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Billet de blog 9 juin 2015

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Deux poids, deux mesures !

Le couple ville-stade serait-il le fruit d’un mariage sans nuage ? Rien n’est moins sûr. On pressent en effet que ces énormes sommes d’argent, ces grands territoires que l’on transforme pour accueillir l’objet entouré de ses parkings et de ses satellites, la différence de traitement apparente entre la ville existante et ce qui se développe là, en dehors, tout cela pose question. 

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Le couple ville-stade serait-il le fruit d’un mariage sans nuage ? Rien n’est moins sûr. On pressent en effet que ces énormes sommes d’argent, ces grands territoires que l’on transforme pour accueillir l’objet entouré de ses parkings et de ses satellites, la différence de traitement apparente entre la ville existante et ce qui se développe là, en dehors, tout cela pose question. 

On pressent en effet que ces énormes sommes d’argent, ces grands territoires que l’on transforme pour accueillir l’objet entouré de ses parkings et de ses satellites, la différence de traitement apparente entre la ville existante et ce qui se développe là, en dehors, tout cela pose question. D’autant plus en une époque de vaches maigres, pour les collectivités en particulier, attentives à dépenser leur argent au bon endroit, sur le bon sujet, quand les métropoles disent préserver un maximum d’espaces naturels ou agricoles, quand les mêmes entendent favoriser les modes doux…On ressent comme un déséquilibre entre les quelques pistes cyclables que l’on crée avec difficulté dans la ville urbanisée et l’immensité des parkings construits pour accéder aux stades, entre le soin tatillon avec lequel on préserve ici un Espace Boisé Classé et la manière radicale dont on « prépare » le terrain pour la construction de l’équipement, entre l’attention affichée que l’on porte à la conservation de l’attractivité d’un centre-ville et la soudaine offre commerciale disponible à proximité du stade et destinée à en équilibrer le coût, entre les restrictions budgétaires que l’on s’impose partout et les sommes en jeu dans la création d’un stade. Une telle construction serait-elle un monstre qui bouscule les échelles citadines ? Nous ferait-elle changer de dimension urbaine ? Une anecdote : les usagers désirent la plupart du temps garer leur voiture à côté de chez eux, ou devant la boulangerie. Ils rechignent à faire 50m à pied. Or, dés lors qu’ils font leurs courses dans un hypermarché, ils sont conduits à marcher 200m ou plus. Refus catégorique d’un côté, ce que tout professionnel de l’aménagement vous confirmera, acceptation de l’autre…L’accès aux stades les oblige à cheminer bien plus longuement encore, ce qu’ils font volontiers. Cela n’illustre t’il pas un changement d’échelle urbaine, qui conduit du coup à une évolution mentale bien difficile à réaliser en dehors de ce contexte? Prenons l’exemple du débat public sur la Tour Triangle à Paris. Y-a t’il eu de telles discussions lors de la conception de la dernière génération de stades en France ? Osons l’hypothèse que c’est parce que l’on a affaire à un équipement populaire, pas à des bureaux, des logements ou un édifice commercial ou culturel.

Un stade est, pour un professionnel de l’urbanisme, intéressant à plus d’un titre.

Déjà, sa gestion obéit à des mécanismes qui rappellent ceux des grandes manifestations dans les villes. A l’image de la Grande Braderie de Lille, il faut pouvoir accéder au cœur de l’événement. En général on favorisera plutôt les transports publics et la marche et, à l’image de la desserte des nouveaux quartiers urbains, il est fréquent que le tram ou le métro soient prolongés jusqu’au nouvel équipement sportif, comme c’est le cas pour le Grand Stade de Lyon ou celui de Bordeaux. Ceux qui viennent de loin devront, et ils l’acceptent, garer leur voiture à une distance compatible avec le très grand nombre de spectateurs dont le flux est concentré dans le temps et dans l’espace et qu’il faut pouvoir accueillir. En son temps, la RATP faisait des analyses pour déterminer de quelle dimension devaient être les couloirs du métro parisien pour recevoir la foule aux heures de pointe. Dans un stade l’on doit pouvoir rentrer aisément, il faut aussi être capable d’en sortir rapidement. Celui de Saint-Denis se vide de plus de 80000 spectateurs en 15 mn, 8 mn pour le nouveau stade de Bordeaux qui, il est vrai, est d’une capacité moindre. Durant la Fête des Lumières, à Lyon, face à l’énorme foule compacte qui visite les illuminations en général concentrées dans la Presqu’île (plus de 3 millions de personnes en 4 jours), il existe des sens de circulation pour les piétons, seul moyen pour qu’il n’y ait pas engorgement dans un quartier qui ne fut évidemment pas conçu pour cela.

Tout organisateur de spectacle dans la rue sait qu’il faut aussi assurer la sécurité. Il existe alors, dans les Stades comme dans la Grande Braderie, des circuits réservés pour les pompiers, les médecins, sortes de parcours dans les parcours qui permettent que les secours interviennent rapidement. En ce sens, un stade est une véritable machine urbaine à laquelle il faut accéder et qui doit fonctionner sans impairs, sans accrocs et selon des conditions qui procèdent forcément de l’exceptionnel. En effet il est en quelque sorte en sommeil une grande partie du temps et sa machinerie tourne au ralenti, et puis de manière périodique, il fonctionne à plein régime. Son aspect, son architecture ne sont alors qu’une enveloppe certes très visible mais qui ne représente pas la complexité des mécanismes contenus à l’intérieur, ni celle qui lui est nécessaire à l’extérieure. La comparaison avec un paquebot n’est pas sans justesse. Mais un paquebot qui serait accessible en continu, pas seulement arrivé au port. La différence est aussi dans le fait qu’il ne transporte pas des touristes aisés mais une société populaire, égalitaire à première vue puisqu’en dehors des VIP, tous les sièges sont les mêmes. Mais si l’on y regarde de plus près, l’emplacement où ils sont situés témoigne d’une société de spectateurs beaucoup plus complexe, avec ses regroupement affinitaires, ses quartiers privilégiés, ses lieux relégués…

L’enveloppe d’un stade raconte un tout autre récit, politique et urbain. Elle célèbre le prestige, la représentation des pouvoirs, la célébration identitaire, le spectacle... Il faut qu’elle se voit ! Les contradictions alors entre sa place dans la ville et le banal d’une cité montrent le danger que tout ne soit mesuré, décidé qu’à l’aulne du nombre de personnes qui se déplacent, qu’à la mesure du succès qui peut être escompté. Une cité qui ne célèbrerait que les grands rassemblement populaires, le spectaculaire, ce qui fait image et qui, oubliant la discrétion de la proximité, la légèreté du spontané, l’humanité du quotidien aménagerait la ville comme un stade, à grande échelle…Sujet moins social que politique et culturel, un certain nombre de villes, nées par exemple dans les sables, ne sont pas bien loin d’avoir choisi ce concept pour fondation. Ailleurs, on  note le soin accordé à tout ce qui touche à l’accès au stade, non comme lieu de pratique mais comme lieu du spectacle, considéré comme vital au même titre que manger, boire ou se loger. Et l’on y met les moyens dans tous les sens du terme, même si les utilisateurs vivent dans des bidonvilles !  

Dans la symbolique urbaine, l’on se rend à l’équipement sportif comme l’on va au centre-ville. Et dans un cas comme dans l’autre, ce qui s’y passe change, évolue au gré des saisons, des jours. Il joue donc un rôle comparable à un grand espace public central de ville ou d’agglomération, même s’il est situé en périphérie. De ce fait, il n’échappe pas à un des sujets récurrents de l’urbain qui est la concurrence entre les lieux, entre les activités. Les villes n’ayant pas une possibilité illimitée d’usage de leurs espaces magistraux, de leurs équipements principaux, de leurs lieux actifs, on ne peut indéfiniment proposer une offre de pratiques nouvelles. Elle risque d’affaiblir celles qui existent déjà et que pourtant l’on souhaite renforcer. Un exemple est donné par le commerce et la multiplication des hypermarchés de périphérie qui vident les établissements de proximité et siphonnent les centre-ville d’une partie de leur activité. S’intéresser aux stades conduit donc à devoir affronter les contradictions entre la recherche qu’ils soient le ferment d’une certaine urbanité en dehors des principaux évènements, et le danger de rompre les fragiles équilibres urbains au sein d’une cité.

L’on a tendance à développer à proximité des services, des espaces de loisir…Le but est double. Il s’agit d’éviter que les sites soient déserts en dehors des jours de match et donc de profiter de l’opportunité d’un tel équipement pour faire un « morceau de ville ». Il est aussi de fructifier les investissements réalisés et d’assurer une viabilité économique en ajoutant des commerces, agrégeant d’autres fonctions (culture, évènements, hôtels…). Les collectivités se retrouvent alors dans des contradictions qu’elles-mêmes génèrent. D’une part elles mènent des politiques de re-développement  de leur centre, améliorant les espaces publics, rénovant l’habitat, concentrant des équipements, favorisant le commerce en limitant les grosses implantations commerciales périphériques. D’autre part elles créent la concurrence à leur propre projet en favorisant l’implantation d’activités urbaines autour du stade. Elles prennent ainsi le risque bien réel que le succès du stade ne conduise à un dépérissement du centre, malgré les investissements consentis.

La réponse n’est pas évidente. Elle fait appel à une véritable stratégie urbaine, délicate et sophistiquée, attentive à ce qu’il y ait complémentarité entre les sites, entre les offres de services. L’attractivité de l’un doit être calculée pour ne pas pénaliser celle de l’autre, si tant est que ce soit possible tant il y a d’acteurs impliqués, d’intérêts publics et privés en jeu. Le risque est de voir les efforts accomplis pour rien, que le centre recommence à se dégrader et se vider. A un moment où les villes ne sont guère prospères au regard de la situation d’il y a quelques années, on voit l’importance qu’il y a à mettre l’argent public sur ce qui va vraiment apporter à la ville, ce qui va traduire dans les faits le projet  politique de la collectivité et son application urbaine. Le but est d’éviter d’afficher en toute bonne foi un projet et que la réalité conduisent à un effet contraire. La ville ne se raconterait plus alors par son centre, son histoire, ses quartiers, sa complexité et ce qui est commun, sa personnalité en quelque sorte, mais elle s’assimilerait à une image concentrée autour de son stade devenu emblème, marque.

Petit ou grand, la construction d’un tel édifice n’est neutre ni pour les finances publiques ni pour la qualité d’une cité. Il s’agit certes d’un acte, d’un choix politique. Mais il mobilise en parallèle et pour un temps long les moyens humains et les budgets. De ce fait, il affaiblit l’action sur d’autres thèmes de la vie publique qu’ils soient éducatifs ou par exemple culturels. Une conséquence est souvent la diminution des moyens pour la qualité de la ville, pour la gestion quotidienne, la limitation des  interventions sur l’habitat, sur la rénovation les espaces publics, la maintenance des équipements, la propreté…Sans parler des coûts liés à la gestion à venir, lesquels risquent de grever sérieusement les capacités financières futures. C’est une des raisons pour lesquelles plusieurs projets partenariaux publics/privés ont vu le jour ces dernières années, notamment en France et concernant les stades rénovés ou construits à l’occasion de la Coupe d’Europe 2016. C’est un autre sujet très controversé, avec ses supporteurs qui font valoir leur pragmatisme et l’impact diminué sur les finances publiques, et ses contempteurs qui pointent les incertitudes futures. Reste que le risque n’est pas mince que le choix politique de réaliser un tel équipement n’ait des conséquences sur le manque de gestion et donc le vieillissement accéléré de la ville existante. Il y aurait le stade qui fait image sur lequel l’on consentirait les moyens et le reste qu’on laisserait de côté.

En général, pour pallier en partie l’éloignement entre le stade et la cité, l’on tente de rendre urbaine son implantation en le rapprochant, quand cela est possible, de la ville. Mais cette démarche est souvent illusoire tant il y a peu de foncier disponible, sans parler des flux automobiles ou piétons que génère un tel équipement et qui ne trouvent guère leur place dans des centres souvent saturés. Ils se retrouvent donc souvent dans une situation insulaire, du moins au moment de leur construction. Tout juste peut-on chercher à utiliser des infrastructures existantes ou à mutualiser les parkings avec ceux d’autres structures. A Bordeaux, le nouveau stade utilise en partie les parkings du Palais des Congrès. A Saint-Etienne, le Stade Geoffroy Guichard partage le stationnement avec le Zénith, la Cité du Design ou la patinoire, dans un grand site d’équipement lourds devenant de plus en plus urbain : la Plaine Achille. Il utilise d’ailleurs au mieux le tram existant, un système de larges promenades ayant été réalisé, qui permet au piéton de se rendre confortablement d’un lieu à un autre, qu’il vienne du tram ou d’un parking. Souvent les stades sont hors de la ville. Doit-on alors considérer cela comme irrémédiable, définitif ou, à l’image du Stade de France ou de celui de Saint-Etienne, celle-ci va t’elle les rattraper pour les englober ? Les collectivités cherchent à favoriser cette mutation mais parfois l’évolution naturelle du territoire y conduit. La tendance actuelle est plutôt de « faire la ville sur la ville », du moins dans les slogans ou les affichages. Mais si l’on se réfère aux 30 dernières années, qui ont vu s’étendre très largement les aires urbanisées, on peut penser sans déraison que ce qui est en dehors risque bien de se retrouver au-dedans. N’est-ce pas d’ailleurs la situation de plusieurs de ces stades considérés comme obsolètes et que les grands équipements actuels visent à remplacer : le stade de Gerland à Lyon, plusieurs fois rénové, agrandi, considéré maintenant comme un élément de patrimoine, le Stade de Bordeaux, désormais fermé et pour lequel l’on semble chercher un avenir. Que va t’on faire de ce qui pourrait désormais devenir une friche ? La réponse n’est pas simple quand on sait qu’il s’agit d’architectures très fonctionnelles, liées spécifiquement à des usages sportifs. Comment va t’on retrouver un sens, une économie, des usages à ces désormais grandes cathédrales sans objet ?

L’on a considéré comme patrimoine d’anciennes usines. On est attentif à l’histoire industrielle dont elles témoignent. Doit-on faire de même de ces nouveaux laissés pour compte de l’évolution ? Le stade de Gerland a été conçu à l’origine par Tony Garnier, d’autres architectes souvent de grande qualité ont créé en leur temps ces édifices… à l’image d’autres lieux publics, ils sont empreints aussi d’une histoire, celle locale et parfois nationale du sport, celle aussi que chaque spectateur s’est construite au gré des matchs auxquels il a assisté, des moments d’enthousiasme dont il a été à la fois le témoin et l’acteur. La question risque bien d’être posée de leur patrimonialisation.  

Curieusement, les nouveaux stades semblent faire peu de cas du territoire dans lequel ils s’inscrivent. Bien sûr le geste architectural est là, la créativité de leurs concepteurs s’affiche. Mais ils racontent bien peu l’environnement qui les accueille. Une exception toutefois : celle du nouveau stade de Bordeaux, dont les nombreux poteaux verticaux font référence aux forêts de pins des Landes. Serait-ce que ce type d’édifice conduirait plus aisément, dans notre pays pourtant féru de culture et riche de son patrimoine, vers ce qui est en cours dans une grande partie du monde à savoir une dé-contextualisation  de l’architecture, une mondialisation de la forme ?

L’explication vient en partie de la rapidité avec laquelle ils sont souvent construits, pour une manifestation qui ne souffrira pas de retard. Ils sont de plus situés hors les murs, souvent sur des terrains peu valorisés, qui invitent guère leurs commanditaires et leurs concepteurs à aller puiser une source d’inspiration dans le lieu, dans la mémoire. Ils sont en quelque sorte déterritorialisés, peut-être interchangeables pour peu que l’on s’attache à l’image et non à ce qui fait leur contenu : les fonctions, le mode d’accès…Contrairement à la doxa ambiante qui se réfère aux racines, à l’histoire, à l’identité et oriente en ce sens partiellement les choix urbains contemporains, ils échappent à la mémoire du lieu dans lequel ils s’inscrivent. Comme s’ils étaient totalement intégrés au style international, lequel fait peu de cas du contexte, de l’ancrage local. Comme si le sport et les lieux qui le célébraient étaient au-dessus du commun, universels en quelque sorte. Mais cette universalité est datée car exactement de maintenant, du moment. Il y a d’autant plus de quoi s’étonner d’ailleurs quand on sait combien le sport est un des marqueurs de l’appartenance à des territoires (villes, régions, Etats), quand il n’est pas le prétexte à des querelles de clochers récurrentes.

De ce fait, les dimensions culturelles étant peu présentes en dehors de la créativité même des concepteurs, on prévoit quelques œuvres d’art censées apporter plus de sens, de profondeur aux édifices… Eut-il été possible et même souhaitable de viser à un ancrage culturel plus fort, de leur faire raconter le territoire par exemple ? Ils sont souvent dans des lieux hors de la ville centre. Parfois comme à Saint-Denis, ils sont plus proches de ce que l’on appelle la banlieue que des quartiers aisés. Situés, ils le sont géographiquement mais ne le sont pas forcément culturellement et encore moins socialement. Un des enjeux est bien alors qu’à défaut d’une fine intégration spatiale, ils s’intègrent dans l’espace social qui les entoure et c’est une des dimensions de l’urbanisme. A Saint-Denis, les collectivités conduisent une véritable stratégie de rapprochement du stade avec les écoles, les associations, les habitants, les jeunes...Une telle relation ne peut se faire naturellement, sans être le fruit d’une initiative, sans qu’un coup de pouce soit donné, que les liens soient facilités. Alors les jeunes sont mobilisés à chaque grand événement sportif. Lors des grands moments internationaux, des évènements comme la carnavalcade sont organisés qui impliquent des habitants des quartiers et des créateurs. Le centre-ville a été spécialement aménagé pour favoriser le lien par les espaces publics avec le stade et donner envie aux utilisateurs de pratiquer ses cafés, ses restaurants. Les stations de tram, de métro sont communes à l’un et à l’autre, favorisant la contiguïté  entre ces territoires. Les places centrales accueillent, au pied de la Basilique, des retransmissions gratuites de matchs en extérieur, elles vibrent au gré des résultats sportifs et vous pouvez regarder tel match allongé sur une chaise longue devant un écran que regardent en même temps des centaines de personnes…Bien d’autres initiatives encore qui font que le Stade de France est accessible au plus grand nombre, non pas naturellement mais du fait de l’action publique, de la volonté municipale affichée que le lien soit étroit, que l’équipement fasse partie de la ville.

Il y a derrière cela une dimension stratégique et politique. Décider d’un stade c’est  faire un choix spécifique qui prétend offrir ce service et non un autre à la population. Encore s’agit-il d’une certaine population et non de toutes les catégories sociales. D’ailleurs, sans vouloir simplifier l’argumentaire ou nier l’intérêt des filles pour le sport, celles-ci ne semblent pas être le cœur de cible.

L’on engage la création d’un stade souvent pour des raisons de communication urbaine. Attention cependant que n’est pas le Guggenheim de Bilbao qui veut. De tels projets de grande ampleur ne sont pas toujours des leviers de développement. Leur multiplication conduit plus à la banalisation du spectaculaire qu’à renforcer l’attractivité des territoires. Elle peut aussi avoir pour conséquence un asséchement des finances publiques et un appauvrissement de la vie urbaine. Il n’est pas enfin inutile de rappeler que d’autres sujets que le sport doivent trouver leur place dans les priorités…

En tout cas, dés lors que se construit un stade, il convient d’être attentif à de multiples questions qui touchent en partie l’urbain et ne sont qu’esquissées ici. L’on doit considérer que ce ne peut être seulement une fin politique mais au contraire le début d’une politique. Le maire bâtisseur doit se montrer maire animateur de son territoire pour qu’une telle création prenne vraiment un sens, son sens.

Paris le 9 juin 2015

Texte à paraître dans l'ouvrage "Le devenir Stade du monde", sous la direction de Christian Ruby, philosophe. 

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