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Billet de blog 14 févr. 2023

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L’échec de l’outrance

Hier, le député LFI Aurélien Saintoul a provoqué un buzz. En qualifiant le ministre Olivier Dussopt « d’assassin » il provoqua l’indignation de toute l’Assemblée Nationale, une suspension de séance, et la condamnation exprimée par tous les groupes, sauf le sien. Cette séquence se produisit sous la présidence du RN puisque c’est le député Sébastien Chenu qui officiait au perchoir.

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Hier Le député LFI Aurélien Saintoul a provoqué un buzz. En qualifiant le ministre Olivier Dussopt "d’assassin" il provoqua l’indignation de toute l’Assemblée Nationale, une suspension de séance, et la condamnation exprimée par tous les groupes, sauf le sien. Cette séquence se produisit sous la présidence du RN puisque c’est le député Sébastien Chenu qui officiait au perchoir.

La stratégie de l’outrance, du débordement, ou de « l’huile sur le feu » qui a été théorisée par Jean Luc Mélenchon lui même avec « le bruit et la fureur » trouve ici ses limites.

Le député Saintoul, par son excès de langage, a réussi trois choses qui se révèlent catastrophiques.

Il a d’abord réussi à renforcer la majorité dont le MoDem qui commençait à douter sur le bras de fer mené par le gouvernement.

Il a ensuite réussi à faire du ministre une victime légitime, et un républicain exemplaire, alors que ce dernier était en difficulté et passait pour un dissimulateur dans l’explication de la réforme qu’il porte.

Il a enfin, et c’est un exploit, permis au RN, qui présidait la séance de faire l’arbitre des vertus et l’acteur principal de l’apaisement.

C’est une défaite totale, pour ce député, mais aussi pour la France Insoumise, et à un degré moindre un dommage collatéral dangereux pour les autres formations politiques de la NUPES.

Plus globalement c’est l’échec de la pensée révolutionnaire par l’outrance. Jean Luc Mélenchon aurait pu l’anticiper, lui, philosophe de formation puisque Platon pensait la sagesse nécessaire pour pratiquer le pouvoir politique ou Machiavel qui expliquait que le pouvoir politique s’épanouissait dans un conflit cadré et rationnel ou les Lumières encore, ont démontré que la parole politique qui s’accompagne d’une volonté de changer le système doit toujours contenir du sens, et de la pondération. Cela demeure un paradoxe nécessaire, même à notre époque, où les éléments de langage vides de sens laisse penser que plutôt que Platon, c’est Protagoras qu’il faudrait citer.

Et c’est une problématique récurrente en politique qui consiste à considérer que dès lors qu’on est élus et donc légitimes, alors l’on en devient ipso facto crédibles. Mais légitimité n’est pas crédibilité. Et si la première de ces qualités survient à la fin du scrutin, la seconde se construit tout au long du mandat.

Or ce procès en crédibilité, exercé avec passion par les adversaires de la gauche et de l’écologie, doit inciter la gauche à ne pas tomber dans la validation de ce procès. Car, sitôt ce procès validé par des comportements outranciers, l’extrême droite gagne. Par deux mécanismes navrants mais qui existent.

Le premier est dès lors que l’exemplarité remplacée par l’outrance chez les élus, légitime cette outrance chez les militants ce qui provoque méfiance et rejet par les citoyennes et citoyens qui ne sont pas déjà convaincus. Cette défiance a pour conséquence directe une diminution des votes pour les projets de gauche et donc une incapacité à bouter le RN hors des seconds tours.

Le second consiste en ce que le n’importe quoi est alors la norme et le débat public en devient infesté. De plus cela élargit la fenêtre d’Overton et crédite l’extrême droite d’une vertu républicaine.

Si l’on peut dire n’importe quoi, alors à quoi sert il de penser ce que l’on va exprimer ? De réfléchir ce que l’on va agir ? Et d’assumer ce que l’on profère ?

Si l’on peut dire n’importe quoi alors à quoi cela sert il d’avoir des idées ? De vouloir réaliser des choses ?

Si l’on peut dire n’importe quoi, à quoi sert il de voter ? De vouloir être représenté par des personnes qui elles-mêmes diraient n’importe quoi ?

Merci. A cause de cette outrance le débat public est sclérosé, et le vote inutile. L’abstention est donc logique.

A cause de cette outrance le pouvoir politique est affaibli, et la pensée politique vaine.

Or l’on ne peut changer de système sans en penser un autre qui soit réalisable. L’outrance est donc le meilleur des conservatismes.

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