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Billet de blog 20 février 2022

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Disparition de l’acteur Bernard Ballet

Il aura tourné bon nombre de films, mais le théâtre était sa vie. Il s’en était éloigné depuis peu. Malade, l‘acteur, mais aussi metteur en scène, Bernard Ballet vient de s’éteindre à 81 ans. De Marcel Maréchal à Patrice Chéreau, de Vauthier à Novarina, d’ Audiberti à Shakespeare, pendant plus d’un demi siècle, il aura fébrilement habité le théâtre.

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Je me remémore ses yeux toujours en mouvement, sa voix grumeleuse et nerveuse, sa façon reptilienne de bouger sur un plateau, son timbre généreux, son appétit à dire.

Viré de l'école des Beaux-arts de Lyon, le jeune homme probablement irréductible qu’il était alors, s’inscrit presque par hasard à un cours d’art dramatique. Un jour de 1962, Marcel Maréchal qui dirige la compagnie le Cothurne frappe à la porte. Il cherche un acteur pour en remplacer un autre malade. Parmi les élèves, il choisit Bernard Ballet. Aucun des deux ne le regrettera.

Le voici embarqué. Très vite, Bernard Ballet sert les écrivains contemporains chers à Marcel Maréchal, ces maîtres du verbe, incroyablement négligés et comme oubliés aujourd’hui, que sont Jacques Audiberti (Le cavalier seul en 1963), Jean Vauthier (Capitaine Bada en 1966) et Louis Guilloux (Cripure en 1967), des spectacles souvent repris ou recréés par la suite. Bernard Ballet suivra Maréchal dans ses pérégrinations lyonnaises jouant dans une trentaine de spectacles (Brecht, Büchner, Beckett, Yacine, etc.), mettant parfois en scène, mais il ne le suivra pas à Marseille lorsque Maréchal s’en ira diriger la Criée en 1980.

A Lyon, Ballet avait mis en scène La fuite de bouche de Valère Novarina et rencontré Patrice Chéreau qui lui confie le Pierrot de son Dom-Juan en 1969. Ils se retrouveront dans les années 80 pour Les paravents de Genet (un légionnaire), La fausse suivante de Marivaux (Arlequin) et Hamlet de Shakespeare (Polonius). Il est devenu un comédien errant, souvent sollicité. Luc Bondy, Luca Ronconi, Bruno Bayen, Alain Françon, Pascal Rambert et d’autres font appel à lui. Il est distribué dans trois spectacles signés Jean-Pierre Vincent et et autant signés Jérôme Savary. En 1986 il retrouve Valère Novarina pour Le drame de la Vie au Festival d’Avignon et au Festival d’Automne.

Deux, trois, quatre spectacles par an, sans compter les films et les téléfilms. Au début des années 2000, il lève le pied, joue régulièrement sous la direction de Marion Bierry

En 2011, on est sous son charme dans Soleil couchant d’après Isaac Babel, un spectacle d’Irène Bonnaud. Le spectacle commence par les premières pages de « Comment ça se passait à Odessa », faisant du personnage d’Arié-Lieb qu’interprète Bernard Ballet, le shamès de la synagogue des charretiers et le marieur du quartier. Un narrateur bienveillant mais impuissant qui voit dans le monde où il a grandi s’étioler des valeurs qu’il croyait immuables. Son dernier rôle.

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