La détresse rageuse des jeunes artistes mise à nu
- 5 avr. 2021
- Par jean-pierre thibaudat
- Blog : Balagan, le blog de Jean-Pierre Thibaudat

« Jeunesse piétinée, culture sacrifiée ». Le titre de leur communiqué de presse reprenait un slogan que l’on retrouve au fronton de la centaine de lieux culturels occupés en France. Un mouvement parti de l’Odéon et qui s’est répandu à toute vitesse partout en France tel un feu non domesticable.
Voici le texte du communiqué de ce groupe de jeunes artistes :
« Nous ne pouvons plus travailler ni rêver. Nous avons 22 ans, 25 ans, 19 ans, 27, 18, 21 et 26 ans. Nous avons des rêves, des objectifs, des promesses. Nous devons grandir, encore, chercher, construire, ensemble et dans toutes les langues, le monde de demain. La pandémie nous a coupé nos membres. A nous, jeunesse amputée, mutilée, vous avez répondu “courage”, “espoir”, “patience”.
Alors nous nous sommes armée-e-s de patience et nous avons accepté, d’annuler, d’arrêter, d’interrompre. Mais jusqu’à quand durera cette indifférence face à nos vies et à nos espoirs ?
Quel monde nous attend si l’art ne nous permet plus d’échanger, de se retrouver ? A quoi va ressembler un monde sans fiction ?

Nous vous imposons nos corps aujourd’hui parce que c’est la seule manière qu’on nous écoute. C’est qu’ils ne sont plus que des feuilles de papier. Nous avons vingt ans. Nous sommes vos suicidé.e.s. Nous ne laisserons plus personne nous dire que c’est le plus bel âge de la vie. »
Alors, avec aux lèvres cette phrase rageuse de Paul Nizan, ils ont déboulé sur la place de la République sur le coup de midi ce lundi de Pâques. Elles et ils se sont déployé.e.s, en respectant les distances sanitaires, le haut de leur corps nu devenu page où écrire « jeunesse piétinée, culture sacrifiée », « je vais mourir, mais pas sur scène » et autres cris de rage et de détresse.
Après quoi le groupe a repris le métro pour manifester dans d’autres lieux symboliques de la capitale : Bastille, Châtelet, le Sacré Cœur, Barbès et, pour finir, la basilique de Saint-Denis.
En ce jour de Pâques, ils se devaient de sonner les cloches à ceux qui restent sourds.

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