
Si l’homme est censé descendre du singe, assurément la famille Capdevielle descend des Hautes Pyrénées par la face méridionale. De cette famille, l’un des rejetons, prénommé Jonathan, est le poète, le chantre, le mémorialiste, le troubadour et le faire-valoir. Une sorte d’autobiographie personnelle et collective qu’il égrène librement de spectacle en spectacle. C’est ce que l’on peut vérifier en assistant à la reprise du réjouissant et constamment surprenant Saga, et quelle saga ! C’est là le revival d’une création de 2015 sorte de spectacle armoire à confitures, qui faisait suite à l’augural Adishatz/Adieu en 2009.
Nous voilà) revenus au bon temps des années 90. « Dans une grande liberté et une joyeuse insouciance, nous vivions dans une aire de jeux, où se côtoyaient les brigands Bonnie & Clyde, les week-ends à la plage , des reconstitutions de films d’horreur, des répétitions du Lac des cygnes, des séances de spiritisme, mes premiers pas qu théâtre, avec pour toile de fond les Hautes-Pyrénées » écrivait Jonathan Capdevielle lorsqu’il travaillait à son spectacle il y a dix ans. Ce texte est aujourd’hui repris tel quel dans le programme de Saga, la premier acte de la présence de l’énergumène multicartes au T2G en tant qu’artiste associé. Un choix qui pourrait étonner ceux qui sont habitués aux spectacles délicats du directeur du Théâtre de Gennevilliers, Daniel Jeanneteau. Mais, justement, ce dernier avec raison, aime associer à son entreprise publiques, un artiste qui ne lui ressemble pas. L’un vient du Nord, l’autre du Sud.
Chez les Capdevielle, tout commence au commencement du monde : au pied des Hautes-Pyrénées - signifiées par un décor en forme de rocher où l’homme qui a vu l’ours deviendra ours avant de redevenir homme (l’humour de Capdevielle est circulaire) . C‘est là, au pied et au bord de ce monticule que vivent nus comme au premier jour Jonathan Capdevielle, Marika Dreistadt, Jonathan Drillet et Robin Causse, ce dernier acteur en alternance avec Franck Saurel.
Les quatre I finiront par s’habiller et vaquer à une foultitude d’occupations tout en racontant de minis histoires sans le moindre souci (et c’est tant mieux) d’une explicite continuité narrative. C’est plein de moments exquis que l’on se gardera de raconter. Citons simplement ce moment où Capdevielle allongé sur le sol continue de jouer un bon moment comme s’il était debout, cet autre moment charmant où une chanson de Céline Dion vient s’inviter au parloir, encore cette patte d’ours qui se détache du rocher et qui n’est autre qu’un sac de farine, car tout se passe aussi à la campagne dans une boulangerie. Bref, c’est indescriptible, sans cesse chahuté, et d’un charme fou.
Jonathan Capdevielle a participé à plusieurs spectacles d’Yves-Noël Genot au temps où se dernier faisait encore des spectacles, il s’était auparavant formé à l’ École Supérieure Nationale des Arts de la marionnette à Charleville-Mézières. Par la suite, il est devenu un collaborateur régulier de Gisèle Vienne (laquelle est crédité dans Saga de « regard extérieur ») avant de créer plusieurs spectacle en collaboration avec Marlène Saldana. Bref l’homme ne manque pas de ressources, en outre, il et est même ventriloque, danseur et chanteur. Sa sœur Sylvie et son pote Drillet cosignent avec lui le texte de Saga. Bref, on reste dans la famille.
Théâtre de Gennevilliers, 20h, jusqu’au 5 février