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formateur, expert associé France Education International (CIEP), membre professionnel laboratoire BONHEURS, CY Cergy Paris Université

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Billet de blog 17 mars 2016

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Brevet 2015 : une preuve supplémentaire des inégalités scolaires ?

Avec la réforme du collège, le diplôme national du brevet changera de modalités à partir de 2017. Une étude de la DEPP sur les résultats de 2015 est riche d’enseignements sur l’état de l'inégalité dans notre collège et le sens de la réforme.

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La note n° 6 publiée ce mois-ci par la DEPP[1] sur le DNB 2015 a pour titre : « à partir de 11/20 de moyenne au contrôle continu, la quasi-totalité des candidats réussit aussi l’examen ». Cette première indication ne manque pas d’intérêt. En effet, on ne peut que se réjouir de constater qu’en moyenne, le contrôle continu, qui repose sur la notation des professeurs pendant l’année de 3e est en cohérence avec le résultat final de l’examen qui repose aussi sur les notes obtenues anonymement et attribuées par d’autres enseignants aux épreuves finales d’examen.

Compte tenu du rôle que continuera à jouer le contrôle continu à partir de 2017 (avec un contrôle continu de 400 points, et trois épreuves de contrôle final -deux écrites et une orale- de 300 points,), il est intéressant d’aller un peu plus loin dans l’analyse proposée par la DEPP.

En effet, la cohérence apparente entre les notes du contrôle continu et les notes de l’examen est moins générale que la moyenne peut le laisser croire.

« Dans la majorité des établissements, moins de 10 % des élèves obtiennent à l’examen de mathématiques une note excédant d’au moins 4 points celle de leur contrôle continu. Par contre, 400 établissements ont des modalités d’évaluation spécifiques plus strictes puisque 30 % de leurs élèves sont dans ce cas. Il s’agit, pour 70 % de ces collèges, d’établissements privés. De même, dans 500 établissements, au moins 30 % des élèves réussissent l’examen avec 3,5 points de moins par rapport au contrôle continu. Ces établissements, publics dans 90 % des cas, relèvent pour près de 60 % d’entre eux de l’éducation prioritaire ».

Ces données pourraient donner à voir un collège non pas unique mais triple, avec une majorité d’établissements (plus de 4000) où, grosso modo, en mathématiques, évaluation au contrôle continu et à l’examen sont en cohérence pour 90% des élèves, et deux minorités à peu près équivalentes numériquement : 400 où le contrôle continu est plus sévère que l’évaluation de l’examen avec un écart de plus de 4 points pour 30% des élèves, et 500 où il est favorable de plus de 3  points par rapport aux résultats de l’examen pour au moins 30% des élèves.

Si l’on ajoute que cette exigence supérieure du contrôle continu concerne pour 70% des établissements privés sous contrat et que l’exigence inférieure concerne pour près de 60% des établissements d’éducation prioritaire, on se rend compte que le collège unique est plus une fiction qu’une réalité dans ces deux cas-là.

Cette donnée mérite d’être mise en lien avec d’autres, apportées également par l’étude de la DEPP. Outre le fait qu’elle confirme que les garçons réussissent moins bien que les filles (16% d’entre eux échouent en série générale, contre 10% d’entre elles), elle souligne également la disparité de la réussite en fonction de l’origine sociale des élèves

« Les candidats d’origine sociale défavorisée échouent dans la série générale et dans la série professionnelle dans respectivement 22 % et 26 % des cas, alors que les candidats de milieu très favorisé qui se présentent à la série générale sont 3 % à échouer et ceux qui passent la série professionnelle 15 % ». Il y a donc, en série générale, qui concerne 9 candidats sur 10, 7 fois plus de risques d'échouer à l’examen si on appartient à un milieu très défavorisé, que si on appartient à un milieu favorisé. Une nouvelle fois, ce constat sombre pose la question de la réussite scolaire et des inégalités sociales et confirme la corrélation particulièrement forte dans notre pays entre réussite scolaire et origine sociale. On comprend dès lors l’ardente obligation que constitue l’objectif politique d’amélioration de la mixité sociale des établissements et la mise en œuvre d’une pédagogie plus explicite. Les préconisations du rapport Grande pauvreté et réussite scolaire[2] n’en sont que plus précieuses encore pour que notre collège fasse vraiment « le choix de la solidarité pour la réussite de tous ».


[1]http://cache.media.education.gouv.fr/file/2016/70/6/depp-ni-2016-06-DNB-2015_549706.pdf

[2] http://cache.media.education.gouv.fr/file/2015/52/7/Rapport_IGEN-mai2015-grande_pauvrete_reussite_scolaire_421527.pdf

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