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Billet de blog 27 juin 2019

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Jim Sinclair - Auto-introduction à la Société Intersexuée d'Amérique du Nord

"Je reste ouvertement et fièrement neutre, physiquement et socialement.". Jim Sinclair explique comment son intersexuation s'est révélée, et les réactions que cela a entraînées chez lui.

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Dossier Stonewall 50 ans après : LGBTQI+ et autisme

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© https://stop-mutilations-intersexes.org/

Jim Sinclair, 1997

     J'ai plus de chance que beaucoup de personnes intersexuées, en ce sens que mon intersexualité est une question d'anatomie "non développée" plutôt que "mixte".  On a simplement supposé que j'étais une femme jusqu’au milieu de l'adolescence, de sorte que je n'ai pas subi d'interventions chirurgicales ou d'autres interventions invasives au début de ma vie.

    On s'attendait à ce que je sois une fille et à ce que je m'identifie comme telle, cependant, et j'ai senti très tôt qu'il y avait quelque chose "qui n'allait pas" à ce sujet.  Ce n'était qu'une des nombreuses choses inhabituelles pour lesquelles les parents et les médecins attendaient "que je les dépasse", et comme j'avais aussi de graves problèmes de communication et d'autres problèmes de développement, ce n'était pas vraiment une priorité - jusqu'à ce que j'aie douze ou treize ans, et non seulement cela ne s'est pas passé, mais a) je ne me suis pas "développé" physiquement du tout comme on s'y attendait, et b) j'avais suffisamment bien développé ma capacité à communiquer pour dire très clairement que je n’étais PAS une fille.

    La première réaction a été de m'envoyer suivre une psychothérapie intensive pour essayer de me laver le cerveau afin que j'accepte l'identité et le rôle d’une femme.  En fait, j'ai failli être hospitalisé dans un établissement psychiatrique pour cela, mais mes parents se sont contentés d'un lavage de cerveau en ambulatoire.  Pendant plusieurs années, les choses ont été confuses et ambivalentes :  quand j'ai atteint l’âge de quatorze ans, pratiquement tout le monde en dehors de ma famille m'acceptait socialement comme un garçon, mais au terme de mes seize ans, un médecin a proposé de me mettre sous œstrogènes pour faire pousser mes seins.

    J'ai fini par être évalué par une équipe de "spécialistes" de l'intersexualité à seize ans et demi.  L'examen physique à cette époque n'était qu'externe, plus un examen digital à la recherche de testicules et/ou d'un utérus.  Il s'est avéré que je n'avais ni l'un ni l'autre.  La recommandation à l'époque était que, puisque j'étais catégorique sur le fait de ne pas être une femme, il faudrait que je commence des injections de testostérone pour avoir l'air plus masculin.

   Cela s’est bien passé pendant un certain temps ; d'après mon expérience des trois dernières années, le fait d'être identifié comme un garçon signifiait avant tout une libération bienvenue des pressions et des attentes de m'identifier comme une fille.  Je n'avais jamais vraiment ressenti de pression similaire pour être ou agir comme un garçon - ma famille ne me considérait pas vraiment comme un garçon, et même de nouvelles relations qui ne connaissaient rien de mon histoire, et qui, au premier abord, me prenaient pour un homme, me trouvaient toujours "différent" (probablement en partie parce que je ne semblais apparemment pas mûr du tout physiquement pour un garçon de mon âge) et ne semblaient ni surprises ni fâchées quand je n’étais pas tout à fait en adéquation avec ce rôle.

    Mais avec la testostérone, ma voix qui commençait à devenir légèrement plus grave et l’apparition d’une pilosité faciale ont ravivé mon sentiment que cela aussi était un piège, modifiant mon corps d'une façon qui ne me semblait pas naturelle.  J'ai arrêté les injections et j'ai dit à mon endocrinologue que j'étais absolument certain de ne pas vouloir être une femme, mais que je n'étais pas du tout certain de vraiment vouloir être un homme.  J'ai pensé qu'il pourrait y avoir une troisième option, celle de rester "entre les deux".  Il n'était pas content de cela.

    Une chirurgie exploratoire a été faite avec mon consentement quand j'avais dix-huit ans.  Il n'y avait pas d'ovaires ou de testicules différenciés.  Je ne divulgue pas la nature ou la direction des tissus mal différenciés, ni mon génotype, car d'après mon expérience, ce genre d'information est utilisé pour m'"assigner" à un sexe non pertinent.

    A 21 ans, j'ai eu une réparation des voies urinaires et j'ai dû repousser un chirurgien trop zélé qui était déterminé à faire une phalloplastie.

    Je reste ouvertement et fièrement neutre, physiquement et socialement.

https://web.archive.org/web/20090207013228/http://web.syr.edu/~jisincla/brief_bio.htm


Campagne contre les mutilations intersexes : https://stop-mutilations-intersexes.org/

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