Le droit de cuissage, nous dit-on, n'est qu'un mythe, colporté par les philosophes des lumières, puis par des républicains épris de leur cause à l’excès. Bon. Dans ce cas, veillons à ne pas le rétablir, surtout s’il n’a jamais existé, ce serait un comble, non?
Pourtant, depuis l’interpellation de DSK dimanche à New-York, tout le monde (et notamment les «analystes politiques») tombe dans le piège: en voulant accorder au patron du FMI, et à juste titre, la présomption d’innocence, on jette la suspicion, sans aucune raison, sur l’employée de l’hôtel Sofitel de la Grosse Pomme (Big Apple, le surnom de New York), qui est a priori une victime...
Et c’est très grave, car cela signifie que la victime présumée d’un violeur, dès lors que ce dernier est riche, puissant, connu, notable, etc., est considérée comme une personne suspecte d’être manipulatrice, complice des ennemis de son agresseur, voire purement et simplement nymphomane...
En revanche, un homme anonyme accusé de viol après être tombé dans un piège (ça arrive aussi, même si c’est infiniment plus rare que les «vrais», si j'ose dire, viols) n’aura pas droit à la même sollicitude médiatique que s’il avait été un personnage en vue, et la présomption d’innocence dont il pourrait bénéficier sera plus théorique que pratique... (cf. Outreau)
«Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir», écrivait déjà Jean de La Fontaine, dans «Les animaux malades de la peste» au XVIIe siècle, époque à laquelle le droit de cuissage était supposé exister!
Evitons donc de rétablir insidieusement ce faux droit au XXIe siècle. D’autant qu’aujourd’hui, ce sont plutôt les hommes qui sont malades, et que la peste pourrait bien être brune.