Questions sur un article de Nice-Matin traitant des Rroms (orthographié "Roms")*
Au rédacteur de l'article du 3 août 2011, veille de la célébration de l'abrogation des privilèges,
Au journaliste et aux adjoints interviewés, chargés du tourisme et de la sécurité publique à Nice,
Messieurs, Je voudrais comprendre.
Votre citation : « une politique d'accueil forte avec des logements sociaux, des lieux d'hébergement d'urgence, des soins gratuits, des vestiaires... Oui mais priorité aux gens d'ici... »
1. “La politique d'accueil forte” : est-ce compatible avec cette déclaration (anticonstitutionnelle, il faut le préciser) : « Priorité aux gens d'ici » qui suit immédiatement votre liste de services sur l'occupation du domaine public.
2. “logements sociaux, lieux d'hébergement d'urgence...” : saturés, inaccessibles, et exclusivement réservés aux détenteurs de pièces d'identité...
3. “soins gratuits et des vestiaires” : par des associations non communales, oui, mais pas par la ville de Nice.
Alors, que voulez-vous donc, au conseil municipal, élus locaux et presse, que voulez-vous proposer pour que des gens soient accueillis dignement, hébergés correctement, soignés convenablement ?... de sorte que l'on puisse assurer, pour tous et pour chacun des conditions de vie décente et un minimum de paix sociale, de convivialité, de respect mutuel ?..
J'attends très naïvement vos réponses.
Merci.
Jean-Jacques M’µ, touriste qui a assisté à ces scènes au jardin de Masséna.
Autre réaction, du MRAP, cette fois, au même article :
Mouvement contre le Racisme et pour l'Amitié entre les Peuples, comité de NICE-GRASSE,
13 rue Amiral de Grasse, 06000 NICE. mrap.nice@laposte.net
Monsieur RINAUDO
Journaliste à NICE-MATIN
Objet : votre article du 03/08/2011.
Monsieur,
Votre article sur un campement "sauvage" de Rroms au Forum Jacques MÈDECIN appelle les remarques suivantes :
– Vous opérez un amalgame entre "gens du voyage" et Rroms. Les Gens du Voyage sont des citoyenNEs français, dotéEs d’un Livret de Circulation en guise de pièce d’identité qui leur permet d’accéder aux aires dédiées, là où elles existent (il en existe une à la sortie de NICE, sur la 202). Les Rroms sont le plus souvent des ressortissants roumains que la misère et la discrimination ont poussés sur les routes de l’Europe, où ils bénéficient de la liberté de circulation. Ils n’ont pas accès aux aires d’accueil et n’ont pas les moyens d’accéder à un hébergement hôtelier (nos palaces étant surbookés en cette saison).
– À la lecture de votre article, il n’apparaît pas clairement qu’il s’agisse d’êtres humains. Peut-être avez-vous des enfants ? Il faudrait vraiment que vous soyiez dans une détresse extrême pour leur infliger de telles conditions de survie : absence de scolarisation, nuits à la "belle étoile", nourriture extraite des poubelles, hygiène tributaire de l’arrosage public, etc.
Depuis 1948, "Tous les êtres humains naissent libres et égauxen droits et en DIGNITE." Pour les droits, n’en parlons pas: le 115, qui doit assurer un accueil INCONDITIONNEL, ne répond plus aux demandes (voir le très humain article de votre collègue Laure BRUYAS dans l’édition NM du 01/08). Pour la dignité, elle devrait s’imposer aux médias...
– Vous n’abordez ce problème que par les nuisances engendrées sans vous interroger sur les causes et les responsabilités, ce qui n’est pas très professionnel pour un journaliste qui aspire sûrement à traiter d’autres sujets que les faits divers. Depuis le "Discours de Grenoble", les campements d’infortune de Rroms sont systématiquement détruits et leurs habitants pourchassés sans qu’aucune avancée politique dans leur prise encharge, au niveau européen, n’ait avancé. Le "problème" ne fait donc qu’être déplacé et même aggravé puisque les éventuelles prises en charge médicales sont interrompues, ce qui entraîne, entre autres, un risque sanitaire.
– La solution, pour les pays riches (dont la France fait partie, ne l’oublions pas !), pour faire face aux conséquences humaines de leur politique de pillage et d’exploitation, consiste à s’entourer de grillages – virtuels avec les accords de SCHENGEN – et bien réels avec Frontex et nos polices aux quotas d’expulsions progressifs. Les morts sur les barbelés de CEUTA et MELLILA, les noyés au large de LAMPEDUSA et de MAYOTTE peuvent enfin reposer en paix : ils n’occupent plus la "une". Les grands principes proclamés "libre circulation des personnes et des idées", "droit de vivre en famille" et blablabla, les Conventions internationales (CI Droit des Enfants) sont bafoués, nos libertés régressent, mais qu’ILS n’atteignent même pas les miettes du gâteau demeure l’essentiel...
– Proposer l’installation de grilles autour du forum relève de cette politique à courte vue qui privera plus encore la population de jouir des espaces verts. Pour empêcher les SDF de s’installer pour la nuit, des personnes hospitalières scellent des galets ou des jardinières. Pour les jardins Albert 1, vous pourriez suggérer des "asperges de ROMMEL", elles ont fait merveille pour retarder le retour à la démocratie.
– NICE se glorifie de sa place de grand aéroport international, NICEaspire à accueillir des événements internationaux (G 8, G 20, etc.), NICE étale son luxe dans les médias sans frontières : comment s’étonner que des êtres humains, qui ont un même droit au bonheur, s’y précipitent ? NICE n’est pas nice pour tous !
Espérant que ce courrier vous amènera à un traitement plus humain de l’actualité, je vous prie d’agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.
Christian MASSON
* NOTES :
Dans toutes les langues, il y a des mots empruntés. Le mot « Rrom » en est un, tant en français qu’en anglais et bien d’autres. Il vient du rromani, c’est-à-dire la langue du peuple rrom. En rromani, il prend deux « r » et se distingue donc du « r » simple, qui existe aussi. En phonologie, on appelle cela une opposition. Par exemple« rani » veut dire « dame », alors que « rrani » veut dire« branche ». Depuis les débuts de la littérature rrom dans l’Union soviétique des années 1920, ce son particulier était transcrit en double « r », transcription reprise dans l’alphabet du rromani adopté en 1990 par l’Union rromani internationale.
L’apparition du mot en français, mais aussi dans d’autres langues, est très récente. Jadis, et encore aujourd’hui d’ailleurs, on parle de « tsigane », de « romanichel », de « bohémien » etc. Parce que ces mots portent souvent à confusion, il est préférable et de plus en plus préféré d’utiliser le mot « rrom », qui est emprunté donc au rromani, et cela de fraîche date. Ainsi, comme pour tous les emprunts récents, on utilise l’orthographe de la langue d’origine et on décline selon les règles de la langue d’arrivée : un rrom, deux rroms. (SAIMIR MILE)
Termes administratifs :
Nomades est apparu en France en 1912 (Loi du 16 juillet 1912) pour instaurer une politique de surveillance généralisée des nomades.Gens du voyage est venu se substituer en France aux termes de Nomades ou de Tsiganes. Son apparition date d’une circulaire du ministère de l'Intérieur de 1978. Il réfère aux personnes dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles. Il concerne donc aussi des groupes qui ont adopté un mode de vie itinérant : les forains qui ne sont pas tous Roms, les Yeniches, voyageurs d'origine germanique…