Sans doute l’heure était venue. La pandémie et son cortège de chamboulements, a accéléré la décision. Le Théâtre National de Toscane, principal financeur du Workcenter a décidé de réduire son soutien financier à l’aventure, souhaitant l’accompagner projet par projet et sans désormais couvrir les frais de l’ installation dans un lieu devenu légendaire.
Lieu de recherche et de vie, le Workcenter fut le creuset des dernières recherches de Grotowski qui, pour le dire mal et vite, embrassait un phénoménal travail sur soi-même et l’approche de cultures anciennes et de leurs chants. Tout cela n’était pas destiné à des spectacles et des spectateurs mais Grotowski aimait que viennent, de temps en temps, des témoins, des praticiens, des jeunes troupes comme celle du Ballatum théâtre fondée par Eric Lacascade et Guy Alloucherie. Après la mort de Grotowski, cette première ouverture devait conduire le Workcenter à sortir de Pontedera, à parcourir le monde en organisant des stages, en proposant des performances. Ainsi ces dernières années, au début juillet le Workcenter a-t-il été invité au Théâtre de la ville de Paris à l’initiative de Michelle Kokosowski.
Mais revenons au long communiqué. Thomas Richards dit qu’il vient d’avoir 60 ans . « J’entre dans une nouvelle phase de la vie » écrit-il, « Beaucoup de temps a passé depuis le décès de Jerzy Grotowski, mon « teacher » et fondateur du Workcenter et j’ai parfois senti ces dernières années que le moment était peut-être venu de prendre de la distance avec son nom, comme une reconnaissance naturelle du passage du temps. Cependant, cette pensée a toujours généré en moi un conflit car je ressentais et ressens toujours, non seulement une énorme dette envers lui, mais aussi un lien directe entre ce qu’il m’a « transmis » et le travail que je mène jusqu’à ce jour ».
Trois équipes cohabitaient au sein du Workcenter, deux dirigées par Thomas Richards et la troisième nommé « Open program » créé en 2007 et dirigée par Mario Biagini. Ce dernier et son groupe ont déjà quitté le Workcenter pour « entamer un processus de travail indépendant de celui-ci. Je soutiens pleinement leur décision » note Thomas Richards qui rappelle que dans un texte récent, Mario Biagini observait que depuis 2007 « une sorte de bifurcation s’était créée entre les deux branches » qui se sont développées « dans des directions divergentes ».
Tôt ou tard, après une longue cohabitation, la séparation était inévitable. Le moment historique de la pandémie mondiale a accéléré le reste. « Un cycle de mon travail s’est achevé, conclut Thomas Richards, et c’est empreint de ces réflexions que j’ai pris la décision de fermer le Workcenter of Jerzy Grotowski and Thomas Richards » avant de remercier tous ceux qui, en Italie et ailleurs, ont aidé, porté, observé et suivi cette extraordinaire aventure trente cinq ans durant.