En ce jour de manifestation et de grève pour l'Éducation nationale, et alors que je viens d'entendre Jack Lang sur France Inter parler de "vandalisme" et de "sauvagerie" de l'État contre l'école, je ne peux m'empêcher de penser au sort qui est réservé par le président de Région socialiste Jean-Jack Queyranne et le recteur de l'académie de Grenoble au lycée Emmanuel Mounier de Grenoble.
Il y a exactement un an le recteur et le président de Région convoquaient un Conseil d'administration extraordinaire et envoyaient conjointement un courrier aux familles de l'établissement disant en substance ceci : "Le transfert des élèves vers d'autres établissements grenoblois est incontournable à la rentrée 2011" ou encore "Il y a aujourd'hui un impératif de sécurité qui s'impose au décisionnaire que je suis".
Or, un an après, qu'en est-il exactement ?
Pour ce qui est du "transfert", celui-ci n'a été que partiel mais fort coûteux pour le contribuable rhône-alpin : nous estimons à près de 100.000 euros le transfert des BTS et les aménagements nécessaires à l'accueil des 4 divisions de 2nde délocalisées dans d'autres établissements de l'agglomération.
Le principal gagnant de l'affaire est un lycée confessionnel privé sous contrat, situé à un arrêt de tram de Mounier, qui à cette rentrée a fait le plein, alors que, jusqu'alors, sur ce segment, il pâtissait de la concurrence du public.
En ce qui concerne la supposée insécurité des bâtiments, la société Concrete chargée de la télésurveillance d'ouvrage a rendu son verdict après une année de mesures et de contrôle : "La période écoulée n'a pas montré de tendance alarmante des capteurs (pas de variation rapide, ni d'écart significatif des valeurs) pouvant signifier une instabilité de la structure".
En d'autres termes, l'argument d'insécurité invoqué à la fois par le président de Région Queyranne et le recteur de l'académie de Grenoble pour fermer le lycée est invalide !
Divers scientifiques, spécialistes de la mécanique des sols, que nous avons consultés, sont formels :
- ainsi Marc Boulon, professeur émérite à l'université Joseph Fourier : "toutes les constructions, même les barrages, respirent en phase avec la température, selon la saison de l'année...Qui peut maintenant parler de mise en danger de la vie des élèves ?"
- ou encore son collègue Etienne Flavigny : "C'est comique... Mounier respire, a chaud, a froid... Et il n'est fait aucune comparaison sérieuse avec la température, genre autocorrélation pour bien mettre en évidence ce rôle. Globalement, cela montre aussi qu'il n'y a aucune aggravation des phénomènes."
Il y a donc bel et bien eu manipulation du dossier technique pour justifier dans un premier temps la fermeture totale du lycée Mounier puis la réduction drastique des effectifs !
Les prochaines étapes annoncées consisteront en effet à réduire les effectifs à 300 élèves, puis à construire un lycée tout algéco à un coût prohibitif (ce qu'il faudra bien évidemment expliquer aux contribuables en ces temps de crise financière...) et enfin, une fois l'administration, les profs et les élèves ainsi hébergés, détruire la totalité du bâti.
Tout cela pour un mensonge (ce qui est désormais clairement établi aux yeux de tous) et dans l'unique but ne pas faire perdre la face à un président de Région, qui a accepté de se voir embarquer dans cette triste affaire par sa directrice adjointe des services en charge des lycées...
Jack Lang serait bien inspiré de faire la leçon à son camarade Jean-Jack Queyranne, afin qu'il arrête enfin les frais dans ce dossier et afin de lui éviter de tomber lui aussi définitivement dans le "vandalisme" et la "sauvagerie" à l'égard du lycée Mounier de Grenoble.