas la Noël. Cela me permet de dire aujourd'hui que le gouvernement Bayrou n'ira pas loin, mais cette fois, j'avoue que c'est une banalité...

En juin de cette année qui se termine, Emmanuel Macron a dissout l'Assemblée Nationale, clairement parce qu'elle pouvait s'opposer aux réformes nécessaires à la survie du Capital : à preuve la bronca limite suscitée par la réforme des retraites.

Cette action s'est avérée une erreur : la nouvelle Assemblée est bien moins gouvernable que la précédente. Que Macron commette une faute stratégique ne signifie pas qu'il soit sans ressources. Durant les six mois qui ont suivi, il a tout misé sur l'éclatement du N.F.P.

Barnier tombé, il a pu envisager que Bayrou, moins marqué à droite, serait plus heureux dans la même tâche. Mais non.

Barnier est tombé dès le premier acte : le budget. Bayrou doit faire passer le budget. Très probablement, l'AN ne votera pas son budget. Le budget passera sous 49.3.

Ensuite, censure ? Ici surgit la menace très claire de Bruno Millienne : s'il y a censure, il restera l'article 16, qui donne au président les pouvoirs d'un dictateur, conformément à la constitution de la Vème République.

Cette menace peut faire plier un nombre suffisant de parlementaires, comme elle peut au contraire les raidir, tant il est clair qu'une proclamation de l'article 16, par lequel le pouvoir se défend dans une situation pré-insurrectionelle,  ne serait pas justifiée par les circonstances.

Si les parlementaires s'inclinent, nous aurons une situation de "chantage à la dictature", équivalant à une "dictature fantomatique".

S'ils ne s'inclinent pas, que peut faire Macron ?

Je considère comme peu probable qu'il propose le poste de premier ministre au NFP, pour "faire la preuve" de l'impuissance de ce côté là, aussi... Car même s'il ne devait gouverner que huit jours, le NFP laisserait une empreinte durable.

Ou qu'il donne le pouvoir au RN, ou à la frange ciottiste, avec un accord de non censure du parti de Wauquier et de celui d'Edouard Philippe et d'une partie encore de Ensemble et du Modem... ? Fragile.

Est-ce que l'article 16 lui permet de gouverner par décrets et par ordonnances ? Jusqu'à quel point ?

C'est ce qu'il faut étudier, car on y trouvera la réponse à la question : qu'est-ce qui nous attend ?

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