Jean-Pierre Veran (avatar)

Jean-Pierre Veran

formateur, expert associé France Education International (CIEP), membre professionnel laboratoire BONHEURS, CY Cergy Paris Université

Abonné·e de Mediapart

805 Billets

1 Éditions

Billet de blog 13 décembre 2024

Jean-Pierre Veran (avatar)

Jean-Pierre Veran

formateur, expert associé France Education International (CIEP), membre professionnel laboratoire BONHEURS, CY Cergy Paris Université

Abonné·e de Mediapart

« Tranquillité scolaire » : la sécurisation et les sanctions peuvent-elles suffire ?

Un « Plan pour la tranquillité scolaire » qui évite soigneusement de parler de politique éducative n’est-il pas gravement amputé au point de ne pas atteindre l’objectif affiché ?

Jean-Pierre Veran (avatar)

Jean-Pierre Veran

formateur, expert associé France Education International (CIEP), membre professionnel laboratoire BONHEURS, CY Cergy Paris Université

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le « plan pour la tranquillité scolaire[1] » présenté le 12 novembre par la ministre d’alors et à la presse sur le site du ministère de l’éducation nationale, décline trois verbes : « protéger, apaiser et responsabiliser ».

On ne sera pas surpris, à l’heure du procès de l’assassinat de Samuel Paty et après la commémoration de celui de Dominique Bernard, qu’il s’agisse de « protéger les personnels et les élèves » : soutien aux personnels victimes de violence, référent départemental « climat scolaire » (il faudrait établir une liste à jour des innombrables référents déclinés aux différentes échelles de l’éducation nationale), sécurisation en cours des établissements scolaires, développement de la culture de la prévention dans les établissements scolaires.

Pour « apaiser le climat scolaire », le ministère annonce 150 postes de conseillères et conseillers principaux d’éducation (CPE) et 600 d’assistants d’éducation crées en janvier 2025. Rappelons que la France compte 10000 collèges et lycées, pour apprécier le changement qualitatif apporté au climat scolaire par cette création exceptionnelle.

La responsabilisation concerne « les élèves et leurs familles ». En quoi consistent les mesures annoncées ? « L’échelle des sanctions disciplinaires sera clarifiée avec une meilleure gradation des sanctions. Les règlements intérieurs seront adaptés, en concertation avec les chefs d’établissement, les spécialistes du climat scolaire et les parents d’élèves ».

On mesure là la caractère étroit de l’approche ministérielle de la « tranquillité scolaire ».

Il semblerait que la responsabilisation ne passe que par les sanctions, et non par une politique éducative d’établissement soucieuse d’associer effectivement les élèves et les parents à la vie de l’établissement et à la prise de décisions les concernant et de valoriser leur engagement, et pas seulement leur réussite dans les devoirs et contrôles scolaires.

Il semblerait que l’apaisement du climat scolaire ne passe que par les personnels de vie scolaire, comme si n’existait pas une violence pédagogique ordinaire[2], vécue en classe, extrêmement répandue au point de paraître absolument normale, qui mériterait d’être éradiquée en responsabilisant tous les acteurs sur cette question, et pas seulement les personnels de vie scolaire.

Que la sécurité soit une priorité, cela va de soi. Mais il ne suffit certainement pas d’être en sécurité pour transformer le climat scolaire en tranquillité scolaire.

On pourra regretter qu’il ne soit pas une seule fois question de politique éducative dans ce plan pour la tranquillité scolaire : la culture de la prévention est pourtant profondément liée à la préoccupation éducative. A l'heure où le quatrième gouvernement pour 2024 est en cours de constitution, il ne faudrait pas que le "Plan pour la tranquillité scolaire" de novembre soit le présage d'un prochain Ministère de l'intérieur et de l'éducation nationale" confié en décembre à un expert incontesté en sécurisation et sanctions...

_______________________________________

[1] https://www.education.gouv.fr/plan-pour-la-tranquillite-scolaire-proteger-apaiser-et-responsabiliser-415796

[2] On lira avec intérêt à ce sujet l’ouvrage de Christophe Marsollier, L’attention aux vulnérabilités des élèves, Berger-Levrault, 2022

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.