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Billet de blog 4 juillet 2015

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Grèce : pour conjurer (si possible) un viol annoncé...

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Le scénario « à la grecque » qui suit n'est pas terrible. C'est une fiction, et j'espère que ça le restera. Mais il offre deux avantages : d'abord, il n'est pas invraisemblable, ensuite, il peut se produire quel que soit le résultat du referendum de dimanche. Il peut même se produire là, tout de suite, voire dans la nuit, c'est à dire avant que le peuple grec ne soit consulté .

« L'armée a pris le pouvoir à Athènes, la démocratie sera rétablie quand le pays sera adulte... » annonce par exemple lundi matin (mais ça peut être ce soir ou demain) la télévision grecque. Le communiqué des néo-colonels est pesé : l'emploi du mot « adulte » est une sorte de clin d'oeil à la patronne du FMI, la ci-devant Christine Lagarde, de manière à ce qu'elle regarde avec bienveillance ce régime militaire qui prend courageusement les commandes d'un pays de toutes façons fauché de chez fauché...

Mais il n'y a toujours pas un fifrelin dans les distributeurs des banques hellènes, et, pour parer à toute manifestation de mécontentement, on utilise les installations olympiques pour y parquer les mécontents. Et ils sont nombreux.

L'initiative est saluée par plusieurs économistes attitrés de l'Union européenne qui estiment que « seul l'avènement d'un régime autoritaire en Grèce va permettre de rentabiliser (enfin!) ces infrastructures, très coûteuses en leur temps ».

Parmi les nouveaux enfermés on trouve, évidemment, tous les membres du gouvernement Tsipras, et même pas mal de socio-démocrates et centristes, voire certains conservateurs qui jugent que, quand même, ce coup d'Etat à l'ancienne, ça ne le fait pas trop.

A Bruxelles, à Paris, à Berlin, on se frotte les mains. En douce. Voire, n'en déplaise à Angela Merkel, on rit dans sa barbe. Ce « golpe » a un double avantage : d'abord, il peut coller la trouille aux Italiens, Espagnols, Portugais, voire aux Français qui osent s'imaginer – contrairement aux « adultes » - qu' »une autre politique est possible ». Ensuite, il constitue un prétexte tout trouvé pour virer la Grèce de l'Union européenne et de l'euro, puisqu'en fait, dans les textes européens, il n'y a aucun moyen légal de faire gicler un pays membre.

« Gross Malheur », « Kolossale Katastrophe », telle est en substance la réaction du gouvernement allemand. C'est politiquement correct et ça ne mange pas de pain. Et ça permet à Berlin de se désintéresser presque totalement du sujet. D'autant que l'euro, hein, faudrait pas trop longtemps nous courir sur le haricot avec ça...

A Bruxelles, l'Eurogroupe se drape dans le drapeau usurpé des vertus démocratiques pour estimer que « l'Union européenne, fondée sur la démocratie, ne peut conserver parmi ses membre un pays qui n'adhère pas aux mêmes valeurs ».

A Paris, François Hollande se déclare « offensé, offusqué ». En fait, il est surtout « off ». C'est d'ailleurs en « off » qu'il explique à quelques-uns des journalistes proches du sérail que « Tsipras l'a bien cherché, quand même ».

En public, néanmoins, il assure du soutien de la France « le peuple grec qui souffre encore davantage avec un régime de type fasciste » - il emploie le mot « fasciste » à dessein pour alimenter les éditoriaux du lendemain - mais il salue en même temps « la décision courageuse des plus hautes instances de l'Union européenne » de ne pas accepter de garder dans les rangs de l'UE un « un pays mis en coupe réglée par une dictature d'un autre temps ». Il les soigne, ses éditorialistes, le président, non ?

Evidemment, le PS organise pour le lendemain une grande manifestation « contre le coup de force des militaires grecs », une initiative approuvée par plusieurs personnalités, euh, dont BHL.

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