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Billet de blog 2 juin 2015

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Un vaudeville yéyé à la Loge ? Oh yeah

Sous le titre « J’irai twister sur vos tombes », la compagnie des skieurs de fond présente un autoproclamé « vaudeville yéyé » qui fait salle comble à la Loge, 77 rue de Charonne. Il faut se réjouir d’un tel succès dans un lieu qui, comme d’autres, traverse des turbulences financières mais tient le cap : celui de la création.

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C’est à la Loge que nous avons découvert le spectacle de Nicole Genèse Ciel mon placard qui retournait les règles du théâtre de boulevard avec maestria. C’est à la Loge que le groupe LagAlerie a dégrossi son spectacle déjanté Vivipares. Le spectacle de la compagnie des skieurs de fond qui entend jouer avec des genres, n’a ni les qualités d’écriture et de jeu de Nicole Genovèse, ni la folie des filles du groupe LagAlerie, mais c’est un spectacle qui se laisse voir avec plaisir.

Les castagnettes de la mort

Le charme, mais aussi la limite du spectacle, c’est d’avoir voulu trop inoculer de yéyé dans le vaudeville, la piquouze opère mais frise l’overdose. Trop de chansons tue la chansonnette. Certaines mélodies sont toniques ; d’autres manquent de tanin. Mais « on n’est pas là pour se faire engueuler », comme chantait la regrettée Patachou sur des paroles de Boris Vian, « on est là pour voir le défilé ». Et ça défile : c’est le rythme qui fait tenir debout J’irai twister sur vos tombes, un titre parodiant celui d’un livre de Boris Vian (J’irai cracher sur vos tombes) publié sous pseudonyme.

En ces temps de crise et de chiffres du chômage toujours à la hausse et toujours suivis d’annonces optimistes auxquelles personne ne croit, en ces temps de retour larvé de la guerre froide et de vacances annulées à la pelle en Tunisie, en ces temps de repli identitaire et de course à l’échalote du nationalisme, bref, par vent fort de scoumoune, voir sur scène une famille se crêper chignon et aller de mal en pis a quelque chose de réjouissant. Le syndrome « Tout va très bien madame la Marquise » opère à mort.

Deux morts et 18 chansons

D’ailleurs tout s’organise autour de la  mort, d’abord celle du père ; dommage car l’acteur Clément Beauvoir, le seul à chanter en anglais, ne manque pas de voix charmeuse. Cependant, même mort il joue encore très bien des castagnettes. Il sera remplacé dans le lit conjugal par un oncle à lunettes et beaufitude assumée (Aurélien Osinski), soupirant de jeunesse de la veuve, maigrelette explosive (Clara Brajtman). On reste en famille. Il y a le fils macho à la gomme (Baptiste Nénert) qui fait la castagne avec son futur beauf (Nessim Vidal) pourtant invariablement affublé d’un sourire tonique et toujours prompt à se mettre au piano. Restent les deux filles, la blonde fiancée (Anne-Laure Laither) avec robe de mariée en vue, et la petite brune soumise à son mari macho qui cache bien son jeu (étonnante Marie-Mathilde Amblat). Les deux finiront par tomber enceinte de deux petits Français.

Tout se passe dans les années 60, la guerre d’Algérie s’invite au parloir et sans tuer l’ambiance (elle à autre chose à tuer), les bien mal nommés « événements » ouvrent la voie à un finale familial qui emporte le morceau. La pièce est d’Astien Bosche, la musique de Timothée Hamy et la mise en scène de Fanny Zeller.

Théâtre La Loge, 21h, jusqu’au 5 juin, 01 40 09 70 40.

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