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A peine entrés dans une salle avec chaises, bancs et coussins à peine assis, nous voici transportés en quelques mots et objets dans des temps futurs, un monde où il n’y aura sans doute plus d’arbres, plus de champignons même nucléaires, plus de théâtre, c’est dire. Cependant comme naguère, au début du XXI e siècle, des gens se seront réunis, auront pris place sur des chaises, bancs et coussins et écouteront d’autres humains devant eux, s’agiter, se trémousser, dire des phrases définitives et, à la fin, baisser la tête devant des gens frappant entre leurs mains, certains allant jusqu’à s’écrier « bravo ! » ( mot entre guillemets car sa signification semble s’être perdue au fil des siècles peut être était-ce un mots magique).
Il semble même qu’au même XXI e siècle et même plus avant aux dires des ethnologues, on s’exclamait « c’est un monde !! » pour exprimer son mécontentement. Car à cette époque, au dire des mêmes ethnologues, on était mécontent de tout car tout foutait le camp: le climat, le prix de la tradition, l’amour du prochain, les blagues à deux balles et même le théâtre qui avait augmenté drastiquement en quelques décennies le prix de son kilo de leurre. D'où l'idée d'aller à la recherche du beau monde perdu.
Or donc, rien de tel pour remettre les pendules à l’heure du cosmos que d’imaginer comment les temps futurs se souviendront de leurs ancêtres, nous donc. Que restera-t-il de ce temps définitivement perdu que sera notre présente époque. C’est là le but et même l’ambition inouïe d’un spectacle rétro-futuriste sur ce qu’étaient au XXIe siècle des choses comme l’unanimité, le droit de propriété, les larmes (un metteur en scène célèbre alors avait écrit « la tragédie c’est l’histoire des larmes »), etc.
C’est donc un spectacle check-up qui, par exemple, fait l’inventaire des desserts de l’époque (ah le mille feuille, le Paris-Brest, la tarte à la rhubarbe), nous explique ce qu’est un baiser (un truc entre les lèvres et les langues où on ne comprend rien), ce que veut dire l’expression « neiges éternelles », ou comment résumer sans mot ce que théâtre veut dire (un truc aussi simple que merveilleux), etc. Des choses comme ça, à la pelle et à l’envie.
Dit autrement, c’est une histoire de théâtre en son miroir inventée et fabriquée par ces gens de théâtre que sont les comédiennes et comédiens, un zakouski ou une friandise en marge de leurs spectacles passés et futurs, une sorte de récréation entre deux créations. C’est bon comme le pain chaud, tendre comme la nuit, drôle comme Charlot quand il marche sur le pied d’un policier.
Au commencement c’était une proposition d’un acteur Rémi Fortin, qui en a parlé à l’actrice Blanche Ripoche et à l’acteur Arthur Amard. Les trois en ont parlé à l’acteur, auteur, scénographe et metteur en scène Simon Gauchet aussitôt propulsé « regard extérieur ». Ils ont l’air de bien s’entendre, de s’amuser ensemble et cela nous contamine illico. Le spectacle titré, vous l’aurez compris, Le beau monde, a reçu le prix Impatience en l’an de grâce 2022, ce qui ne nous rajeunit pas.
Au CentQuatre à Paris 20h,du mar au sam, 17h le dim, jusqu’au 23 sept.
Du 2 au 6 nov au social club de Paris ; du 13 au 18 fév au Trident de Cherbourg ; du 28 fév au 2 mars, à Sénart (tournée en décentralisation) ; le 5 mars au Théâtre Châtillon Clamart ; les 26 et 27 mars au Théâtre Jean Vilar de Montpellier ; le 5 avril au Théâtre Louis Aragon de Tremblay en France ; du 3 au 5 mai à la Scène Nationale de Sénart ; du 4 au 6 juin au TAP de Poitiers