Je suis vraiment désolé, car je sais que ça ne va pas arranger les comptes de l’assurance-chômage, mais je suis né. Et je vous prie de m’en excuser, même si, au fond, je n’y suis pas pour grand chose...
En expliquant les difficultés à endiguer le chômage par le taux d’une natalité» relativement vigoureuse en France (relativement, par rapport à ses voisins, notamment) notre sémillant «secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, chargé du Commerce, de l’Artisanat, des Petites et Moyennes Entreprises, du Tourisme, des Services, des Professions Libérales et de la Consommation» s’est approché d’un terrain miné: le volontarisme démographique.
Toutes les politiques natalistes ou anti-natalistes sont vouées à l’échec, et l’histoire récente est là pour le prouver: la politique nataliste de la Roumanie sous Ceaucescu (avec interdiction de l’avortement, etc.) n’a eu que des effets très limités sur la natalité à long terme - redevenue déficitaire aujourd’hui, d’ailleurs - et a surtout rempli les orphelinats. Quand à la politique anti-nataliste de Pékin (un enfant par couple, et pas un de plus), elle a eu les effets escomptés (notamment un taux d’emploi des plus élevés au monde, ce dont rêve notre secrétaire d’Etat cité plus haut), mais les Chinois redoutent désormais le vieillissement attendu de leur population dans une vingtaine d’années... On ne peut pas tout avoir.
Et puis l’équation démographie-chômage ne fonctionne pas toujours: l’Allemagne (de l’Ouest) ne s’est jamais aussi bien portée que dans les années 1950-60, alors qu’elle a dû absorber quelque 10 millions de réfugiés de l’Est. A l’époque, le chômage y était anecdotique.
La fameuse crise de 29 est survenue aux Etats-Unis moins de 20 ans après que l’imposition, en 1912, de mesures drastiques destinées à décourager l’immigration. Cherchez l’erreur.
L’ultime liberté des peuples, c’est celle de se perpétuer ou pas, et les discours natalistes, façon ultra-intégriste religieux, ou anti-natalistes, façon économiste-comptable, sont inacceptables. Qu’on foute la paix au gens avec ça! Ils ont autant d’enfants qu’ils le veulent, s’ils le veulent, et s’ils n’en veulent pas, c’est très bien aussi.
En passant, Monsieur le secrétaire d’Etat, maintenant que je suis né (j’allais dire: puisque je suis né), je peux peut-être, si je ne suis pas fiché comme «potentiellement délinquant» avant l’âge de 3 ans, aller à l’école (si elle survit encore quelque années) de la République, et puis, apprendre un métier, voire créer une entreprise et des emplois, non?
Sans compter tout ce que je vais consommer sous peu (lait en poudre, couche-culottes, petits pots, jouets, et tout le Saint-Frusquin...), consommer ensuite (bagnoles, maisons, vacances, ordinateurs, etc.), et encore et encore... Sans compter non plus tout ce que je vais payer en impôts et en taxes, même sur mon cercueil puisqu’à l’époque dans laquelle nous vivons, il faut être prévoyant...
Et puis, si comme beaucoup d’hommes politiques, vous persistez à ne JAMAIS prendre votre retraite, j’aurai peut-être même l’occasion de voter contre vous...