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Billet de blog 23 novembre 2014

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Pour un urbanisme au service de l'intérêt général

Henri Laborit écrivait : « L'urbanisation fonctionne comme une machine servant à juxtaposer sans heurts de grandes inégalités de conditions qui ne seraient pas tolérées dans un autre contexte. » Grenoble est l'illustration de ces « grandes inégalités de conditions ».

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Henri Laborit écrivait : « L'urbanisation fonctionne comme une machine servant à juxtaposer sans heurts de grandes inégalités de conditions qui ne seraient pas tolérées dans un autre contexte. » Grenoble est l'illustration de ces « grandes inégalités de conditions » ; c'est en effet une ville duale, divisée en deux parties nord et sud. Et la fracture s'est agrandie depuis 6 ans sous l'ancienne municipalité du maire PS Michel Destot !

A l'aune des Comptes rendus annuels à la collectivité locale des représentants de la Ville de Grenoble siégeant au sein du Conseil d'administration de la société d’économie mixte locale Innovia et de la société publique locale d’aménagement Sages pour l'exercice annuel 2013 (adoptés en mars 2014), il est possible de faire un état des lieux.
Les opérations menées par ces sociétés d'aménagement couvrent le quart du territoire de la commune et neuf quartiers de la Ville. Les échelles de temps et les niveaux d'investissement sont considérables. La plus ancienne ZAC Europole 1 (coût pour la commune 17,9 millions d'€) remonte à 1987 et a été clôturée en 2013, la plus récente remonte à 2009 dont la clôture est prévue en 2034 (coût 108 millions d'€).
Les trop nombreuses ZAC et opérations engagées sous la précédente majorité rencontrent des difficultés dans un contexte macro-économique dégradé et l’atonie engendrée par les politiques de l’offre dont on voit maintenant les conséquences déflationnistes (ce qui nous ramène mutatis mutandis à la politique économique menée par Laval en 1935). Les coupes drastiques dans nos dotations que le gouvernement Valls s’apprête à effectuer vont accélérer le processus de dégradation économique.
Dans ce contexte les sociétés d'aménagement ont revu les durées de réalisation à la hausse et attendent des augmentations de participation de la commune ; quelques exemples : allongement de la durée de la ZAC Beauvert de 3 ans jusqu’en 2018 et augmentation de la participation à 0,4 millions d'€ ; allongement de la durée de la ZAC Vigny-Musset de 2 ans en raison de difficultés financières et une participation annuelle attendue de la Ville de 2 millions d'€ en 2014, 2015 et 2016. 

Il est aujourd'hui légitime d'interroger le choix politique d’engager la Grenoble dans cette politique d'aménagement surdimensionnée après la crise des supprimes de 2007, alors que capitalisme financier traversait sa plus grande crise depuis la crise de 1929 ; pourtant on lit dans un compte-rendu du Conseil d'administration du 9/1/2008 qu'une élue de l'opposition s’inquiétait déjà « d'un retournement de la conjoncture ». C’était la voix de la sagesse, mais elle ne fut pas entendue ! Ce sont aujourd’hui exactement les mêmes termes que nous trouvons dans les rapports d'analyse de gestion de la ZAC Bouchayer-Viallet dont les programmes sont en difficulté.
L’ancienne majorité municipale - visiblement prisonnière du dogme libéral et productiviste - a engagé les sociétés d'aménagement dans une fuite en avant et dans un système de cavalerie : ainsi le compte-rendu du Conseil d'administration de la SAGES du 19 avril 2011 nous apprend que « la trésorerie de l’opération de la ZAC Vigny-Musset est depuis 2008 assurée par celle de la ZAC de Bonne (prêt montant 2,8 millions d’€) ». De futurs revenus de la Ville étaient ainsi gagés en comptant sur un hypothétique retournement du marché ou sur la perspective de la libération de nouveaux terrains.
Depuis le début de notre mandat, nous voyons quotidiennement les résultats de cette politique déséquilibrée à courte vue, où l'intérêt général a été sacrifié au nom de l'intérêt particulier : un patrimoine municipal délabré, des piscines qui sont des passoires énergétiques, des écoles en nombre insuffisant et qui pour certaines prennent l'eau à chaque averse !
Voilà le triste héritage en matière d'aménagement urbain qu'il nous revient de gérer. C'est pourquoi nous avons pris la décision de revoir le PLU, de supprimer la ZAC de trop (ZAC Esplanade, coût pour la Ville s'élevant à 33 millions d'€, votée il y a un an. le 18 nov. 2013), de remettre à plat la ZAC Flaubert, dont les tours qui étaient prévues étaient des figures de l'hubris, c'est-à-dire l'illusion d'une croissance infinie dans un monde fini.

Nous voulons mettre fin à un modèle coûteux et inefficace, en un mot dépassé, et voulons ouvrir la voie - en concertation avec les Grenoblois-e-s - à un nouveau paradigme urbain, qui offrira un mieux disant social et écologique.

Sur Twitter : @j_soldeville

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