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Billet de blog 14 août 2021

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Vente des terres du Congo au Rwanda

"Tout acte, tout accord, toute convention, tout arrangement administratif ou tout autre fait qui a pour conséquence de priver la nation de tout ou partie de ses propres moyens d'existence tirés de ses ressources naturelles ou de ces richesses est considéré comme crime de pillage et puni par la loi."

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

J'aimerais ici partager avec vous mon analyse de la rencontre d'une délégation rwandaise avec le ministre d'état Pierre Mabiala.

"Le ministre d’Etat, des Affaires foncières et du Domaine public, chargé des relations avec le Parlement, Pierre Mabiala, a échangé, le 27 juillet (2021) à Brazzaville, avec l’ambassadeur de la République du Rwanda, Théoneste Mutsindashyaka, sur l’obtention des actes fonciers des terres que le Congo a données à son pays, dans le cadre de la coopération sud-sud", annonce en son introduction le journal en ligne "les Echos du Congo Brazzaville" : https://lesechos-congobrazza.com

D'ordinaire, un tel acte du gouvernement ne saurait faire l'objet d'une moindre attention de ma part. Mais les enjeux politiques et géo-stratégiques que cachent une telle démarche me poussent à sortir de mon silence et d'éclairer la lanterne du citoyen congolais pour dénoncer les risques que court le pays et les générations futures.

1. Que dit la Constitution?

La Constitution Congolaise d'Octobre 2015 en son article 44, stipule que "Tout acte, tout accord, toute convention, tout arrangement administratif ou tout autre fait qui a pour conséquence de priver la nation de tout ou partie de ses propres moyens d'existence tirés de ses ressources naturelles ou de ces richesses est considéré comme crime de pillage et puni par la loi." De prime abord et au regard de la Constitution, j'oserais dire qu'iI s'agit ici d'un acte de haute trahison du fait qu'il porte atteinte à la souveraineté du pays et à l'intégrité de notre territoire. Mais en réalité quel est le véritable enjeu derrière ces ventes de terres?

2. La Genèse

Tout d'abord les terres dont il est question ici sont celles données aux soldats Rwandais venus combattre aux côtés de Sassou Nguesso lors de son coup d'état de 1997 contre le Président Pascal Lissouba. Et comme effort de guerre, Sassou avait donné des milliers d'hectares de nos terres aux Rwanda. C'est donc pour ces terres que l'ambassadeur du Rwanda au Congo serait venu demander des titres fonciers.

3. Le véritable enjeu: la conservation du pouvoir.

Au vrai, l'octroi de nos terres au Rwanda s'inscrit dans la perspective de la conservation du pouvoir. En effet, le 21 Mars dernier, s'est tenu au Congo l'élection présidentielle sanctionnée par la supposée victoire du candidat Dénis Sassou Nguesso. Une victoire dont les enjeux s'inscrivent dans une perspective de la conservation du pouvoir. Autrement dit, Mr. Sassou a rempilé un nouveau mandat non pas pour se mettre au service du peuple et du pays mais pour préparer un successeur, pour déblayer la voie de celui qui va le remplacer. En d'autres termes, il est revenu au pouvoir pour faciliter les conditions d'accession au pouvoir de son successeur. Et ce plan s'articule en quatre phases ou autour de quatre stratégies: politique, économique, diplomatique et militaire.

3.1. Sur le plan politique, 

le plan consiste à écarter ou éliminer tout potentiel adversaire ou toute personne qui ferait obstacle à son successeur. C'est dans ce sens en effet qu'il faudra comprendre le maintien en détention des prisonniers politiques comme Mokoko et Okombi. En d'autres termes la détention prolongée des prisonniers politiques s'inscrit dans la logique de la conservation du pouvoir par un seul clan, une seule famille. Ainsi, toute personne qui ne serait membre de sa famille ou de son clan et qui s'entêterait et oserait succéder à Sassou Nguesso, cette personne-là se verrait purement et simplement éliminer. D'où la mort de Brice Parfait Kolelas. En termes simples, ce dernier est mort parce qu'il a osé se disputer le pouvoir avec les Nguesso, et donc vouloir faire échouer leur plan de conservation de pouvoir.

3.2. Sur le plan diplomatique, 

c'est la nomination de son fils, Denis Christel Sassou Nguesso ( le prétendant à la succession de son Père), comme Ministre de la Coopération Internationale et de la Promotion du Partenariat Public-privé dans l'actuel gouvernement congolais. Un poste ministériel qui revêt les prerrogatives du ministère des affaires étrangères, et donc de la diplomatie et des affaires diplomatiques. Ici il faut aussi souligner le soutien indéfectible de la France.

3.4. Sur le plan financier, 

il n'est plus à démontrer que les Nguesso ont réussi à dévaliser le pays avec autant de détournements qu'ils ont opérés. Ils possèdent donc un patrimoine financier considérable pour conserver encore le pouvoir pendant plusieurs décennies.

Ainsi, avec Mokoko, Okombi et bien d'autres figures politiques hors de course, et Parfait Kolela mort, le boulevard vers la conservation définitive du pouvoir est tracé et ouvert. Sauf qu'un détail très important reste à régler: l'aspect militaire. C'est ici qu'il faudra comprendre l'octroi de nos terres aux Rwandais.

4. Sassou et la conquête du pouvoir.

Dans la gestion et bien plus pour la conquête du pouvoir, Sassou s'est beaucoup appuyé sur l'armée mais par dessus tout sur les mercenaires et les forces armées étrangères. Référons-nous aux événements de 1977, le coup d'état de 1997 et les multiples génocides dans le Pool. Ainsi dit, l'octroi des terres du Congo aux Rwanda est un gage donné au gouvernement de ce pays pour son éventuelle intervention aux côtés de soldats congolais pour l'installation de l'enfant Sassou au pouvoir. Le schéma de la RDC de Kabila père et fils peut nous servir d'illustration.

5. L'expropriation des Congolais du Sud.

Enfin l'autre et le véritable enjeu que cache une telle démarche du gouvernement Congolais, c'est l'expropriation des Congolais du Sud de leurs terres. Comme il a privé les Congolais du Sud des bénéfices des ressources naturelles de leur sol et sous-sol notamment le pétrole et le bois, et sentant sa mort venir, Sassou et son clan veulent à tout prix exproprier les Congolais du Sud de leurs terres et donc de leur droit de sol. D'où la vente anarchique de nos terres du Sud aux pays étrangers sous le prétexte fallacieux de faire l'Agriculture comme si les Congolais étaient des manchots.

Cette  expropriation est aussi motivée par l'idée de la division du Congo entre le Sud et le Nord. En effet, à cause de la marginalisation du Sud dans la gestion du pays, de plus en plus des voix s'élèvent parmi les Congolais notamment ceux de la Diaspora pour réclamer la séparation du Sud d'avec sa partie septentrionale, c'est-à-dire le Nord. Une menace que le pouvoir actuel prend au sérieux. Si un tel projet venait à se réaliser, le Nord du pays serait perdant. Conscient de cela, Sassou veut laisser le Sud dans une situation difficile, de conflits à répétition avec des étrangers pour retarder son développement pendant le Nord garderait  son intégrité territoriale et ses ressources naturelles.

Conclusion.

Que faire pour sauver la situation? 

Tout d'abord j'invite le parlement congolais de s'auto-saisir de l'affaire parce qu'il s'agit ici de la violation purement et simplement de notre Constitution; et il s'agit d'un acte de haute trahison et d'atteinte à l'intégrité territoriale. Deuxièmement, que les propriétaires des terres se constituent en société civil et saisissent le bureau du procureur car les terres n'appartiennent pas à l'Etat mais aux propriétaires fonciers; ce sont eux les vraies propriétaires . Troisièmement, que les avocats Congolais saisissent les instances judiciaires nationales et internationales. Quatrièmement, avec l'aide des géomètres ou d'agents de cadastre, que l'Etat aide les paysans qui sont les véritables propriétaires des terres à acquérir des titres fonciers pour sécuriser leurs terres. Enfin, encourager et mobiliser nos enfants surtout ceux de la diaspora, et nos cadres à titre individuel ou en association d'acquérir le maximum des terres quitte à les mettre en valeur plus tard.

Abbé Brice Ruffieux Bahouamio

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