Il paraît qu'un objectif des administrations est de simplifier les démarches administratives, notamment d'éviter la production multipliée de pièces justificatives.
Je viens de tomber sur une instruction - de décembre 2024 - que je trouve ahurissante de la CAF visant à multiplier les contrôles et les exigences de pièces justificatives dès l'ouverture du droit à l'AEEH.

Agrandissement : Illustration 1

Il y a un objectif incontestable : le complément d'AEEH (allocation d'éducation de l'enfant handicapé) dépend du temps d'activité des parents. Il est normal de vérifier régulièrement ce droit.
Cependant, la MDPH contrôle au préalable ce temps d'activité lors de l'étude du droit. C'est prévu dans le formulaire CERFA de demande.
En 2002, le Ministère a dit à la CAF et à la MSA (ODPF : organismes débiteurs de prestations familiales) qu'elles ne devaient pas contrôler cela à l'ouverture du droit, car cela avait déjà été fait par la commission. Cela retardait le versement de l'allocation. Par contre, CAF et MSA étaient chargées de vérifier régulièrement si cette condition d'activité était remplie - la condition concernant les frais, un des deux critères du complément, n'étant pas contrôlable par ces organismes.
- "L'ODPF verse le complément attribué par la CDES [CDAPH] sans effectuer de contrôle a priori de l'effectivité et de l'importance du recours à une tierce personne, mais il peut effectuer à tout moment ce contrôle en cours de droit."
Cette instruction CNAF prescrit de vérifier - de demander des pièces - à l'ouverture du droit, au renouvellement ou en cas de révision du droit, alors que cela a déjà été fait dans tous ces cas par la MDPH !
Je trouve normal que cette vérification intervienne ensuite régulièrement en cours de droit : soit en fonction d'informations reçues, soit sur la base d'une enquête régulière (demande d'informations).
Le même genre de double "vérification" est aussi fait par le service payeur du Conseil Départemental, lorsqu'il doit verser le dédommagement pour un aidant familial (PCH : prestation de compensation du handicap - aide humaine). A mon avis, c'est excessif.
Date d'effet de la révision du complément
Voilà ce qu'indique la circulaire de 2002, toujours applicable :
- "Si ce contrôle fait apparaître des modifications de la quotité du recours global à une tierce personne (par exemple, une diminution globale en additionnant la diminution ou la cessation d'activité du ou des parents et le temps du recours à une tierce personne rémunérée), l'ODPF suspend le versement du complément attribué par la CDES et sert provisoirement, à titre d'avance, le complément correspondant à la situation constatée. Parallèlement, il saisit la CDES afin que celle-ci réexamine le droit à complément.
Pour ce faire, l'ODPF informe la CDES de la date d'effet et de la catégorie du complément servi à titre d'avance, et transmet les pièces justificatives de la nouvelle situation constatée. La date d'effet correspond à la date du constat dressé par l'ODPF.
En retour, il appartient à la CDES de prendre une nouvelle décision pour la période commençant au premier jour du mois suivant la date d'effet du complément servi à titre d'avance par l'ODPF."
J'avoue avoir un peu de mal à comprendre. A la MDPH, on m'expliquait que la réduction du complément ne prend effet qu'au mois qui suit l'information à la CAF ou à la MDPH.
Quand la CAF prend connaissance de l'information, elle modifie pour les droits à venir le complément versé : il devient "à titre d'avance". La date d'effet est celle du constat, et non pas la date d'évolution du temps de travail.
La CDAPH va avaliser cette date : il ne peut donc y avoir d'indu.
Nouvelle instruction de la CNAF
Avec cette instruction de la CNAF - sans aucune base légale - tout est mis par terre.
La CAF explique à la MDPH qu'elle ne doit pas se préoccuper de la concordance entre la situation des parents et l'attribution d'un complément d'AEEH. Ce qui est une façon de dire :
- SVP, ne vous occupez pas de cela, nous allons nous en occuper, nous demanderons aussi les mêmes pièces justificatives que vous. Nous retarderons d'au moins deux mois le versement du rappel d'allocations (AEEH et complément d'AEEH). Il n'y a pas d'urgence, les dossiers d'AEEH ne sont pas prioritaires (contrairement aux dossiers RSA et AAH).
Puisque personne n'est parfait, la CAF, constatant une évolution du temps d'activité d'un parent, n'est pas incitée à vérifier si l'autre parent n'a pas une activité réduite ou si les parents ont embauché une personne : "Je supprime - sans motivation légale en fait et en droit - et démerdez-vous avec".
Auparavant, la CAF adaptait le niveau du complément à la situation constatée, et informait la CDAPH qui avalisait ou non cette décision.
Dans l'instruction de la CNAF, la CAF décide, informe par politesse la MDPH. Rien à foutre de la CDAPH.
Droit d'option entre le complément d'AEEH et la PCH
Lorsque l'équipe pluridisciplinaire d’évaluation de la MDPH propose un Plan Personnalisé de Compensation, elle indique à la famille qu'elle peut choisir entre un complément d'AEEH et la PCH, si les conditions sont remplies.
La famille doit donc choisir entre un complément d'AEEH et la PCH.
Grâce (hihi) à cette instruction de la CNAF, la famille devra choisir entre la PCH et un complément aléatoire de l'AEEH. Cela dépendra de l’évaluation par la CAF ensuite de son droit au complément. Autrement dit, c'est Mission Impossible, même pour les assitant.es social.es expérimenté.es. Même pour les agents des CAF ou de la MDPH.
Une conséquence imprévue pour la PCH
La plus mauvaise initiative peut avoir une conséquence favorable imprévue - et vice-versa. Cela ne représente que quelques situations.
Pour un enfant, depuis 2008, suite à une crainte irraisonnée, le droit à la PCH a été subordonné à un droit préalable à un complément d'AEEH.
Cela peut être un blocage quand les deux parents travaillent à temps plein, ou surtout quand le parent isolé travaille à temps plein. Il ne peut donc pas bénéficier d'un complément à ce titre. Et donc pas de la PCH.
Certaines MDPH (la moitié en Bretagne) identifiaient un besoin théorique au complément d'AEEH (temps d'activité des parents), et proposaient un droit à la PCH sur cette base.
Avec cette instruction CNAF - sans base légale, sans instruction ministérielle ou de la CNSA - la question ne se poserait plus. La PCH pourrait être attribuée sans s'inquiéter de cette question.
Bien entendu, il est impossible, lorsqu'il exerce son droit d'option entre la PCH et le complément d'AEEH, au parent de savoir à quelle sauce il va être cuisiné. La MDPH devrait s'en foutre, car cela relèverait de la compétence de la CAF. Celle-ci le décidera dans quelques mois, et l'option prise ne pourra être remise en cause rétroactivement.
Cette instruction n'a évidemment pas fait l'objet d'une concertation avec les personnes concernées, notamment par l'intermédiaire du CNCPH (conseil national consultatif des personnes handicapées).