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Billet de blog 16 février 2025

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Vers la fin de l'omerta

L'affaire de l'institution notre-dame de Betharram vient révéler l'existence d'une véritable « omerta » concernant les affaires pédocriminelles dans les écoles confessionnelles catholiques. Il convient d'en comprendre les raisons. Un tournant salutaire n'est-il pas sur le point de se produire ?

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L'attitude du premier ministre Bayrou, qui a changé trois fois de version sur la connaissance de ces crimes en quelques jours donne à voir l'étrange mansuétude qui règne à l'égard de ce type établissement depuis des décennies : l'ancien ministre de l'éducation nationale - qui à ce titre était garant du respect de la loi dans les établissements catholiques sous contrat - et l'ancien président du conseil général - en charge de la protection de l'enfance dans son département - est révélatrice du silence et de l'inaction dans ce domaine, revenant à se rendre complice de graves faits de torture sur des enfants et de crimes pédocriminels.

Pourtant un rapport de la commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Eglise datant de 2021 a révélé l'existence d'au moins 330 000 victimes de pédocriminalité commis en 70 ans dans les établissements catholiques (soit 13 enfants par jour !) dont 23 %  pour les seuls établissements privés sous contrat. Une « boucherie pedocriminelle » qui s'étend sur des décennies pour reprendre l'expression d'Arnaud Gallais, qui a été une des nombreuses victimes de ces crimes. Voilà qui aurait dû ouvrir les yeux de beaucoup depuis très longtemps !

Or, l'école privée sous contrat assure une mission de service public financée sur fonds publics au nom de l'Etat et de l'Education Nationale. Mais l'Etat n'a pas fait pas son travail en raison de carences dans le contrôle aussi bien par ses services déconcentrés que sont les rectorats que par les préfectures. Dans le seul cas de l'institution notre dame de Betharram 112 plaintes de dénonciation de violences pedocriminelles ont été déposées en 50 ans, qui n'ont abouti qu'à presque rien !

Comme dans le cas de la précédente affaire de l’école privée catholique Stanislas, un établissement parisien situé dans les beaux quartiers, dont était issu le ministre Blanquer, le fait qu'une partie de l'élite politique y ait été scolarisé n'explique-t-il pas cette omerta entretenue à la fois par la presse et une grande partie du monde politique ?

D'autres situations similaires restent sans doute à révéler dans beaucoup de départements et de communes du pays. Une vague de révélations est en cours de préparation. Il serait vain de tenter de l'empêcher. La création d'une commission d'enquête parlementaire cette semaine va dans ce sens. Il sera intéressant d'observer qui va chercher à l'empêcher.

La levée générale de l'omerta qui règne sur ce sujet et le recours à l'article 40 qui oblige à déclarer les situations délictueuses connues, devraient contribuer à faire enfin connaître les abus et les crimes commis dans le passé contre les enfants dans les quelques 7500 établissements sous contrat, où pas moins de deux millions de jeunes Français-es sont aujourd'hui scolarisé-es.

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