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Billet de blog 29 juin 2017

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Le médiateur de l’éducation nationale : pour une école plus humaine ?

Le rapport 2016 du médiateur de l’éducation nationale est une mine de propositions pour rendre l’école plus juste, plus attentive à chacun, plus fidèle aux valeurs humanistes de la République. Notre école ne saurait être celle de la souffrance au travail, ni d’un inégal accès à l’éducation ni de la soumission aveugle au gouvernement des algorithmes.

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La publication du rapport 2016 du médiateur de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur[1] pose une nouvelle fois la question de l’humanité de l'école dans une République qui se veut humaniste.

Avant d’aborder les deux thèmes du rapport 2016, le médiateur, Claude Bisson-Vaivre, revient sur celui qui avait marqué le rapport 2015 : les risques psycho-sociaux des personnels. Il observe en effet qu’en 2016 « les dossiers des personnels relatifs à la mutation et à l’affectation représentent toujours le quart des réclamations venant de l’ensemble des personnels, accusant une très légère augmentation par rapport à l’année précédente, comme se sont accrus également de 13% les dossiers traités concernant l’organisation du travail et les relations professionnelles ». « La souffrance au travail s’est installée» note –t-il sobrement, en soulignant qu’il est inacceptable que l’école produise de la souffrance.

Le sous–titre donné au rapport, Des grands nombres vers l’individuel, questionne le fonctionnement complet de l’institution : « La prise en compte des droits individuels de chacun peut-elle s’accommoder d’une gestion rationalisée des grands nombres ? »

Et Claude Bisson-Vaivre choisit deux entrées pour étudier cette question : la scolarisation des 350000 élèves en situation de handicap et l’application Admission post bac (APB) qui concerne 650000 élèves de terminale en 2016, candidats potentiels à l’enseignement supérieur.

Dans son avant-propos, il fait un rapprochement éclairant entre les lois de 1905 et de 2005. « Le médiateur considère que la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées est, pour l’école, ce que la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État est pour la Nation (…) La loi de 1905 veut garantir le vivre ensemble, celle de 2005, l’apprendre ensemble. La première «assure la liberté de conscience » et « garantit le libre exercice des cultes » autrement dit reconnaît et respecte ce qui fait de chacun un être différent et riche de sa différence, la seconde permet à chacun d’exercer son droit à l’éducation, c’est-à-dire le droit de forger sa conscience, en prenant en compte sa différence liée à un handicap ou à une maladie invalidante ». Dans les deux cas, il s’agit d’un combat permanent, exprimé depuis la loi de refondation de 2013 dans le concept exigeant d’école inclusive.

A travers l’application APB, c’est toute la question du gouvernement par les algorithmes qui est très clairement posée. « Les relations administratives sont désormais transformées et reconfigurées du fait des algorithmes et il est proposé au lecteur de faire le point sur les développements en cours autour de ces transformations. (…) Les enjeux sont considérables, se retrouvent dans APB et doivent être mesurés pour que les effets positifs et négatifs soient pris en compte par l’administration. Autrement dit, les conséquences peuvent être telles qu’il est bon de prévenir pour que l’échelon de décision, dans une République humaniste, ne puisse pas dire qu’il ne savait pas ». Fondamentalement, « APB ne doit être que la traduction de la mise en œuvre d’une politique publique prévue par les textes, ni plus ni moins ». Chacun doit pouvoir le vérifier. Information sur le fonctionnement d’APB et accompagnement à la saisie des vœux sont les maîtres mots devant permettre à chacun « d’adapter les stratégies de classement des vœux d’admission en fonction de l’objectif d’orientation arrêté ». Le médiateur propose ainsi notamment de « réserver des heures du dispositif d’accompagnement personnalisé en classe de terminale quelques jours avant la fin de la période consacrée à la saisie des vœux dans APB pour consolider l’adéquation vœux/profil de l’élève ».

Le rapport du médiateur ne minore pas les progrès accomplis en une décennie («  les élèves relevant du handicap désormais scolarisés sont plus de 350000 contre 155000 seulement dénombrés en 2006 et, alors que les auxiliaires de vie scolaire ont fait leur apparition en 2005, on recense désormais près de 56 000 postes (sous des statuts divers) consacrés à l’accompagnement, preuves, s’il en était besoin, d’un changement profond de politique en la matière »), tout en se faisant, à partir de l’analyse des réclamations reçues, force de proposition pour améliorer encore ce qui doit l’être pour que l’école tienne toujours mieux les promesses de la République. Il souligne que ses propositions antérieures ont été prises en considération, comme celles concernant le remplacement des professeurs absents qui ont trouvé un écho dans la circulaire n°2017-050 du 15 mars 2017. On espère que le nouveau ministre saura être attentif aux préconisations formulées par le médiateur dans son rapport 2016.

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[1] http://cache.media.education.gouv.fr/file/Racine/19/3/2017_rapport_mediateur_bdef_788193.pdf

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