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formateur, expert associé France Education International (CIEP), membre professionnel laboratoire BONHEURS, CY Cergy Paris Université

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Billet de blog 20 novembre 2015

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Pacte de sécurité et pacte de santé : où est le réalisme ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le syndicat majoritaire des personnels de direction (SNPDEN) publie un communiqué de presse[1] dans lequel il demande au premier ministre « que le droit prenne en compte avec réalisme les circonstances que nous traversons et permette aux établissements d’assurer effectivement la sécurité de tous leurs élèves en établissant la possibilité d’espaces fumeurs extérieurs dans l’enceinte des lycées pour la durée de l’état d’urgence ».

On sait en effet que

« L'interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif mentionnée à l'article L. 3511-7 s'applique :

1° Dans tous les lieux fermés et couverts qui accueillent du public ou qui constituent des lieux de travail ;

2° Dans les moyens de transport collectif ;

3° Dans les espaces non couverts des écoles, collèges et lycées publics et privés, ainsi que des établissements destinés à l'accueil, à la formation ou à l'hébergement des mineurs ;

4° Dans les aires collectives de jeux telles que définies par le décret n° 96-1136 du 18 décembre 1996 fixant les prescriptions de sécurité relatives aux aires collectives de jeux.[2]»

On comprend bien la préoccupation qui est celle des proviseur(e)s d’assurer la sûreté de leurs élèves, autorisés à sortir du lycée aux temps de pause. Ce droit lycéen est mis à profit par les élèves fumeurs pour consommer du tabac pendant leur journée de cours, l’interdiction de fumer ne s’appliquant pas au delà de l’enceinte du lycée. Les parvis des lycées sont un espace fumeurs informel, où les élèves côtoient des personnels fumeurs. Et bien souvent, des élèves non-fumeurs y rejoignent leurs camarades fumeurs, et ces parvis peuvent devenir un espace de convivialité propice à la propagation du tabagisme.

Mais, si la préoccupation des proviseur(e)s est bien celle de la vie des lycéens, la réponse qu’ils proposent au premier ministre est tout à fait contraire à leur objectif. Le tabac, en effet, est bien plus meurtrier que le terrorisme, à l’échelle nationale comme à l’échelle mondiale. Chaque jour en France, c’est l’équivalent des victimes du crash d’un avion qui meurt à cause du tabac, dont la plus grande partie du cancer du poumon. Chaque année, à l’échelle mondiale, c’est plus que les morts provoqués par les guerres, le terrorisme, le paludisme et le sida réunis[3].

Cet état d’urgence sanitaire nous a conduits à vouloir effectivement protéger la vie des élèves en bannissant le tabac des établissements. Il ne faudrait pas qu’au nom de l’état d’urgence sécuritaire on néglige une question de santé publique fondamentale, et que la politique éducative de santé soit mise entre parenthèse le temps de l’état d’urgence.

La vie, la santé et la sécurité de nos élèves valent mieux que de mauvaise solutions. Soyons réalistes, intensifions le combat pour la vie, en luttant sans relâche contre le tabagisme. La situation d’urgence actuelle doit être saisie pour aller de l’avant plutôt que de revenir –fût-ce provisoirement- en arrière.


[1] http://www.snpden.net/sites/default/files/files/Comm4%20-%20Le%20SNPDEN%20%C3%A9crit%20%C3%A0%20Manuel%20Valls.pdf

[2] DÉCRET n°2006-1386 du 15-11-2006, Conditions d’application de l’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif, http://www.education.gouv.fr/bo/2006/43/SANX0609703D.htm

[3] http://rue89.nouvelobs.com/rue89-eco/2012/05/26/faut-il-interdire-le-tabac-au-nom-de-ses-5-millions-de-morts-par-232293

Voir aussi - le British medical Bulletin, Tobacco control: present and future, « Without drastic action to get current smokers to stop, the annual rate of tobacco-related deaths will grow from 5 million in 2006 to 10 million in 2025. » http://bmb.oxfordjournals.org/content/77-78/1/123.abstract - l’institut national de veille sanitaire http://opac.invs.sante.fr/doc_num.php?explnum_id=384

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