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Billet de blog 12 novembre 2025

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Chasse aux trésors de la BNF au château de Villers-Cotterêts

La Cité internationale de la langue française au château de Villers-Cotterêts invite la Bibliothèque Nationale de France à exposer ses trésors : manuscrits, livres imprimés, archives d’écrivains, etc. Un festival de splendeurs rarement exposées

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Illustration 1
Manuscrit de Proust exposé © dr

« C’est toute l’histoire du français, de ses usages et de ses métamorphoses » que racontent les collections de la la BNP expliquent Graziela Pastore (conservatrice au service des manuscrits médiévaux) et Thomas Cazentre (conservateur au service des manuscrits modernes et contemporains), les deux commissaires de l’exposition. Pas simple pour eux de faire un choix parmi des millions de documents avant et après la naissance de l‘imprimerie. Depuis des parchemins datant du XIIIe siècle jusqu’à Roland Barthes ou Wajdi Mouawad en passant par La chanson de Roland, le Devisement du monde de Marco Polo, les écrits de Guillaume Budé sous le règne de François Ier, Le rêve de d’Alembert de Denis Diderot, les registres de laboratoires de Louis Pasteur, les cahiers de Simone Veil. Pour ne citer que quelques exemples

Les deux commissaires ont eu à cœur de mettre en évidence divers aspects comme la séparation progressive entre le rôle du poète et celui du musicien à l’aube du XIVe siècle, les joutes poétiques organisées à Blois par Charles d’Orléans lui-même poète comme sa troisième épouse Marie de Clèves et, bien sûr, l’importance de Chrétien de Troyes, celui qui renouvelle et marque le genre médiéval du roman et connut un succès considérable de son vivant. Et comment auraient-ils pu oublier Rabelais dont est exposé le manuscrit du cinquième livre de Pantagruel. Etc. Ce ne sont là que quelques exemples de cette exposition où l’on peut s’attarder des heures.

A l’heure où les manuscrits « tendent à se raréfier, voire à disparaître avec la généralisation de l’écriture sur ordinateur, les manuscrits d’écrivains ont acquis aujourd’hui une valeur patrimoniale, scientifique, symbolique, esthétique parfois et souvent marchande » souligne Thomas Cazentre, en ouvrant le chapitre « brouillon littéraire ». « Nous n’avons pour ainsi dire aucun autographe littéraire des grands auteurs la Renaissance et même à l’âge classique. (…) Les plus importants sont des textes que l’auteur n’avait pas publié de son vivant, soit qu’il les réservât à sa famille et à ses descendants [c’est le cas du Cardinal de Retz et de Saint Simon], soit qu’il n’eut pas le temps de les achever [Les Pensées de Pascal] »

En revanche, l’époque romantique va ouvrir « un véritable âge d’or du manuscrit littéraire ». En ce domaine comme en d’autres, Victor Hugo est un champion : il garde tout. Et dans un codicille apporté à son testament, il lègue « tout ce qui sera trouvé écrit ou dessiné de (sa) main à la Bibliothèque nationale de Paris » (aujourd’hui de « France »). La nièce de Flaubert et la veuve de Zola en ont fait de même, tous les héritiers ou ayant droits ne peuvent pas en dire autant. Roger Martin du Gard sera le premier à léguer des manuscrits de son vivant, début d’une tradition qui se poursuit aujourd’hui avec Annie Ernaux et d’autres.

L’exposition montre bon nombre de ces manuscrits, de Flaubert à Simone de Beauvoir, de Victor Hugo à Proust ou Jean Genet. Il est aussi question de correspondances comme une lettre de Marguerite de Navarre à son frère François Ier, une lettre de Jean Racine à Nicolas Boileau , une des nombreuses lettre de Camus à Jean Grenier, sans parler d’ un choix des collages de Prévert sur des cartes postales envoyées à ses amis. C’est riche, varié, on aime s’y perdre, on s’attarde et c’est tant mieux.

Trésors et secrets d’écriture, manuscrits de la Bibliothèque Nationale de France, du Moyen-âge à nos jours. Au Château de Villers-Cotterêts, Cité internationale de la langue française. Jusqu’au 1er mars. Riche catalogue très illustré de 264 p, 39€

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